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Procès Heaulme : sa sœur raconte l’enfance du « routard du crime »


"Francis c'est une personne... on va dire compliquée des fois. Il tombe toujours dans les mauvaises situations, on va dire", décrit sa sœur. (Photo AFP)

Comment a grandi Francis Heaulme ? Sa sœur a tenté d’esquisser jeudi le portrait du « routard du crime », jugé depuis mardi par la cour d’assises de Metz pour les meurtres de Cyril et Alexandre, 8 ans, en 1986 à Montigny-lès-Metz.

« Cette histoire de Montigny me mélange beaucoup la tête, elle est très compliquée. On dit ça, on dit ça, on dit ça… », commence Christine Heaulme. Cheveux bruns, courts, extrêmement mince, elle flotte un peu dans sa doudoune kaki. Ses traits rappellent ceux de son frère. « Aujourd’hui je voudrais dire à mon frère : je serai toujours là pour toi Francis. On va y arriver. T’es dans une tunnel noir, mais tu vas voir la lumière », lance-t-elle, se retournant vers le box dans lequel il est assis. « Est ce que c’est toi qui a tué ? ». « Non, c’est pas moi », répond Heaulme, en larmes, avant d’être interrompu par le président.

La cour veut entendre Christine sur leur enfance, leurs vies de jeunes adultes. Le récit d’une vie de famille avec beaucoup d’alcool – « de la bière », « un verre de vieux pape », mais sans être des alcooliques, « les alcooliques, c’est tous les jours », se défend Christine. « Mon père, le problème qu’il avait, c’était que c’était un dingue de tiercé, de tarot. Le vendredi, il rentrait, il était ivre », ajoute-t-elle toutefois. De violence aussi – un père qui « correctionne » Francis, qui ne l’aime pas, qui l’appelle « le boucaque. Ça veut dire arabe, et mon père, il est raciste ». Qui frappe également sa femme, « le vendredi, quand il rentrait du tarot ».

« J’ai abandonné mon frère »

« Si mon frère avait eu plus d’amour de mon père, ça se serait peut-être pas passé comme ça… », avance Christine, avant que sa voix ne se charge de culpabilité. « J’ai rencontré un homme. J’avais 18 ans. Francis le connaît. Et aujourd’hui je m’en veux. Pour moi, j’ai abandonné mon frère pour un homme. Et si j’avais pas rencontré cet homme, mon frère serait toujours avec moi. De là Francis a fini seul ». La voix se brise, les larmes coulent. « Il a continué sa route, moi j’avais des œillères, j’étais trop amoureuse. J’ai oublié mon frère. Mon frère est devenu vagabond ».

Des neuf pour lesquels il a été condamné, Francis Heaulme n’a avoué qu’un meurtre à sa sœur : celui de Sylvie Rossi. Il a été condamné en 2004 dans cette affaire. Quant aux meurtres de Cyril Beining et Alexandre Beckrich, âgés de 8 ans, dont les corps furent retrouvés le 28 septembre 1986 sur un talus SNCF de Montigny-lès-Metz, le crâne enfoncé à coups de pierre, il les a toujours niés. « Moi je lui parle de l’affaire de Montigny, je le bassine, je le piège, je veux savoir. C’est pas moi qu’il dit. Et je le crois ».

Et si on a dit qu’elle avait arrêté de venir voir son frère après sa condamnation pour le meurtre d’un enfant, Joris Viville, à Draguignan, « c’est archi-faux ». « Francis c’est une personne… on va dire compliquée des fois. C’est très très dur. Il tombe toujours dans les mauvaises situations, on va dire ». C’était « quelqu’un de gentil, un peu un peureux, timide … », raconte son ex-mari. Vient le tour de Marcel Heaulme, le père. Assis dans son costume gris, marmonnant parfois, il nie avoir jamais fait de mal à sa famille. « J’ai jamais fait de violences. » Son fil non plus. Tout juste s’il évoque « un petit caractère. Peut-être qu’il a été trop gâté… Il a jamais fait de mal ». « Monsieur Heaulme a été condamné pour neuf meurtres », le coupe le président.

« Mettez Francis devant moi », demande à plusieurs reprises le père, avant de s’apercevoir que son fils est juste là, à gauche, dans le box. De la main, Francis Heaulme lui fait signe. Ils ne se sont pas vus depuis plus de 20 ans.

Le Quotidien/AFP