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«Nous voulions juste marcher»: des activistes luxembourgeois pour Gaza évincés d’Égypte


(De g.à dr.) Georgette, Maya, Samuel, Lalla et Mira, tout sourire à leur retour du Caire.

De retour d’Égypte, cinq activistes luxembourgeois racontent leur tentative avortée de participer à la «Marche pour Gaza».

Les mines sont fatiguées, les regards un peu tristes, mais les voix, elles, restent fermes. Mardi soir, cinq activistes luxembourgeois ayant participé à la «Marche pour Gaza» en Égypte sont venus relater leur expérience face à la presse, quelques heures à peine après leur retour au Grand-Duché.

C’est plein «d’espoir» et de bonne volonté qu’ils ont pris la route, la semaine passée, pour se rendre au Caire et s’associer, comme des milliers d’autres participants venus des quatre coins du monde, à une marche de solidarité pour le peuple palestinien.

Une expérience qui n’aura finalement pas lieu, puisque le gouvernement égyptien n’a pas voulu encadrer officiellement la manifestation, invoquant des raisons sécuritaires. Et a arrêté et déporté de nombreux manifestants, principalement étrangers.

«Nous nous sommes sentis comme des criminels. Nous voulions juste marcher et rappeler à ceux qui ont le pouvoir que c’est tout ce que nous pouvons faire, nous, à notre échelle», se désole Maya Garman, keffieh autour du cou.

Séparés et frappés

Partie aux côtés de Mira Pinzi, Lalla Zeinab Bouanani et Georgette Hein, cette jeune Française a vite compris que tout n’allait pas se passer comme prévu, à leur arrivée au Caire.

Si trois d’entre elles parviennent à passer la douane rapidement et sans encombre, ce n’est pas le cas pour Lalla, interceptée et placée en détention durant 24 heures. «Nous devions nous cacher alors que tout avait été fait dans les règles. Les demandes de visa, les autorisations, tout avait été rempli et anticipé. Nous ne voulions justement pas être dans l’illégalité.»

Très vite, les organisateurs de l’événement pressent les activistes de quitter le centre-ville de la capitale égyptienne et de prendre des taxis pour se rendre au point de départ de la marche. «Ça a été notre erreur», admet Lalla. «Nous avons dû nous séparer en petits groupes et avons été encerclés par la police», relate-t-elle.

Leurs passeports confisqués, ils n’ont alors d’autre choix que d’attendre. Et entonnent des chants et slogans pro-palestiniens, pour rappeler la raison de leur présence ici. «Nous nous apercevons que nous avons été pris au piège, que nous ne pourrons pas aller plus loin.»

C’est là que tout dégénère. Selon les activistes luxembourgeois, des milices infiltrent leurs groupes et commencent à bousculer et frapper les manifestants. «Je n’ai pas compris. À quoi ça sert de frapper une femme de 92 ans qui veut juste marcher?», s’emporte Lalla. Ils finiront par tous être évacués en bus. Retour à la case départ.

Commencer à sanctionner

Un retour au goût amer, mais qu’ils ne qualifient certainement pas «d’échec». «Nous n’avons pas pu marcher là-bas, mais nous le referons, c’est certain. Pas en Égypte, mais ailleurs, oui. Nous sommes juste encore plus convaincus que les Palestiniens ont besoin de soutien.»

Pour eux, nul doute qu’une «conscience se réveille» et que cette expérience, aussi traumatisante qu’elle puisse être, n’est «rien» comparée à la souffrance endurée à Gaza depuis le 7 octobre 2023. «Je ne suis pas prête à dire que j’ai fermé les yeux. Je ne veux pas rester chez moi à regarder ça sur Facebook, ça n’a aucun sens», fustige Lalla, qui n’hésite pas à s’en prendre à la Grande-Duchesse Maria Teresa.

«Elle milite pour les droits des enfants, elle est engagée depuis de nombreuses années sur cette cause. Mais qu’elle aille jusqu’au bout! Ou qu’elle dise aux petits Mohammed qu’ils ne méritent pas de vivre. Il faut ouvrir les yeux et commencer à agir», s’emporte-t-elle.

Flanqués de leurs t-shirts «Solidarity has no nationality», Maya, Mira, Lalla, Georgette et Samuel restent plus déterminés que jamais à sensibiliser le public à leur cause, en rappelant la situation à Gaza et en incitant les gouvernements européens, dont le Luxembourg, à «se réveiller».

«Il faut sanctionner Israël, même si c’est difficile. Il faut commencer quelque part. Nous devons secourir cette population aujourd’hui. Demain, il sera trop tard.»

Une conférence de presse a eu lieu à leur retour hier, pour qu’ils puissent raconter leur expérience. (Photo : Sophie Wiessler)