Venu du monde anglo-saxon, le payroll giving permet de donner les centimes de son salaire pour financer des projets humanitaires.
Tout le monde en a déjà fait l’expérience. Dans un magasin, au moment de payer par carte bancaire, le terminal demande au client s’il veut arrondir à l’euro supérieur pour financer une ONG ou association. Depuis quelques années, la même chose existe au sein des entreprises avec le payroll giving. Contrairement au passage en caisse, il est ici possible d’arrondir son salaire à l’euro inférieur pour se délester de quelques centimes en faveur d’un projet humanitaire.
«C’est une action RSE (Responsabilité sociale des entreprises) très concrète», explique Morgane Haessler, présidente de ProRSE, qui a profité de l’une des réunions mensuelles de son association pour présenter le payroll giving à ses adhérents.
Venue des pays anglo-saxons, l’initiative existe depuis quelques années au Grand-Duché grâce au consortium Payroll Giving Luxembourg qui réunit plusieurs ONG. «En 2015, nous avons souhaité l’importer pour l’adapter à la législation du Luxembourg et à ses mœurs», rappelle Pascal Hus, administrateur de Padem, l’une des ONG fondatrices du consortium.
Celui-ci est créé en 2019 après que Padem a été rejointe par Aide à l’enfance de l’Inde et du Népal, Frères des hommes, la Fondation Follereau, Îles de paix, Partage.lu, Unity Foundation et SOS Faim. «Chaque structure contribue aux Objectifs de développement durable de l’ONU pour 2030.» Chacune porte différents projets à travers le monde (voir encadré) que les entreprises peuvent financer grâce au payroll giving. Il est également possible de verser ses dons dans un pot commun qui sera redistribué entre les ONG.
Un dispositif simple et transparent
Pour y adhérer, la société n’a qu’à remplir un simple formulaire avec le nom de la cause qu’elle veut soutenir. Chaque salarié est ensuite libre de participer ou non et de donner le montant qu’il souhaite. Il peut ainsi offrir ses centimes ou bien faire un don plus conséquent.
«Une ligne s’ajoute sur la fiche de paie, tout est transparent et il est possible d’annuler quand on veut», ajoute Pascal Hus. Environ 650 entreprises ont déjà été séduites par le payroll giving. Parmi elles, Foyer Assurances qui le propose à ses collaborateurs depuis 2021. «Nous recherchions un projet RSE sur le long terme», détaille Amira Hellal, coordinatrice du groupe de travail RSE au sein de la société.
Aujourd’hui, 80 salariés, soit 10 % de l’entreprise, donnent à Aide à l’enfance de l’Inde et du Népal. «Je me suis d’abord dit que c’était peu mais en regardant les chiffres, cela fait plus de 40 000 euros par an. Avec, on peut financer la reconstruction d’une école et aider une coopérative de femmes.»
C’est là toute la philosophie du payroll giving : même des petits dons peuvent financer de grands projets. D’autant plus que la somme peut rapidement augmenter. «L’entreprise peut faire un match giving et ajouter 1 euro pour chaque euro donné», précise Pascal Hus. Agréées par le ministère des Affaires étrangères et européennes, les ONG reçoivent également une participation de celui-ci pour chaque don effectué. Toutes ces sommes sont aussi déductibles des impôts à condition que leur montant annuel atteigne au moins 120 euros.
L’initiative séduit même les petites entreprises. «Quand j’ai entendu parler du payroll giving, j’ai repensé à un vieux slogan du Loto en France : C’est facile, pas cher et ça peut rapporter gros», raconte Sylvain Chéry, directeur associé chez Agile Partner. Avec une cinquantaine de salariés, l’entreprise n’a pas la force de frappe de Foyer mais peut tout de même apporter sa contribution. «En quelques mois, nous avons récolté plus de 4 600 euros pour Padem.» Une somme qui, ajoutée aux autres, apportera une aide non négligeable aux projets de l’ONG.
Des projets financés dans le monde entier
Depuis ses débuts, le consortium a permis de financer de nombreux projets dans les pays les moins avancés (PMA) à travers le monde. «Trente bienfaiteurs donnant 8 euros par mois en moyenne permettent de récolter près de 30 000 euros en un an (en ajoutant le cofinancement du ministère des Affaires étrangères et européennes).
Cela permet de construire et financer une école au Sri Lanka pendant trois ans», illustre Pascal Hus. Le payroll giving a également permis à Padem de lutter contre l’excision au Sénégal. «Avec 60 bienfaiteurs à 4 euros, nous récoltons 12 000 euros par an. Un donateur peut ainsi « sauver » 34 filles.»