Un dernier témoignage affaiblit la théorie du complot avancée par le gynécologue avant une pause à l’initiative de son duo d’avocats. Ils accusent deux témoins de mensonges à la barre.
«Faites comme Angelina Jolie, enlevez tout!», aurait lancé le docteur G. à une patiente venue chercher les résultats d’une mammographie sans lui en donner le résultat. Après une première expérience peu concluante auprès du gynécologue, Sandra, 47 ans, décide de changer de médecin. Elle est la quatrième victime présumée d’un gynécologue accusé de viols et d’attouchements sexuels.
Il comparaît depuis deux semaines face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Pour Sandra, les gestes du gynécologue ne correspondraient pas aux pratiques normales. Elle les rapporte à une consœur du docteur G. qui la met en contact avec l’enquêteur de la police judiciaire. La consœur avait été entendue dans le cadre de l’enquête déjà en cours à la suite des signalements auprès du collège médical.
Sandra raconte à la barre que lors du premier rendez-vous, le docteur G. aurait frappé dans les mains et lui aurait, à deux reprises, dit : «Allez, à poil!». Le docteur nie. Ce ne serait pas son langage habituel. Très pudique, Sandra aurait également refusé la présence de l’assistante «très vulgaire» «en tenue pas possible», lors de la consultation. Le gynécologue refuse avant de se plier aux désirs de sa cliente.
«Il m’a pris par les hanches, m’a retournée, m’a touché la poitrine et les mamelons. Pour moi, ça a duré une éternité», confie la victime présumée. «En 20 ans, on ne m’avait jamais fait un examen mammaire en me touchant les tétons.» Le prévenu l’aurait ensuite invitée à s’allonger sur la table d’examen. «Ensuite, c’est le trou noir.» Le docteur G. lui fait une échographie et un frottis.
Sandra ajoute être rentrée chez elle en pleurs et avoir passé une heure sous la douche, traumatisée par ce qu’elle dit avoir vécu ce jour-là. Elle le serait d’ailleurs encore aujourd’hui et a consulté un psychologue et un psychiatre pour éviter les crises d’angoisse «à chaque rendez-vous chez un gynécologue». Sandra s’est constituée partie civile et a réclamé 15 000 euros de dommages et intérêts.
Guerre d’influence
Ce témoignage a clos les débats jusqu’à nouvel ordre. La défense du gynécologue a porté plainte pour faux témoignage contre une des victimes présumées et un ancien associé du prévenu, interrompant ainsi le cours du procès le temps d’une enquête. Depuis deux semaines, le docteur G., qui n’a pas encore été entendu par le tribunal, rejette énergiquement les accusations qui pèsent contre lui. «Je n’ai pas commis de gestes dépassant un acte gynécologique habituel.»
Les faits allégués se seraient produits à son cabinet entre 2013 et 2020. La victime présumée entendue jeudi après-midi assure ne pas connaître les trois autres victimes présumées ainsi que le docteur A., la bête noire du prévenu. Un aveu qui risque de faire vaciller la thèse du complot avancée par la défense.
Le prévenu et son ancien associé sont en guerre ouverte depuis plus de dix ans quand le docteur A. a quitté le cabinet de son confrère. Les deux hommes s’accusent mutuellement d’être de mauvais professionnels, d’avoir eu des gestes, des propos et des attitudes inappropriés avec leurs patientes. Alors pourquoi pas faire condamner son rival et nuire à sa réputation comme vengeance ultime?
La défense y tient dur comme fer, le parquet est plus difficile à convaincre. D’autant que le docteur G., sous ses airs de gentleman bon chic bon genre, a déjà eu maille à partir avec la justice. En 2018 notamment, il avait assigné deux médecins stagiaires en justice par citation directe pour diffamation et calomnie. Dans le cadre de l’enquête autour de l’affaire actuelle, les deux jeunes femmes avaient dénoncé des méthodes de travail très spéciales de sa part. La 12e chambre correctionnelle les avait acquittées de même que la Cour d’appel. Selon lui, elles auraient menti «avec la seule volonté de (lui) nuire».
En 2022, il avait ensuite été condamné à une amende pour avoir facturé des consultations médicales qu’il n’avait pas effectuées lui-même entre 2012 et 2013. Neuf mois plus tard, il avait été condamné à un an d’interdiction d’exercer par le Conseil supérieur de discipline du Collège médical, dont la moitié avec sursis.
Il faut maintenant attendre les conclusions de l’enquête dans l’affaire avant de connaître le fin mot de l’histoire. Le parquet a d’ores et déjà annoncé que les supposés faux témoignages autour d’écrits au collège médical ne pesaient pas lourd comparés aux témoignages des victimes présumées.
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