Le Planning familial est le seul à pouvoir livrer ses chiffres concernant les interruptions volontaires de grossesse. Sinon, il n’existe toujours pas de statistiques officielles disponibles.
En France, en 2020, 222 000 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont été enregistrées, ce qui représente une baisse d’environ 4 % par rapport à 2019.
Qu’elle soit réalisée en milieu hospitalier ou extrahospitalier, 72 % du total des IVG sont médicamenteuses.
En Belgique, le nombre d’IVG recensées s’est maintenu en 2019 au-dessus des 18 000, tout comme l’année précédente, comme le relève le rapport bisannuel de la Commission nationale de contrôle et d’évaluation de la loi d’octobre 2018 sur l’avortement.
Au Luxembourg, seul le Planning familial est capable de livrer des chiffres. «Une vue globale de l’IVG au Luxembourg fait défaut en raison d’un manque de statistiques précises et de nomenclature spécifique en la matière», regrettent les députés Marc Hansen et Josée Lorsché (déi gréng). Ils ont réussi à recueillir quelques chiffres en interrogeant le ministre de la Sécurité sociale, Claude Haagen.
En 2021, 601 femmes ont contacté le Planning familial en raison d’une grossesse non planifiée. Seules 516 IVG ont été réalisées dont 98,3 % au Luxembourg et 1,7 % à l’étranger (1,36 % se trouvait hors délai); 449 IVG ont été pratiquées au Planning familial jusqu’à 7, voire 8 semaines depuis les dernières règles soit 87 %; 16 patientes ont été adressées par le CHL (avec première échographie); 63 patientes ont été adressées par des confrères privés (avec première échographie); 57 femmes ont été transférées au CHL avec qui le Planning familial a une convention et 1 chez un confrère; 9 IVG ont été pratiquées à l’étranger : 2 en Belgique et 7 aux Pays-Bas (dans ce pays, le délai s’élève actuellement à 24 semaines d’aménorrhée; 51 femmes ont été adressées à des consœurs/confrères gynécologues en raison de l’indisponibilité de la consultation pour la première échographie, puis IVG au Planning familial. La moyenne d’âge était de 28,25 ans, comme en 2020; la moyenne d’âge de l’embryon au moment de l’IVG était de 4,3 semaines.
Ces chiffres précis proviennent exclusivement du Planning familial. Comme le relèvent les deux députés écolos, «la réalité de l’avortement par voie médicamenteuse, favorisé dans la plupart des cas, suppose qu’un code spécifique y afférent soit intégré dans la nomenclature de la CNS». Dans le cas d’un curetage, la nomenclature ne fait pas de distinction entre l’acte d’une IVG en tant que telle, et toute autre intervention nécessitant un curetage, y compris une interruption médicale de grossesse, précisent les députés.
Cela fait quatre ans, maintenant, que le ministère de la Santé a saisi la Commission de nomenclature de quatre demandes standardisées relatives à l’IVG, rappelle Claude Haagen. Les discussions ont abouti à un constat : l’IVG peut, déjà, être prise en charge «sous forme de codes existants et qu’il n’y avait pas d’intérêt scientifique de préciser qu’un curetage est fait hors grossesse», répond le ministre. «Il avait alors été décidé de relancer les discussions dans le cadre des futurs travaux sur la révision du chapitre relatif à la gynécologie de la nomenclature», ajoute-t-il.
Ces travaux sont actuellement en cours entre la CNS et la Société luxembourgeoise de gynécologie et d’obstétrique (SLGO) dans le cadre de la refonte de la nomenclature. «Dans ce contexte, les actes d’interruption volontaire de grossesse font l’objet de discussions et de précisions avec différents types d’indicateurs, dont notamment le facteur temps», explique le ministre de la Sécurité sociale. Des actes plus ciblés permettront aussi d’avoir des données statistiques plus précises, promet-il.
Comme la nomenclature n’est actuellement pas suffisamment détaillée en la matière, les données de facturation de la CNS ne permettent pas de définir de manière précise les IVG chirurgicales réalisées à l’hôpital (jusqu’à 12 semaines de grossesse par curetage, des discussions sont en cours pour allonger ce délai à 14 semaines). En effet, la distinction entre une IVG et un curetage réalisé à la suite ad’une fausse couche n’est pas possible.
Depuis 2012…
La documentation hospitalière qui pourrait renseigner sur le nombre d’IVG pratiquées dépend de la qualité de celle-ci, et de la bonne utilisation des règles de codage. De plus, à la suite de la pandémie, la documentation hospitalière a pris un certain retard et la qualité du codage hospitalier n’a pas encore été évaluée. De même, la base de données des séjours hospitaliers est en cours de construction. Impossible pour la direction de la Santé de fournir des données chiffrées concernant les IVG réalisées en milieu hospitalier.
Quant au nombre de cas d’IVG médicamenteuse par prise de mifépristone (jusqu’à 7 semaines de grossesse), il ne pourrait pas non plus être déterminé de manière précise à partir de la base de données de la CNS, puisque ce produit pharmaceutique est indiqué dans plusieurs prises en charge médicales autres que l’IVG.
Le ministère rappelle aussi que le député Alex Bodry avait déposé une motion en novembre 2012 dans laquelle le gouvernement avait notamment été invité à veiller à ce que les médecins et les services d’assistance psychosociale déclarent à des fins de statistiques les IVG et consultations en matière d’IVG. «Ces travaux n’ont pas encore pu être entamés jusqu’à présent, cependant il est prévu d’instaurer à courte échéance un groupe de travail chargé d’établir des statistiques en matière d’IVG», annonce le ministère.
Il faudra encore attendre avant de pouvoir comparer les chiffres luxembourgeois avec ceux des pays voisins. En attendant, les députés peuvent remercier le Planning familial pour ses propres statistiques.