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Octogénaire séquestrée et battue à Capellen : 14 ans requis contre le cambrioleur


Le cambrioleur ne s'était pas contenté de voler les bijoux de l'octogénaire, mais l'avait ligotée, frappée et menacée de mort. (illustration Fabrizio Pizzolante)

L’auteur d’un violent cambriolage commis en 2015 chez une octogénaire de Capellen avait été identifié grâce à son ADN et son portable connecté sur les lieux. Alors qu’il menaçait sa victime, il avait aussi composé à son insu le 112…

Le personnel du service aides et soins à domicile ne s’attendait pas à retrouver l’octogénaire dans un tel état en la quittant le 10 avril 2015 au soir. «Quand je l’ai mise au lit un peu après 20h, tout était normal», témoigne un premier aide-soignant. Sa collègue qui était chargée le lendemain de la lever et du petit-déjeuner a eu un véritable choc quand elle s’apprêtait à rentrer dans la maison route d’Arlon. «Quand je suis arrivée à 6h45, j’ai découvert la fenêtre de la porte qui était cassée. J’ai aussitôt appelé la police », relate-t-elle.

Pendant plusieurs heures, l’octogénaire maculée de sang et couverte d’hématomes était restée à son domicile sans pouvoir appeler à l’aide. Le cambrioleur avait en effet pris le soin d’arracher le câble du téléphone. À l’arrivée des secours, la mémoire de l’habitante de Capellen est toutefois intacte. « Ses déclarations étaient vraiment claires », note l’un des premiers policiers qui étaient présents sur les lieux du crime.

Plusieurs fois, l’individu a sonné avant de s’attaquer à la fenêtre de la porte d’entrée pour enfin s’introduire par une fenêtre latérale de l’habitation. « C’étaient de très anciennes fenêtres, il n’y avait aucune difficulté pour s’introduire », indique le policier. Une fois à l’intérieur, il ne se contente pas de voler des objets, mais se rend d’abord dans la chambre de l’octogénaire. Il la sort du lit, lui ligote les mains, lui scotche la bouche, la prend par le bras et la traîne d’une pièce à l’autre. Tout en la menaçant dans un mauvais allemand « Dis-moi où est l’argent, sinon tu vas mourir !», il fouille armoires et tiroirs. Le sang retrouvé par les agents de la police technique sur certains rideaux et un abat-jour témoigne de la brutalité de l’acte. Avant de s’enfuir avec plusieurs bijoux fantaisie et une bague sertie d’une pierre turquoise, il remet l’octogénaire dans son lit en lui libérant toutefois les mains.

Le 7 octobre 2015, l’auteur est finalement arrêté. Toute une série d’indices ont mené les enquêteurs vers le prévenu Elver R. (43 ans) qui comparaissait vendredi matin devant la 13e chambre criminelle. À côté de ses traces ADN relevées sur le câble du téléphone et du scotch retrouvé dans le salon et la chambre, c’est le numéro de portable du quadragénaire qui a guidé les enquêteurs de la police judiciaire. Dans la maison, ils avaient saisi un petit livret dans lequel étaient inscrits tous les contacts des personnes qui avaient déjà effectué des travaux pour l’octogénaire. « Tous les numéros de portable connectés entre 20h et 7h45 au pylône à proximité du lieux du crime ont été analysés , rapporte l’enquêtrice. Parmi eux se trouvait aussi le numéro d’Elver R. D’après le livret, en août 2013, il avait fait des travaux de jardinage dans la propriété. »

«Je ne me souviens de rien à cause de l’alcool»

Il s’avère que ce même numéro a composé deux fois le 112. « Il semble que le portable dans sa poche s’est actionné tout seul lors du vol , commente l’enquêtrice. C’est un fait exceptionnel. Je n’ai jamais vu ça. » Sur les sept secondes d’appel enregistrées par le 112, on entend un homme demander : « Où est l’argent ? » et une femme qui gémit.

Ce numéro a finalement pu être attribué à Elver R. qui lors de son arrestation était toujours en possession de l’appareil. Mais il contestait l’ensemble des faits. À la barre vendredi, il a toutefois changé de position : « Tout est vrai. Mais je ne me souviens de rien à cause de l’alcool.» Voilà sa nouvelle version. «Je regrette de tout cœur… » « Ce n’est pas en vous excusant une demi-douzaine de fois que ça va passer », réplique la présidente. Si vous vous souveniez de la nuit, vous devriez expliquer pourquoi vous avez sorti l’octogénaire de son lit et l’avez ligotée à un tel point. Et cela, vous ne le voulez pas ! »

Depuis le drame, la victime âgée aujourd’hui de 84 ans n’est plus retournée habiter chez elle, mais vit dans une maison de soins. « Elle se remet doucement du traumatisme », note Me Sonja Vinandy, son avocate tutrice qui réclame autour de 16 000 euros de dommages et intérêts pour sa mandante. Le prévenu accepte la demande de la partie civile. Dans sa plaidoirie, son avocat Me Gennaro Pietropaolo a soulevé l’aveu d’Elver R. et est revenu sur son problème d’alcool qu’il avait déjà évoqué devant l’experte psychiatre.

Du côté du parquet, c’est un autre son de cloche : « Pour moi, ce n’est pas un aveu. Aujourd’hui, il ne conteste plus l’incontestable.» « C’est pratique de ne plus se souvenir. Mais il sait encore qu’il a déjà fini sept ou huit fois dans un coma éthylique », poursuit le substitut. Le parquet requiert entre 13 et 14 ans de réclusion criminelle contre le prévenu qui se trouve depuis son arrestation en détention préventive : « C’est un type dangereux avec une énergie criminelle.»

Prononcé le 24 mai.

Fabienne Armborst