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Pédophilie dans l’enceinte du Vatican : deux prêtres renvoyés en justice


Le séminaire se trouve à l'intérieur même des murs du Vatican, situé à quelques pas de la résidence où vit aujourd'hui le pape François. (illustration AFP)

Le Saint-Siège a annoncé mardi le renvoi en justice de deux prêtres italiens pour des abus sexuels présumés qui se seraient déroulés dans un séminaire se trouvant dans l’enceinte du Vatican.

« Le promoteur de justice du Vatican (équivalent du ministère public) a demandé le renvoi en jugement du père Gabriele Martinelli, sous l’accusation d’abus sexuels qui auraient eu lieu au sein du séminaire Pie X avant 2012, et du père Enrico Radice pour complicité », a indiqué le Saint-Siège dans un communiqué. « L’enquête avait été ouverte en 2017 à la suite d’informations publiées par la presse » pour des faits qui auraient été commis alors que Gabriele Martinelli était séminariste et Enrico Radice recteur du séminaire Pie X, ajoute le Saint-Siège. Le communiqué précise que les renvois des deux prêtres ont été ordonnés les 16 et 17 septembre.

A côté de la résidence du pape

L’agresseur présumé, Gabriele Martinelli, séminariste âgé de 21 ans à l’époque des faits, a été ordonné prêtre en 2017. Le séminaire Pie X se trouve à l’intérieur même des murs du Vatican, situé à quelques pas de la résidence Sainte Marthe, où vit aujourd’hui le pape François. Ce séminaire forme des mineurs qui servent comme enfants de chœur dans la basilique Saint-Pierre et lors des cérémonies papales.

Selon des médias italiens, un jeune séminariste polonais, compagnon de chambre de l’une des victimes, affirme avoir été témoin de dizaines d’agressions sexuelles. Avec deux autres séminaristes, il a dénoncé l’agresseur présumé d’abord en personne à ses supérieurs du séminaire, puis par écrit à des cardinaux. L’affaire avait fait l’objet d’un livre-enquête, Péché originel, signé du journaliste italien Gianluigi Nuzzi et sorti en 2017. L’ouvrage raconte que le jeune témoin a vécu de 13 à 18 ans au séminaire Pie X, jusqu’en 2014, mais dit avoir été renvoyé avant la fin de sa scolarité après avoir tiré la sonnette d’alarme auprès d’autorités ecclésiales et vaticanes. Selon lui, un ancien élève autorisé à rester dans le palais venait très souvent le soir – jusqu’à 140 fois – pour avoir des relations sexuelles avec son camarade de chambre, alors âgé de 17 à 18 ans, qui « se sentait obligé de céder à ses exigences ».

Homophobes le jour

Fort de la confiance de l’évêque recteur des lieux, le jeune homme exerçait « une forme de pouvoir et d’intimidation » sur les plus jeunes, en leur imposant « brimades ou actes sexuels », affirme encore le témoin dans le livre de Nuzzi. « Je ne reproche pas à ces prêtres d’être homosexuels », déclare ce Polonais qui se dit lui-même gay. « Tout cela est une vaste hypocrisie : dans la journée, ces gens sont homophobes, la nuit ils se déchaînent dans des discothèques gays », poursuit-il.

Dans une conversation par messagerie publiée en annexe du livre, la victime remercie ce témoin « d’avoir parlé » à sa place, en disant qu’il n’a pas la force de le faire lui-même. L’ouvrage publie aussi le long courrier que l’étudiant polonais a envoyé au pape François pour exposer la situation.

Après un année 2018 marquée par la révélation d’une série de scandales d’abus sexuels du clergé, notamment aux États-Unis et au Chili, le pape a pris plusieurs mesures pour lutter contre la pédophilie. En mai dernier, le souverain pontife argentin a émis une lettre apostolique (motu proprio) où il oblige notamment le personnel ecclésiastique à signaler tout abus, agression et harcèlement sexuels ou couverture de tels faits.

LQ/AFP