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Prévention du suicide : vers un numéro d’urgence unique


Le député Ricardo Marques (CSV) propose que le «119» devienne le numéro d’urgence pour guider rapidement les personnes en détresse vers le bon interlocuteur. (photo archives LQ)

La Chambre appelle à l’unanimité le gouvernement à mettre en place un numéro semblable au 112 ou au 113 pour permettre aux personnes en détresse mentale de trouver une aide rapide et adéquate.

Le LSAP est à la base du débat mené, mardi après-midi, à la Chambre sur la problématique du suicide. Un phénomène qui, malgré une baisse du nombre de cas – 48 en 2023 contre 81 en 2015 – doit «continuer à être pris très au sérieux», comme le souligne Taina Bofferding, la présidente du groupe socialiste. Deux autres chiffres soulignent l’urgence. Des estimations font état de 20 fois plus de tentatives que les suicides enregistrés. «On serait donc à 960 tentatives en 2023, soit deux à trois par jour», avance la députée.

Parmi les lycéens, un sur quatre aurait des pensées suicidaires. Djuna Bernard (déi gréng) précise que le suicide est la première cause de mortalité dans la catégorie des 15 à 29 ans. «La situation des jeunes est particulièrement alarmante. D’où l’importance d’assurer aussi l’accès aux psychologues, psychiatres et psychothérapeutes», insiste l’élue.

Marc Goergen (Parti pirate) attire l’intention sur une «pression mentale qui n’est pas à sous-estimer». Le harcèlement constituerait «un risque psychologique important, auprès des jeunes, mais aussi des adultes. Les réseaux sociaux font notamment que les concernés croulent sous la pression». Il plaide pour que le Grand-Duché devienne «à nouveau un pays où ceux qui ont des pensées noires ne soient pas laissés seuls».

«Un suicide n’est jamais une décision isolée, mais la fin d’une détresse devenue insoutenable et qui n’est pas toujours visible. À nous de la rendre visible, d’offrir aux personnes concernées un accès aux soins et leur donner des perspectives», reprend Taina Bofferding. Elle renvoie vers l’importance du Plan national de santé mentale 2024-2028, qui doit «être mis en œuvre de manière conséquente». «Nous avons besoin d’une politique proactive et d’une approche multisectorielle», plaide-t-elle.

La ministre de la Santé, Martine Deprez, défend l’approche multisectorielle «Le processus qui mène à un suicide est très complexe. Il n’existe pas de cas type. Les risques sont multifactoriels», précise la ministre, avant de dresser la liste de ces risques : chômage, pauvreté, isolation sociale, dépression, problèmes financiers, peurs existentielles et maladies mentales. «Il nous faut changer de discours. En tant que société, nous devons tous ensemble pouvoir parler du suicide et tisser les liens pour l’éviter», fait-elle remarquer.

La création d’un centre de crise rejetée

Au nom du gouvernement, Martine Deprez a cependant rejeté la revendication du LSAP de mettre en place un Centre de crise pour mieux prendre en charge les personnes en grave détresse mentale. «Notre focus est une meilleure coordination des offres existantes. Au vu du manque de personnel qualifié, il nous faut d’abord définir comment mettre en réseau les services en place», détaille la ministre, appuyée lors du vote de la motion qui s’y rapporte par les élus de la majorité formée par le CSV et le DP.

Les députés ont toutefois voté à l’unanimité une autre nouveauté, qui doit aider à améliorer la prise en charge de personnes en détresse. Ricardo Marques (CSV) a introduit la motion poussant le gouvernement à créer un numéro d’urgence unique. «Il n’est pas concevable qu’il est plus simple de commander une pizza que de trouver de l’aide en cas de crise psychologique. La personne en détresse n’a pas la force de mener sa propre recherche pour choisir le bon interlocuteur. Elle doit d’office savoir qu’un numéro unique est accessible», argumente le psychologue de formation.

Il précise avoir trouvé une trentaine de points de contact en cherchant de l’aide, entre autres SOS Détresse, le Kanner- a Jugendtelefon, la Ligue de santé mentale ou encore les portails prevention-suicide.lu et prevention-depression.lu (lire également ci-contre).

Cette fragmentation de l’aide fait aussi partie des critiques formulées par l’OCDE, comme le rappelle Marc Baum. S’y ajoutent le manque d’accès à l’aide (pénurie de spécialistes, temps d’attente très longs) et l’existence de structures ambulatoires et décentralisées. «Cette mosaïque confirme le manque de coordination entre les acteurs, qui fait davantage défaut que l’expertise des intervenants sur le terrain ou les budgets nécessaires», indique le député de déi Lénk.

Carole Hartmann a insisté sur l’importance du bien-être du personnel de santé. «Comment peuvent-ils prendre en charge des personnes en détresse si eux-mêmes ne sont pas en bonne santé mentale. Une récente étude démontre qu’ils sont 18 % à vivre des dépressions. Il nous faut donc aussi s’engager plus fort pour leur bien-être», fait valoir la députée du DP.

Fred Keup (ADR) a placé le débat dans un contexte sociétal plus large. «On vit une période où tout est remis en question. Les havres de stabilité ont tendance à disparaître. Or il serait très important de garder intact le modèle d’une famille composée d’un père, d’une mère et de leurs enfants. Toutes les études démontrent que les enfants grandissant dans une famille stable ont un risque très bas de développer des pensées suicidaires», développe-t-il.

Où trouver de l’aide ?

Si vous avez des pensées suicidaires ou vivez une crise mentale aiguë, adressez-vous aux plateformes d’aide suivantes.

Téléphones d’urgence
112 (ambulances, hôpitaux, médecins, pharmacies)
113 (police grand-ducale)

Besoin de parler?
SOS Détresse : (+352) 45 45 45
Kanner- a Jugendtelefon : 116 111

www.prevention-suicide.lu

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