Lundi, quelques jours après le 32e anniversaire de Tchernobyl, l’eurodéputé déi gréng Claude Turmes et le député et président de la commission de l’Environnement de la Chambre des députés, Henri Kox, ont rappelé leur souhait de voir la France s’engager plus activement en faveur des énergies renouvelables.
«L’Allemagne, la Suisse, l’Italie, la Suède et bientôt la Belgique… Les pays de l’Europe de l’Ouest sortent du nucléaire, du fait du risque qu’il représente mais aussi pour des raisons économiques : cela revient moins cher d’investir dans le solaire et l’éolien. Mais la France reste dans une situation à part. Nous ne comprenons pas cette obstination», a vitupéré Claude Turmes.
L’intention de «peser sur le débat»
Les députés ont fait part de leur intention de peser dans le débat, alors que la France doit réviser la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui détermine pour les cinq prochaines années les orientations et financements du pays en matière d’énergie, et alors que l’Europe s’apprête de son côté à réviser le traité Euratom.
«Nous voulons que Cattenom ferme!», a répété sans détour Claude Turmes. «S’il y a un accident à Cattenom, on ne parle plus de Luxembourg», a pour sa part déclaré Henri Kox.
Quid de l’emploi? Sortir du nucléaire n’aura pas d’incidence à ce niveau, au contraire, a assuré le député européen : «Lorsque l’Allemagne produisait un tiers de son électricité grâce au nucléaire, cela représentait 40 000 emplois. Aujourd’hui, un tiers est produit à base d’énergies renouvelables et donne du travail à 300 000 personnes!»
«Concernant Euratom, nous avons présenté un catalogue de mesures très claires à Jean-Claude Juncker. Ce traité doit être réformé, les niveaux de sécurité doivent être beaucoup plus contraignants et il faut arrêter le subventionnement direct et indirect du nucléaire! Ce pourrait être un cadeau d’adieu de la part de Jean-Claude Juncker.»
Manque de transparence
Les subventions accordées au secteur nucléaire occulteraient d’ailleurs le véritable coût de ce mode de production d’électricité, selon Claude Turmes et Henri Kox. «Nous demandons à avoir une discussion sur les coûts effectifs, qui sont clairement camouflés. Quant au débat autour de la PPE, il souffre d’une manipulation massive de la part du gouvernement Macron», ont-ils dénoncé, rappelant au passage que le Premier ministre français, Édouard Philippe, a été directeur des Affaires publiques chez Areva.
«Le Réseau de transport d’électricité (RTE) a établi cinq scénarios solides pour la réussite de la transition énergétique en France. Tous ont été écartés, sauf les deux prévoyant que la France reste sous contrôle nucléaire, avec triplement des exportations», a déploré Claude Turmes.
Un scénario inenvisageable pour les députés de déi gréng, qui comptent créer de nouvelles alliances afin de faire pression sur la France, à l’instar de celle établie avec l’Autriche, pour contrer le controversé projet de centrale nucléaire de type EPR à Hinkley Point, en Grande-Bretagne. «Nous avons porté plainte contre les subventions étatiques pour concurrence déloyale», a expliqué Henri Kox, assurant par ailleurs que «Berlin s’implique également plus aux côtés du Luxembourg pour une sortie du nucléaire de la France, les discussions ne se limitant plus avec les seuls Länder voisins».
Actions citoyennes, plaintes de la part des communes avoisinant les centrales (à l’instar de ce qui se passe à Tihange, en Belgique), communication… Les députés ont promis une année «importante».
Un des moyens de pression dont compte user le Luxembourg reste bien sûr d’ordre économique. «Les conventions internationales, que le Grand-Duché a refusé de ratifier, prévoient une indemnisation plafonnée à 700 millions d’euros. Or Fukushima va coûter 100 milliards! Le projet de loi luxembourgeois va, lui, obliger les exploitants à dédommager les victimes sans qu’il n’y ait à prouver de faute et sans limite de plafond, ce qui constituera déjà un moyen de pression sur EDF», s’est réjoui Henri Kox.
Tatiana Salvan.