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Paris-Luxembourg pour de l’or et des bijoux : «C’est carrément imaginé !»


Depuis leur extradition en 2018, les deux trentenaires se trouvent en détention préventive à Schrassig. (Photo : archives lq/Isabella Finzi)

Montres, bagues, bracelets… avaient été volés lors de plusieurs home-jackings et cambriolages en 2017 au Luxembourg. Les enquêteurs ont fini par arrêter un duo dans la capitale française. Mais ce dernier conteste tout.

«On veut l’argent et l’or.» La jeune maman n’est pas près d’oublier ce samedi soir du 28 janvier 2017. Vers 23 h, elle venait tout juste d’aller au lit quand deux individus masqués ont fait irruption dans sa chambre à coucher. Elle se souvient avoir tiré la couette par-dessus ses deux enfants pour les protéger. Aux deux malfrats, elle avait offert son iPhone et son collier. Mais visiblement, ce n’est pas ce qui intéressait le duo armé d’une bombe aérosol.

Le plus petit des deux, qui avait fouillé la maison, était revenu avec un couteau en main pour la menacer. «Prends l’enfant», avait encore lancé l’un à l’autre. Avec quelques bijoux, dont une pierre de jade de Chine, et 70 euros les deux hommes avaient finalement quitté la maison à Hesperange.

C’est le premier fait de cette longue série de vols pour laquelle Bilal H. (35 ans) comparaît aujourd’hui devant la justice luxembourgeoise. Cela a toutefois pris plusieurs mois pour que le trentenaire de la région parisienne atterrisse dans le viseur des enquêteurs. C’est plus particulièrement le home-jacking du 25 novembre 2017 qui a fait avancer l’enquête. Ce samedi après-midi, un couple d’octogénaires venait de pénétrer dans le bas de son immeuble à Luxembourg-Belair quand deux malfrats ont dévalé les escaliers pour l’asperger de gaz lacrymogène. La valeur des bijoux dérobés : 890 000 euros.

Identifiés grâce aux caméras du City Concorde

En 2015, les époux avaient été victimes d’une agression similaire. À l’époque, les agresseurs les avaient repérés lors de leur sortie au City Concorde à Bertrange. C’est ce qu’avaient révélé les caméras de surveillance du centre commercial. Les enquêteurs étaient donc déjà rodés à l’exercice. Et en vérifiant cette piste, ils ont pu voir une Audi avec des plaques d’immatriculation françaises s’engouffrer derrière le couple dans le parking. Dans la galerie marchande, ils ont ensuite repéré deux hommes en train de rôder durant l’heure de midi autour des époux.

Ce sont ces images qui ont permis aux enquêteurs d’identifier Bilal H. en compagnie de Yassine E. (36 ans). Il s’avère que le premier avait été verbalisé quelques mois plus tôt au volant d’une Mini Cooper. Le second a pu être identifié grâce aux collègues français. Tous deux ont été arrêtés mi-mars 2018 à Paris et dorment aujourd’hui à Schrassig. Ils ont fait comprendre à l’ouverture de leur procès mardi qu’ils ne sont pas d’accord avec le sort qui leur est réservé. «C’est totalement faux. C’est carrément imaginé!», ont-ils lancé à la barre de la 13e chambre criminelle. Le parquet leur reproche également d’avoir commis cinq autres méfaits, dont trois cambriolages, entre le 20 octobre et le 17 décembre 2017.

Les enquêteurs ont en effet fait parler leurs portables. Et ils ont pu retracer de nombreux déplacements du duo de Paris jusqu’à Thionville. C’est là que les appareils bornent pour la dernière fois avant de plonger dans une période d’inactivité. «Pendant les heures des faits au Luxembourg, les portables sont inactifs. Puis les portables sont rallumés et ils reprennent la route vers Paris», ont expliqué les enquêteurs de la police judiciaire mercredi après-midi.

L’autre élément qui leur a mis la puce à l’oreille, c’est la fameuse Audi aperçue sur les caméras de surveillance du City Concorde. Le véhicule est enregistré sous un nom fictif, mais il a pu être relié à Bilal H. car un jour sa femme était venue le récupérer à la fourrière.

«Il m’a dit qu’il allait me déchiqueter»

Pour le troisième home-jacking, qui a eu lieu le 17 décembre 2017 à Strassen, c’est également une Audi qui a été aperçue dans les parages. Autre parallèle avec le premier fait à Hesperange : les malfrats étaient cagoulés et ont demandé à la victime de compter jusqu’à 100 avant d’appeler la police. Et ils ont menacé leur victime pour qu’elle sorte ses bijoux : «Il m’a dit qu’il allait me déchiqueter si je ne disais pas où est le coffre», avait-elle témoigné à la police. Les agresseurs avaient pris la fuite avec quelques milliers d’euros de bijoux.

Bilal H. et Yassine E. habitent la région parisienne. Mais d’après ce qui ressort de l’enquête, au cours de l’année 2017, ils se sont fait remarquer plus d’une fois sur les routes luxembourgeoises. La Mini Cooper a été flashée à trois fois reprises durant l’été.

Le duo a aussi voyagé ensemble en Suisse en février 2018. Il a été contrôlé le coffre plein de cagoules, bonnets, bombes aérosols… Les deux hommes avaient aussi pris le soin d’apposer sur leur plaque d’immatriculation le département voisin 25 du Doubs. En revanche, lors de leurs passages au Luxembourg, c’était un département lorrain.

Le dernier voyage du duo : Schrassig

La dernière fois que le duo a passé une frontière ensemble, c’est quand il a été extradé au Grand-Duché quelques semaines après avoir été interpellé à Paris. Dans la boîte aux lettres de Yassine E., les enquêteurs ont retrouvé un faux permis et une carte bancaire. Étaient-ce les documents qu’il avait préparés pour prendre rapidement la fuite? Comme Bilal H., il a fait l’objet de plusieurs condamnations pour vols à main à armée et avec violences. Début 2017, il était d’ailleurs en prison. Il a donc un alibi pour le home-jacking à Hesperange. À la différence de Bilal H. Lui aussi était incarcéré à l’époque. Mais les faits ont eu lieu un samedi soir et il bénéficiait d’une permission de sortie le week-end…

Le procès se poursuit ce jeudi après-midi avec l’audition de l’experte en génétique.

Fabienne Armborst