Une jeune Vénézuélienne est suspectée d’avoir encadré un groupe de prostituées. Rachely prétend avoir rendu service à une amie en assumant certaines tâches, mais ne pas avoir été proxénète.
L’affaire de l’homicide de Tétange a été mise sur pause vendredi pour cause de maladie d’un des juges. Nous avons donc choisi de suivre le procès de Rachely pour prostitution et proxénétisme. La jeune femme de 23 ans dit n’avoir été qu’un maillon d’une organisation chapeautée par une certaine Valentina. Pourtant, c’est elle qui se retrouve face à la 12e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.
«J’ai été manipulée», s’est justifiée la Vénézuélienne vendredi matin. «J’ai agi naïvement. Pour moi, j’ai rendu service à une amie, je ne voyais pas cela comme un délit. Je devais donner la moitié du prix de la passe à Valentina, comme les autres filles.» Elle apparaît cependant de plus en plus comme son bras droit au fil de l’enquête du service criminalité organisée de la police judiciaire.
Traite humaine
Il lui est notamment reproché d’avoir loué les différents Airbnb dans lesquels elle et trois autres jeunes filles se sont prostituées entre le 22 mars et le 14 novembre 2022 et d’avoir servi d’intermédiaire à Valentina en s’occupant de la gestion de ses affaires au Luxembourg. L’enquête a démontré que la prévenue réceptionnait le produit des prestations sexuelles, assurait la comptabilité et transférait l’argent par Western Union, entre autres. «Je ne voulais pas avoir cette responsabilité. Je ne l’ai jamais dit à Valentina parce qu’elle était agressive. Cela se voit dans nos échanges de messages», explique Rachely.
Le propriétaire d’un Airbnb situé à Weimerskirch a eu un doute sur les activités de ses locataires et a prévenu la police. Sur place, les agents ont découvert quatre jeunes femmes et un client que Rachely a présenté comme un ami. Les trois jeunes femmes qui partageaient l’appartement avec la prévenue étaient en situation illégale au Luxembourg. Elles étaient arrivées de Barcelone deux jours plus tôt, le 12 novembre dernier.
Une situation qui expose la Vénézuélienne à une condamnation pour traite humaine avec la circonstance aggravante qu’elle aurait «abusé de la situation précaire de ces autres prostituées qui n’avaient pas de titre de séjour pour travailler légalement en Europe, aucun lien avec le Luxembourg et ne parlaient aucune des trois langues du pays». Rachely les aurait, selon son acte d’accusation, également menacées de les mettre à la porte de l’appartement si le chiffre d’affaires fixé par Valentina n’était pas atteint.
«Le visage du groupe»
Ce qu’elle réfute fermement, comme le reste des accusations qui pèsent à son encontre, dont l’association de malfaiteurs et le blanchiment «des sommes considérables évaluées à des milliers d’euros» issues de la prostitution, a précisé le président de la 12e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Pour la représentante du parquet, tous les faits sont donnés : «Rachely a fait fonctionner une maison de débauche et de prostitution pour le compte de Valentina.» La magistrate a requis une peine de trois ans de prison à son encontre ainsi qu’une amende.
«Rachely n’était pas victime de l’emprise de Valentina, même si elle s’est elle-même adonnée à la prostitution. Elle n’avait pas le même rôle que les autres», note-t-elle, estimant que la jeune femme «était le visage du groupe au Luxembourg». «Dans un message, elle a confié à Valentina jouer les idiotes pour faire croire aux autres filles qu’elle était à leur niveau.» La prévenue aurait été en contact permanent avec Valentina via un groupe WhatsApp.
En situation de précarité
«Ma cliente n’a jamais organisé le plan de travail des filles, jamais fixé le prix des prestations, jamais mis les annonces en ligne pour les services qu’elles proposaient, jamais fait de photographies des filles et ne les a jamais menacées.» L’avocate de la jeune a rejeté en bloc les accusations et plaidé en faveur de son acquittement. «Elle n’était pas consciente qu’en aidant celle qu’elle pensait être une amie, elle se rendait complice de proxénétisme.» Rachely n’aurait jamais eu l’intention de commettre un délit. Elle se trouvait également en situation de précarité, selon l’avocate, et aurait été abusée par la mère maquerelle en qui elle avait confiance.
Les filles travaillaient entre 20 h et 2 h du matin. Les rendez-vous leur étaient transmis par WhatsApp par une réceptionniste qui gérait leurs agendas et était en contact avec les clients. Elles devaient remettre la moitié des sommes payées par les clients à Valentina ou à Rachely. Des annonces étaient postées sur des sites internet spécialisés pour attirer les hommes et les tarifs étaient fixés en amont pour des prestations de trente minutes.
Le prononcé est fixé au 19 octobre prochain.