Fuir, mais pour aller où? En cas de violences conjugales, la compagnie d’assurance inclut désormais dans tous ses contrats une solution de relogement d’urgence. Une première.
Lancée en France au printemps dernier, puis au Royaume-Uni, la garantie relogement en cas de violences conjugales d’AXA s’étend depuis hier à tous les contrats d’assurance habitation luxembourgeois du groupe, qui couvre environ 12% du marché au Grand-Duché.
Une initiative inédite en Europe qui pousse à se demander pourquoi cette piste n’a pas été exploitée plus tôt : en effet, qui mieux que les assureurs, rompus à l’exercice du relogement d’urgence, avec leurs réseaux, partenaires et moyens, pour trouver une solution dans ces contextes de détresse?
C’est le constat qu’a aussi dressé Octavie Dexant, à la tête d’AXA Assurances Luxembourg, l’année dernière, au moment de dupliquer l’initiative au niveau local.
«Dans les violences conjugales, on parle de risque, de danger immédiat au domicile, et de surexposition des femmes. Donc c’est forcément un sujet pour nous», s’engage-t-elle, rappelant les chiffres en hausse – 2 058 victimes ont été recensées lors des interventions de police en 2024.
Les victimes ne savent pas où aller
Avec une question au cœur de la problématique : celle du relogement. «C’est ce que les associations avec qui nous collaborons nous rapportent. Le logement est le principal frein pour partir en cas de violences, car les victimes ne savent pas où aller. Sans compter les tensions sur l’hébergement d’urgence.»
Des obstacles que la compagnie n’élude pas. Elle se voit avant tout comme un maillon du système existant, capable d’agir vite pour sécuriser les personnes, avant de les orienter vers les services d’accompagnement compétents.
Une assistance 100% confidentielle
«Chaque jour, on reloge des familles entières parce que leur logement est devenu inhabitable. Or, en cas de violences, il est tout aussi inhabitable», pointe la CEO.

Des précautions sont prises pour garantir la sécurité des victimes relogées. (Photo : Fabrizio Pizzolante)
Pour cela, la compagnie dispose de son propre centre d’assistance, avec des équipes formées et à l’écoute 24h/24 et 7 jours/7, agissant en toute confidentialité pour mieux protéger les victimes.
«Tout est géré depuis la Belgique, en dehors de nos propres systèmes. La garantie de ne laisser aucune trace dans nos agences locales.»
Une protection ajoutée automatiquement
Concrètement, depuis hier, tous les assurés ayant un contrat d’habitation chez AXA sont automatiquement couverts par cette nouvelle garantie, y compris les anciens contrats, sans aucune démarche nécessaire.
«Ça couvre le preneur d’assurance et son conjoint ou partenaire vivant sous le même toit, que la victime soit un homme ou une femme», précise-t-elle.
Vous subissez des violences?
- Connectez-vous sur violence.lu ou appelez le 2060 1060 (tous les jours 12h-20h)
- Appelez la police au 113
- Clients AXA, connectez-vous sur axa.lu ou appelez le 24 618 610 (24h/24 et 7 jours/7)
«On peut organiser un transport vers un tiers de confiance, avec les enfants bien sûr, et même le chien ou le chat. Ou organiser un hébergement à l’hôtel, jusqu’à sept nuits consécutives et sans besoin de pièce d’identité, le temps de respirer», détaille Octavie Dexant.
Un dispositif qui peut être enclenché jusqu’à deux fois par an, à la seule condition de prendre contact avec une association conventionnée avec l’État dans les trois jours. Aucune obligation de déposer plainte, comme le prévoyait le projet au départ.
«Ça aurait pu les décourager»
«Nous avons pris en compte les remarques de l’association La Voix des Survivant-e-s qui nous a mis en garde : certaines femmes ne sont pas prêtes à porter plainte, et ça aurait pu les décourager. On a retiré ce critère.»
Quant aux personnes qui appelleraient la helpline sans être clientes chez AXA, il est prévu de les diriger vers le nouveau Centre national pour victimes de violences (CNVV) qui a ouvert ses portes en avril dernier et dont les horaires d’accueil doivent être étendus dès janvier 2026.
Une aide bienvenue côté associations
«C’est bien que toute la société s’engage. Voir une entreprise privée se saisir de cette question, avec des moyens conséquents, c’est positif. Pour autant, ça ne doit pas déresponsabiliser l’État ou les acteurs conventionnés», pointe Marie-Laure Rolland, vice-présidente de La Voix des Survivant-e-s.
«Autre point fort, ça permet à la victime de se prendre en charge via son assurance privée, quand s’adresser aux services sociaux n’est pas si facile. Ce qu’on espère, c’est que ça puisse inspirer d’autres assureurs.»
Même accueil du côté de la Fondation Maison de la Porte Ouverte : «Ce sera un bon soutien pour nous qui n’avons qu’une chambre d’urgence dans notre foyer. On se démène pour trouver un accueil en auberge de jeunesse, à l’hôtel ou auprès des offices sociaux en cas de besoin», explique Sandra Wies, coordinatrice du centre infoFemmes.
«Avec ce système, on pourra prendre ensuite le relais auprès de la victime pour un accompagnement à plus long terme.»