Président de Sportspress.lu pendant 27 ans, le décès de Petz Lahure, survenu en milieu de semaine à l’âge de 79 ans, aura marqué son époque.
Il s’est échappé en plein Tour de France comme il aurait pu se faire la belle en pleine olympiade ou à l’occasion d’un match de la sélection nationale, les trois évènements, parmi tant d’autres, qui le faisaient particulièrement vibrer.
Petz Lahure s’en est allé en milieu de semaine à l’âge de 79 ans, atteint d’une affection pulmonaire.
Depuis son retrait de la présidence de sportspress.lu, en février dernier, touché par la maladie de Charcot (Sclérose latérale amyotrophique), il ne faisait plus mystère de la souffrance qu’il endurait et contre laquelle il avait engagé frontalement le combat. «Ce n’est pas une maladie pour les lâches », nous avait-il parfaitement résumé.
Toute sa vie, pendant toute sa carrière, interminable carrière puisque s’il était rentré au Tageblatt en 1965, il jouait les prolongations jusqu’à il y a peu encore, Petz Lahure a gardé le sens de la formule choc.
On le voit encore arpenter de long en large les salles de presse du Tour de France, souvent parfaitement cravaté et muni d’un sourire charmeur scotché sur les lèvres. La question qui n’attendait pas de réponse fusait immanquablement : «cher ami, quelle nouvelle?».
Lors d’un portrait paru le 3 décembre 2015, pour présenter ce qui était alors son 19e gala de la presse sportive en tant que président, nous nous étions permis un «Bienvenue en salle de Petz», qui résumait partiellement la vie d’un homme de médias en perpétuel mouvement.
Petz Lahure, journaliste, affichait fièrement un palmarès impressionnant, on ne peut plus clinquant. Pas moins de quarante-six accréditations pour Tour de France, quinze olympiades, huit Coupes du monde de football, près de 500 matches de la sélection nationale, figuraient tout en haut de son étagère personnelle. Il avait suivi tant de choses, vu et commenté tant d’évènements. Il avait appris à décortiquer les enjeux sportifs comme la subtilité des politiques sportives, également la face cachée du sport, ses coulisses et toutes ses intrigues. Son savoir-faire en la matière était conséquent et Petz lahure est resté longtemps influent.
En février dernier, il avait passé le relais à la tête de sportspress.lu à notre consœur Christelle Diederich. Quelque temps auparavant, nous étions revenus sur ses meilleurs moments foot. «J’étais correspondant pour le Tageblatt en 1963 pour les 8es de finale de l’Euro contre le Danemark, rappelait-il, mais mes premiers pas en tant que journaliste, je les ai faits contre la Yougoslavie en 1965. Je m’en rappelle comme si c’était hier parce que Josip Skoblar et Louis Pilot n’ont pas arrêté de se chercher et de se battre». Mais sa plus grande émotion footballistique viendra bien plus tard en 1995 à Malte avec un succès mettant fin à une longue disette…
Lorsqu’on lui demandait de rappeler un but qui l’avait vibré, il désignait celui de Guy Hellers contre la Tchécoslovaquie, en 1995. «Un bijou dans la construction avec une superbe passe en profondeur de Robby Langers de l’extérieur du pied. C’était fantastique!»
L’homme, connu comme le loup blanc dans le monde du sport luxembourgeois et bien au-delà, était pourtant plus complexe que ces phases de matches préférées.
Il avait la faconde de ceux qui se sont fait tout seul. Dans son bureau placé au rez-de-chaussée de la maison des sports, plusieurs clichés sautaient aux yeux des visiteurs. Mais celui dont il était le plus fier, le montrait extatique aux côtés de son ami Paul Philipp, le fameux soir de Gomel en 2007.
On se souvient forcément d’avoir vu Petz Lahure, né Antoine Lahure, pleurer à chaudes larmes sous des trombes d’eau, en haut du mur de Huy à l’arrivée triomphale de Kim Kirchen dans la Flèche Wallonne 2008. Pas besoin d’être un fin observateur pour discerner son immense passion pour les sportifs luxembourgeois.
Sportif, il l’avait été enfant, comme joueur de foot, au progrès et à Oberkorn. C’est d’ailleurs à Oberkorn qu’il avait grandi dans la boucherie-café de ses parents. «J’ai passé mes dix premières années au bistrot scotché au poste de radio lors des grands évènements», se souvenait-il.
Nous ne sommes que des témoins des choses de la vie et il ne faut pas se prendre pour ce que nous ne sommes pas
C’est là qu’il commence à lire ses premiers articles et il n’a que quatorze ans lorsqu’il rédige ses premiers écrits.
Il sera donc engagé à la rédaction du Tageblatt le 15 mars 1965. «On touchait à tout à l’époque. La correction, les conseils communaux, les chiens écrasés, la politique. Le sport n’était pas développé comme maintenant. Mais tous les métiers du journalisme m’intéressaient », nous rappelait-il. Jusqu’à l’excès. «On bouclait nos éditions à six heures du matin. On dormait un peu et on repartait au boulot», rigolait-il, intarissable sur le sujet comme tout ce qui avait trait à la presse, d’hier et d’aujourd’hui. En privé, il dissertait souvent sur la mutation dont il avait été le témoin privilégié.
Nostalgique, il raffolait manifestement d’une époque où tout n’était que plaisir, camaraderie. Les soirées arrachées au temps comme ces bouclages à n’en plus dormir debout, ils les revivaient parfois avec entrain dans ses récits. Au moment où il passe du Tageblatt à Revue, il adopte un autre style de vie.
Pensionné depuis 2002, Petz lahure n’a jamais pris le temps de décrocher, puisqu’il continua longtemps, jusqu’à il y a peu encore, à rédiger de longs articles pour le Tageblatt et le site de Sportpress.lu.
L’ami Petz avait acquis une longue et riche expérience des choses et des hommes. «J’ai toujours l’impression d’être plus jeune que je ne le suis. J’ai toujours aimé rendre service. L’association me prend un temps fou, mais tant que je serai en bonne santé, je ne me vois pas arrêter», nous disait-il avait de rendre son tablier.
Seule la maladie eut donc raison de lui.
Lui qui, en août 2024, avait été décoré lors du 100e congrès de l’Association Internationale de la Presse Sportive (AIPS), pour ses quinze olympiades, ne boudait manifestement pas les honneurs et les rencontres chaleureuses qui découlaient des cérémonies. Il gardait toutefois en tête une fulgurance dont il avait fait une maxime : «Nous ne sommes que des témoins des choses de la vie et il ne faut pas se prendre pour ce que nous ne sommes pas.» Sa vie fut pourtant un véritable roman.
Cher ami, quelle nouvelle ? Petz est allé au bout de son échappée…
À ses deux enfants et à Marie-Paule, sa compagne, le Quotidien présente ses condoléances attristées.