Après seulement trois journées dans ce championnat 2019/2020, le premier départ de coach est déjà acté : il s’agit de Vitor Pereira, qui quitte la lanterne rouge, Rodange. Lui et ses joueurs ne se «comprenaient pas».
La décision est tombée lundi matin : vous quittez le club de Rodange après seulement trois journées de championnat ?
Jeudi, j’ai eu une réunion avec mon staff, vendredi on a pris notre décision et samedi, j’ai envoyé un message à mes dirigeants pour leur dire que nous souhaitions une réunion avec eux après le match contre Mühlenbach (NDLR : défaite 1-3), quel que soit le résultat.
Ah ! c’est vous qui êtes à l’origine de la séparation ?
C’était la solution la plus correcte. On a essayé de donner notre maximum, mais il était devenu évident qu’il fallait une autre solution. J’ai déjà eu des challenges plus difficiles et je n’ai jamais abandonné, mais là…
Là ?
Là le message était brouillé, complètement crispé. Quand tu essayes de passer une idée à un groupe, elle peut d’ailleurs être bonne ou mauvaise cette idée, le minimum est qu’elle arrive aux intéressés et que tout le monde commencer à penser de la même manière. Je me dis qu’il aurait fallu du temps pour que ce groupe nous comprenne, moi et mon staff. Or le temps, en football, ça coûte très cher et Rodange ne peut pas se permettre d’attendre. Dimanche, contre Mühlenbach, j’ai encore assisté à une rencontre qui n’avait rien à voir avec ce que j’exige de mes équipes. On aurait eu besoin de beaucoup de temps et d’une équipe en capacité de comprendre. Mais je n’ai aucun regret, c’est juste le moment pour le club de Rodange d’explorer une autre solution. Nous, on n’arrivait pas à obtenir ce que l’on voulait des joueurs. Je pouvais perdre des matches, mais pas de cette manière.
Qu’on comprenne bien : dans votre esprit, si vous étiez resté, c’était voué à l’échec ?
On était loin, très loin, d’obtenir des résultats avec la manière qu’on souhaitait promouvoir. Et perdre les deux ou trois premiers matches fait qu’on n’a pas de temps à perdre. Le mercato est fermé, on n’a pas le temps de repenser l’effectif.
Vous avez eu des réactions très crues à la suite des deux derniers matches, laissant penser que vos joueurs sont un peu trop « old school », travaillés exclusivement par l’envie de jouer un football émotif et de réaction. C’était un problème d’effectif ? Étiez-vous trop ambitieux ou trop exigeant ?
Il y a toujours deux opinions très différentes quand il faut répondre à ce genre de question. Je n’aime pas chercher un coupable. Peut-être que moi, je n’ai pas su passer mon message. Peut-être que ce sont eux qui ne l’ont pas reçu. En tout cas, quelque chose s’est passé ou ne s’est pas passé justement, c’est certain. Au niveau des caractéristiques du groupe, je savais qu’il y avait des choses à changer pour entamer une saison de DN, mais ce n’était pas si important de ne pas forcément avoir les caractéristiques de joueurs qu’on désirait à partir du moment où l’on tombait sur des garçons qui avaient une mentalité ouverte et acceptaient de travailler différemment…
On comprend donc que la réponse est : les caractéristiques du groupe ne collaient pas à vos préceptes de jeu…
Mais on faisait la même chose à Sandweiler par exemple. Les analyses, l’attention portée sur des détails. On mangeait même ensemble les dimanches midi, avant les matches, pour continuer d’en parler et certains, en Promotion d’honneur, trouvaient que c’était trop pour ce niveau. Alors là, en DN, forcément, on a plus de données sur nous, sur les adversaires et c’est normal puisque j’avais constitué un staff de cinq personnes. Des joueurs m’ont dit que c’était trop d’informations à intégrer…
Rodange peut-il se maintenir en revenant aux « vieilles » recettes, à quelque chose de moins novateur, qui bouscule moins les habitudes ?
Ah le système… Pour moi, le système, c’est juste des plots, des dessins. Les joueurs doivent déjà comprendre qu’en DN, la marge d’erreur est beaucoup plus petite, qu’ils doivent faire attention à la moindre perte de balle et à la façon dont ils doivent être positionnés, au cas où… Le placement, c’est tout bête. Pourtant, c’est exactement ce qu’on était occupés à travailler ces derniers jours. Si on ne contrôle pas ça, on peut mettre n’importe qui à la tête de l’équipe, n’importe quel système… Mais j’ai confiance, ils peuvent s’en sortir.
Vous n’auriez pas voulu ou pu, vous, vous adapter à la réalité du club ?
On fait attention à tout depuis de longues semaines. Au placement. Au travail individuel. Aux secteurs de jeu. Même dans la difficulté, on le faisait avec plaisir. Mais quand on n’a pas de résultats, si en plus on doit le faire avec des idées de jeu qui ne sont pas les nôtres, alors le plaisir disparaît. En face, chez les joueurs, il n’y avait pas de réponse. On va donc prendre d’autres chemins, sans rancœur et en tirer de l’expérience. Moi, cela renforce mon envie de trouver un club qui me permette de travailler avec mes idées.
Entretien avec Julien Mollereau