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Procès Bommeleeër bis : une débauche de moyens pour la première journée 


La défense de ce procès bis a montré ses arguments en ce premier jour.

Comment savoir qui ment quand on ne connaît pas la vérité? La question a été soulevée hier par la défense en ce premier jour du procès Bommeleeër bis pour faux témoignages.

Ett war net keen! Ce n’était pas personne! L’identité du ou des Bommeléër est le secret le mieux gardé du Luxembourg. Une véritable omerta règne quant à l’origine des attentats à la bombe qui ont secoué le Grand-Duché dans les années 1980.

De nombreuses pistes ont été évoquées (famille grand-ducale, réseaux Stay-behind, guerre des polices…), quand il ne s’agissait pas de les brouiller. Tant et si bien que certains acteurs de l’époque se retrouvent face à la justice pour faux témoignages depuis hier après-midi.

Une foule de curieux s’était massée dans la grande salle d’audience du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour assister à l’ouverture de ce procès bis qui permettra peut-être, en faisant émerger de nouvelles preuves, de dénouer cette affaire devenue affaire d’État. La première audience, sur les seize programmées, a été marquée par les moyens de droit soulevés par les avocats des prévenus.

Sept témoins, un expert psychiatre et sept prévenus moins un. Paul Haan, un ancien membre de la Sûreté de l’État, étant atteint de démence aggravée, la 9e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg a décidé d’une disjonction en sa faveur.

De nombreux moyens ont été soulevés et joints au fond : requête en nullité de la procédure ou de la citation à comparaître pour libellé obscur, demande de surséance à statuer, atteintes ou violations aux droits de la défense soulevées.

Ce fut long, très long. Et très compliqué pour les non-juristes. Les avocats ont tiré des jurisprudences et des articles de loi de leurs manches. Certains remontant à plus d’un siècle. Le procès qui vient de débuter équivaut à «mettre la charrue avant les bœufs», indiquent certains avocats qui jouent la montre.

Ils avancent qu’il serait plus opportun de trancher sur la culpabilité de Marc Scheer et Jos Wilmes, donc statuer sur le dossier principal, avant de pouvoir se prononcer sur d’éventuels faux témoignages de la part des prévenus.

«Égalité des micros»

Encore faut-il s’entendre sur la notion de faux témoignage. «On ne peut parler d’un mensonge que si on connaît la vérité», note Me Pierret, défenseur de Guy Stebens. «Il faut d’abord connaître du fond du dossier principal avant de pouvoir se prononcer.»

Malheureusement, le premier procès Bommeleeër a été interrompu au bout de 177 jours d’audience par le parquet. Sa représentante actuelle, suivie par les juges, a rejeté les arguments des avocats et a renvoyé aux conclusions des enquêteurs en tant que jauge de la vérité.

«Un scandale» pour Me Lydie Lorang, «mémoire» de l’affaire. Le temps passe, les souvenirs s’effacent et les protagonistes de l’affaire ne rajeunissent pas. Le doyen, Aloyse Harpes, a 97 ans. Charles Bourg, un des prévenus et premier directeur général de la police grand-ducale, est mort à 79 ans cet été.

Enfin, les juges ont également décidé de refuser la demande d’enregistrement des débats émise par la défense de Jos Wilmes et Marc Scheer, qui ont plaidé en faveur «de l’égalité des micros».

Ces deux anciens membres des brigades mobiles de la gendarmerie et suspects principaux ne sont pas partie au procès, mais estiment que d’éventuels nouveaux éléments pourraient influer à charge ou à décharge sur la reprise d’un éventuel procès à leur encontre. «Ils sont sur le gril depuis dix-huit ans» et les enregistrements pourraient figer des preuves. Le tribunal, lui, estime que «les preuves seront produites par les enquêteurs» et non pas par les témoignages des prévenus.

Cette demande rejetée, les deux anciens policiers se sont portés parties civiles. Ils réclament 500 000 euros de dommages et intérêts chacun avec les intérêts légaux depuis le jour de clôture du premier procès.

Me Philippe Penning demande l’euro symbolique au nom de l’État luxembourgeois pour perte d’une chance de découvrir la véritable identité du ou des Bommeleeër et «de se faire dédommager pour les dégâts causés par les attentats par l’allongement de la procédure dû aux faux témoignages commis», pour «atteinte à l’image de l’État de ne plus pouvoir élucider la plus importante affaire criminelle ayant ébranlé le pays durant le dernier siècle, et ce, d’autant plus que les auteurs émanent plus que probablement de ses propres rangs» et enfin pour «atteinte à l’ordre constitutionnel ainsi qu’à la crédibilité et réputation de l’État, due à ces faux témoignages commis par ses plus hauts fonctionnaires chargés d’élucider les crimes et délits».

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