Ils affirment ne pas avoir d’attirance particulière, pourtant ils ont détenu et consulté du matériel pédopornographique. Diffusé aussi. Indifféremment des conséquences.
Bertrand voulait «faire le buzz». Il aurait pu courir nu sur un stade de football, filmer son chat ou encore traverser l’Europe sur le tricycle de son neveu, mais non. Il a préféré diffuser des images à caractère pédopornographique sur le réseau social Tumblr. 38. Pas des masses, mais suffisamment pour avoir un effet dévastateur sur la famille du quadragénaire. Il lui est également reproché d’avoir consulté et détenu plus de 200 photographies et vidéos de la même nature.
«J’avais déjà créé plusieurs blogs Tumblr et j’ai voulu tenter le coup pour faire le buzz et récolter des clics», a expliqué Bertrand lundi après-midi face à la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. L’idée se passe de commentaires et n’aura pas fait long feu puisque la plateforme a dénoncé le prévenu aux autorités judiciaires.
Faire le buzz ne serait cependant pas la seule motivation de Bertrand. Un expert judiciaire a décelé chez lui une tendance pédophile de laquelle il se défend à ses dépens. «Je n’ai aucune attirance pour les enfants et les adolescents», affirme-t-il. «Je suis tombé sur ces images en recherchant des images de femmes adultes. Je les ai regardées par curiosité.»
La juge a du mal à le croire. «On voit des actes de pénétration sur des enfants âgés de 4 à 15 ans. Ne me dites pas que vous les avez uniquement regardées par curiosité. Vous deviez avoir une attirance», a-t-elle constaté.
«J’étais un gros consommateur de matériel pornographique adulte», poursuit Bertrand. «Sur internet, on se sent intouchable. On clique sur des liens, tout est facilement disponible en toute impunité.» L’impunité a finalement eu une date limite pour lui. Le procureur a requis une peine de 18 mois de prison ferme à son encontre ainsi qu’une amende appropriée.
«Pervers, odieux et violent»
Le magistrat s’est fermement opposé à un sursis quel qu’il soit face à la nature abjecte des faits. Non seulement Bertrand a mis les contenus à la disposition d’autres personnes, encourageant ainsi leur production et les abus sur des enfants, mais il l’a fait dans l’intention d’obtenir des likes et l’approbation de ses abonnés.
«Le juge d’instruction lui-même a décrit le caractère des images comme pervers, odieux et violent. Certaines représentent des enfants abusés sexuellement», a relevé le magistrat avant de reprocher son «manque d’empathie envers les jeunes victimes» et son «absence de prise de conscience» au prévenu. «Vous restez dans le déni de votre attirance pédophile, vous condamner à un sursis probatoire ne servira à rien.»
En larmes à la barre, Bertrand reconnaît avoir commis une terrible erreur. «J’ai des enfants et ce que j’ai fait est odieux, mais la prison ferme, ce n’est pas possible. Je ne suis pas tout seul.» «Vos actes ne peuvent être effacés. À vous de faire le nécessaire à l’avenir pour ne pas retomber dans le même mode de fonctionnement et de contrôler vos pulsions», l’a encouragé la présidente comme elle avait déjà encouragé Thibault avant lui.
«Derrière les photographies et les vidéos, il y a des enfants exploités»
Ce jeune homme de 36 ans avait aussi affirmé ne pas avoir d’attirance pédophile ou hébéphile comme l’avait pourtant également diagnostiqué un expert judiciaire. Pourtant, il conservait plus de 71 000 photographies et vidéos à caractère pédopornographique sur divers disques durs. À la différence de Bertrand, il ne les a pas partagées.
«Avant d’aller plus loin dans mon couple, j’ai voulu m’assurer que je ne ressentais plus aucune attirance physique pour les enfants et les adolescents», a confié le prévenu, lui aussi en pleurs. «Je n’ai plus consulté de contenus de ce type depuis trois ans.» En outre, il suit une thérapie depuis 18 mois et «son pronostic d’avenir serait plutôt positif, selon l’expert».
Sur ces bases encourageantes, le parquet a requis une peine de 16 mois de prison ainsi qu’une amende et ne s’est pas opposé à un sursis probatoire. Mais uniquement à un sursis probatoire. Le magistrat a balayé la demande de suspension du prononcé réclamée par la défense. «J’ai été clément, mais il ne faut pas exagérer. Derrière les photographies et les vidéos, il y a des enfants exploités. Une suspension du prononcé est hors de question pour moi.»
Les prononcés sont fixés au 23 et au 30 janvier prochains.