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Pédopornographie : le prévenu a été piégé par deux adolescentes


Elle faisait courir celui qui prétendait être élève au lycée de Garçons pour qu’il se dévoile. (photo : sophie kieffer)

Le prévenu avait contacté l’une d’elles sur Snapchat. Son amie s’est jouée de lui, de proposition indécente en proposition indécente, jusqu’à avoir de quoi porter plainte.

Le prévenu se définit comme «un garçon normal» qui aime les promenades avec son chien et les soirées entre amis. Un garçon de 38 ans qui s’est fait passer pour un adolescent de 16 ans sur Snapchat auprès de deux adolescentes de 14 ans, Lili et Aude. Les deux filles l’ont piégé.

«Il m’a contacté sur Snapchat. Je l’ai accepté sans me poser de question», a témoigné Aude hier après-midi. Très vite, l’adolescente le trouve «bizarre». Après un appel téléphonique, elle le bloque sur le réseau social. «J’ai compris qu’il n’était pas celui qu’il prétendait être.» Quelques semaines plus tard, elle le croise par hasard lors d’un stage professionnel et se confie à son amie Lili qui prend contact avec lui. «Elle savait ce qu’elle faisait», témoigne la jeune fille de 19 ans.

Elle faisait courir celui qui prétendait être élève au lycée de Garçons pour qu’il se dévoile. Pendant deux semaines, il lui aurait écrit pour obtenir des photographies de l’adolescente nue. Lili n’a pas réagi. Le prévenu lui a envoyé deux photographies de son sexe en érection et des messages explicites, ainsi que demandé un rendez-vous ou proposé de passer la nuit avec elle. Aude a porté plainte contre lui en août 2019.

Les faits remontent au printemps et à l’été 2019. Le trentenaire est également accusé d’avoir consulté du matériel pédopornographique jusqu’en mars 2022. Lors de l’enquête, des images d’adolescents en petite tenue sont trouvées sur son téléphone. Ainsi que de nombreuses prises de contacts sur Snapchat, dont certains étaient mineurs.

«Pourquoi écrire à de toutes jeunes filles alors que vous étiez âgé de 33 ans ? », l’interroge la présidente de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «Je ne me l’explique pas. Toutes les discussions ne portaient pas sur le sexe. Je discutais avec pas mal de gens à l’époque.»

Le prévenu banalise. Pour lui, il n’y avait pas d’intention sexuelle derrière ses approches et il ne se serait jamais senti sexuellement excité. Pourtant, un expert neuropsychiatre a décelé un comportement pédophile – mais pas un trouble – et une hébéphilie, une attirance pour les enfants postpubères. L’expert a émis un pronostic réservé, même si le risque que le prévenu passe à l’acte est très faible. Andy ne semble pas bien réaliser la portée de ses actes.

Les mots lui manquent

«J’étais curieux de connaître leur réaction à ce que je leur envoyais», explique-t-il. Le prévenu se défend mal. Il apparaît paralysé et ne trouve pas les mots. «C’est cela qui vous excite ? Il doit y avoir quelque chose pour que vous écriviez tous ces messages», tente la juge. Elle n’en saura pas plus, ni même son avocat. «Mon client ne m’a pas fourni grand-chose pour le défendre», reconnaît Me Luci avant d’avouer avoir vécu «un grand moment de solitude».

Pour l’avocat, «l’immaturité intellectuelle très profonde» serait une explication à ses actes et à «la pauvreté de son témoignage». «Il est dans l’incapacité intellectuelle de comprendre. Il est comme un enfant qui ferme les yeux et croît qu’il est invisible», assure l’avocat. «Il a la maturité d’un adolescent. Il a peut-être plus de facilité à communiquer avec des personnes de cet âge-là.»

Le prévenu n’aurait pas «le profil des personnes que vous voyez défiler devant vous dans le cadre de ce genre de faits», a tenté d’argumenter l’avocat. Le prévenu n’est, selon lui, ni «un pervers», ni «un prédateur sexuel». Aucune image n’a été trouvée sur son ordinateur et il serait tombé sur les images pédopornographiques en consultant des sites pornographiques. «Il n’a pas sciemment cherché les contenus.»

La représentante du parquet est persuadée du contraire. «Je me pose de grandes questions à son sujet. On ne tombe pas par hasard sur ce type de contenus», a-t-elle affirmé. «Je ne suis pas rassurée par ses explications. Nous sommes tous conscients qu’il a fait une erreur, mais il doit la comprendre. J’ai du mal à comprendre s’il se sent impliqué.» Elle requiert une peine de 24 mois de prison et une amende appropriée. Et elle ne s’oppose pas à un sursis probatoire avec obligation de suivre un traitement psychiatrique.

Le prononcé est fixé au 20 février prochain.