Si la procession au sanctuaire est annulée, de nombreux fidèles sont attendus ce jeudi à Wiltz, tant le pèlerinage à Notre-Dame de Fátima tient une place particulière dans les cœurs. C’est ce que nous confient Isabel et Fernanda.
Le timing était bien trop serré : impossible d’organiser le pèlerinage à Notre-Dame de Fátima cette année encore, malgré la levée des restrictions sanitaires. Un véritable crève-cœur pour l’équipe des Œuvres paroissiales de Niederwiltz, qui n’a pas vraiment eu le choix : «On n’imagine pas le nombre d’autorisations nécessaires et la logistique qu’il y a derrière ce grand rassemblement», explique ainsi la présidente, Hélène Neissen. «Notre travail commence dès le mois de novembre. Or, à cette époque, la situation était encore trop incertaine sur le front de l’épidémie pour prendre la décision de se lancer», justifie-t-elle.
Il faut dire que chaque jeudi de l’Ascension, ce sont près de 20 000 fidèles, issus pour la plupart de la communauté portugaise du Luxembourg, qui prennent part à ce pèlerinage jusqu’au sanctuaire situé sur les hauteurs de la ville. Un évènement religieux, doublé d’une fête populaire, devenu incontournable dans le pays depuis la fin des années 1960.
Les origines
«Notre-Dame de Fátima» fait référence aux apparitions de la Vierge Marie à trois petits bergers du village de Fátima, dans le centre du Portugal en 1917 : tous décrivent «une dame vêtue de blanc» qui leur demande de prier. La reconnaissance de ces apparitions mariales par l’Église catholique en 1930 transforme dès lors l’endroit en lieu de pèlerinage pour les fidèles du monde entier.
Et c’est au moment de la Seconde Guerre mondiale, durant l’hiver 1945, que le lien se crée avec le Luxembourg : tandis que Wiltz subit les bombardements allemands, un groupe de paroissiens trouvent refuge dans une cave, et promettent d’ériger un sanctuaire à la Vierge Marie s’ils en réchappent. Sains et saufs, ils construisent le monument en 1951 en l’honneur de Fátima, dont la statue est alors transportée à travers l’Europe.
Le tout premier pèlerinage est lancé en 1968 par la communauté des travailleurs immigrés portugais, et depuis cette époque, le jour de l’Ascension, des milliers de fidèles cheminent de l’église de Niederwiltz jusqu’au sanctuaire sur les hauteurs de la ville.
Comme en témoigne Fernanda, 42 ans, arrivée du Portugal à l’âge de 9 ans, avec sa famille, et qui n’a pas manqué un pèlerinage depuis : «Enfant, j’attendais ce jour-là avec impatience. On ouvrait nos fenêtres et on voyait Wiltz se remplir de voitures et de monde. C’était fou!», se rappelle celle qui n’a plus jamais quitté la commune.
«C’était une joyeuse fête, on habitait tout près de la rue principale où passait la procession. On rejoignait alors les pèlerins pour monter au sanctuaire, tous en famille. Il y avait aussi la fête foraine près du Monopol… Ce sont des souvenirs merveilleux», confie-t-elle, alors qu’elle accueille chaque année, chez elle, les membres de sa famille venus spécialement des quatre coins du Luxembourg.
«Le jeudi de l’Ascension, on se retrouve tous, c’est la tradition depuis la naissance de mon fils il y a 16 ans. Parfois, on est une trentaine de personnes», sourit-elle. «Je pense qu’on doit maintenir ce jour si spécial car c’est un lien fort avec notre culture et cela nous unit, ici, au Luxembourg», insiste cette maman de deux adolescents, qui leur a transmis cet attachement si fort à Notre-Dame de Fátima.
Enfant, j’attendais ce jour-là avec impatience
Un point d’attache avec le Portugal
Un sentiment partagé par Isabel, 58 ans, qui participe quant à elle depuis plusieurs années à l’organisation. Elle se rappelle son étonnement lorsque, à 17 ans, elle rejoint ses frères et sœurs au Grand-Duché, et découvre que sa ville d’adoption abrite un sanctuaire dédié à Notre-Dame de Fátima : «Je crois que c’est la première chose que j’ai vue au Luxembourg! Pour moi, c’était un point d’attache avec le Portugal que je venais de quitter, laissant mes parents derrière moi», raconte-t-elle. «Je me demandais comment il était possible de retrouver Notre-Dame de Fátima, qui est vénérée au Portugal, ici, au bout du monde», dit-elle dans un éclat de rire.
«Avec une de mes sœurs, on travaillait dans un restaurant et on venait à la procession après le service. On rencontrait tant de familles portugaises, dont certaines originaires de notre village natal. C’était incroyable», se remémore-t-elle.
Des pèlerins présents malgré tout
C’est donc avec un pincement au cœur que toutes deux se résignent à ne pas voir la foule des fidèles envahir Wiltz jeudi. Même si, comme le fait remarquer Hélène Neissen, de nombreux pèlerins seront quand même présents : «On l’a vu les années précédentes : les croyants viennent prier, se recueillir, et font leur propre pèlerinage, dans une démarche personnelle. Chacun est libre, l’église sera ouverte, ce qui est annulé c’est la procession avec la statue vers le sanctuaire», précise la présidente.
«Le pèlerinage se vit surtout dans le cœur», tranche Isabel, «c’est un sentiment très fort. D’où mon envie de participer, d’être présente».
À suivre à la radio et sur Facebook
Mercredi, à 20 h, une prière intercommunautaire du rosaire (en français, portugais et luxembourgeois) sera retransmise en direct sur Radio Latina ainsi que sur la page Facebook de la paroisse «Por Wooltz». Jeudi, jour de l’Ascension, l’église de Niederwiltz, qui abrite la statue, sera ouverte à tous dès 8 h, tandis qu’à 18 h, une messe solennelle est prévue avec le cardinal Jean-Claude Hollerich. Elle sera diffusée également sur Facebook.