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Présidentielle en France : Lorrains et frontaliers déçus et perplexes


L'indécision des électeurs renforce l'incertitude, alors que quatre candidats (Le Pen, Macron, Mélenchon, Fillon) sont au coude-à-coude pour le premier tour du 23 avril. (photo AFP)

Perdus, tiraillés: environ un Français sur trois ne sait toujours pas pour qui voter, à une semaine de la présidentielle. De la Lorraine à la Bretagne, ces indécis confient être déçus par les candidats et une campagne brouillée par les affaires.

« Je sais pour qui je ne voterai pas, mais je ne sais pas pour qui je vais voter », indique Marc Jaurena, 34 ans, un habitant de Metz qui travaille au Luxembourg. Il se dit scandalisé par « les affaires », ces emplois fictifs présumés payés sur de l’argent public qui ont entaché l’image du candidat conservateur François Fillon mais aussi de la cheffe de file de l’extrême droite Marine Le Pen. « Dans n’importe quel autre pays, ils se seraient retirés », s’insurge-t-il.

« Mon emploi au Luxembourg est directement impacté par une élection de Marine Le Pen », favorable à une sortie de l’Union européenne, souligne ce frontalier, qui n’est pas plus convaincu par le bouleversement institutionnel prôné par le héraut de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, ou le « bourrage de crâne » du centriste Emmanuel Macron.

« Cette élection est atypique. La campagne est bousculée par les affaires. La situation est devenue trop complexe pour mobiliser les gens », analyse le politologue Richard Kleinschmager.

L’indécision des électeurs renforce l’incertitude, alors que quatre candidats (Le Pen, Macron, Mélenchon, Fillon) sont au coude-à-coude pour le premier tour du 23 avril, avec des intentions de vote comprises entre 19 et 23%.

« Pour moi, ce n’est pas clair ». Fabrice Blanchard, 41 ans, agent commercial en Lorraine, a toujours voté « à gauche » mais s’avoue perplexe. « Macron, on ne sait pas s’il est de droite ou de gauche ». Quant au candidat socialiste Benoît Hamon, « il est quand même issu du gouvernement sortant », très impopulaire au sein d’une partie des électeurs de gauche depuis un virage plus libéral en 2014.

Pierre, 28 ans, rencontré à Rennes, éprouve les mêmes difficultés. Électeur de Nicolas Sarkozy (droite) en 2012, il confie pencher pour Emmanuel Macron, benjamin des candidats à 39 ans, « parce qu’il est jeune ». Mais il n’est « pas encore sûr à 100%, parce qu’on ne sait pas trop s’il est à droite ou à gauche ».

« Je suis perdu »

« J’ai toujours été socialiste, mais Hamon, je n’aime pas. Macron est trop jeune. Je ne sais pas si je vais aller voter », se désole Jeannette, 77 ans, professeure à la retraite à Rennes.

« Les indécis sont une caractéristique de cette élection », souligne Richard Kleinschmager. « Les électeurs des deux grands partis sont terriblement fragilisés ».

« Ca se sent en Alsace, terre traditionnellement de droite, mais également dans les Vosges et en Lorraine, où la déstructuration économique rend difficile la crédibilité des programmes des partis classiques », soutient-il.

« Je ne sais pas pour qui je vais voter. C’est la première fois que ça m’arrive », reconnaît Françoise, 54 ans, fille de l’ancien maire d’une commune dans l’est, « plutôt de droite ».

« Je rencontre plein de gens de droite qui ne savent pas pour qui voter », assure cette cadre du secteur pharmaceutique. Son choix s’était porté sur Alain Juppé pour la primaire de la droite. Elle aurait pu voter pour François Fillon « s’il n’y avait pas eu les affaires » depuis.

« L’honnêteté dans la vie et en politique, c’est indispensable. Mon père était maire d’une commune et, si je faisais trois photocopies à la mairie, il sortait son porte-monnaie pour les payer. Alors, quand on voit la famille Fillon… Je suis bouleversée par les affaires ».

Même ressentiment chez Martine, 55 ans, une électrice bretonne: « au départ j’étais pour Fillon, mais maintenant, avec les casseroles qu’il a, non. Trop décevant! ».

Plutôt à gauche, Jacques Fischer, 52 ans, ingénieur dans l’industrie à Strasbourg, confie aussi être « complètement perdu »: il rejette le « frondeur » Hamon, écarte Macron, considéré comme « de droite » et juge « risquées » les positions de Jean-Luc Mélenchon.

« Le danger, c’est quand on ne sait plus à quoi se raccrocher, alors on prend un billet à la loterie en se disant +pourquoi pas+. Là, le billet de loterie, c’est Marine Le Pen », avertit Richard Kleinschmager.

Le Quotidien / AFP