Le secrétaire de la seule ASBL naturiste du pays nous parle de cette pratique en plein développement dans le pays.
Comment se porte le naturisme au Luxembourg ?
Armand Ceolin : Tous les ans, nous observons une augmentation du nombre de membres dans notre association. L’intérêt est grandissant au Luxembourg même si, pendant très longtemps, nous n’avons pas été pris au sérieux.
Combien comptez-vous de membres actuellement ?
Nous avons un peu plus de 300 membres. Parmi eux, la grande majorité passe ses vacances naturistes à l’étranger en France, en Espagne ou en Italie. Finalement, il y a une minorité des personnes qui pratiquent le naturisme au Luxembourg. Car il n’existe actuellement que notre terrain et deux campings naturistes dans le pays (…). On aimerait, bien sûr, qu’il y ait plus d’endroits où l’on puisse exercer notre pratique, par exemple dans les piscines. C’est quelque chose qui se fait dans certains pays.
Quel est le profil des membres de votre association ?
C’est très varié. Nous avons des personnes qui travaillent dans les communes, à l’usine. Certains sont entrepreneurs, éducateurs, instituteurs. On couvre l’entièreté de la population luxembourgeoise. Nous avons aussi beaucoup de frontaliers qui viennent de Belgique, de France ou d’Allemagne (…) et de plus en plus de personnes jeunes. Depuis ces dernières années, on voit aussi un intérêt grandissant de cette pratique chez les jeunes qui cherchent le calme et la plénitude.
Le lieu est ouvert toute l’année, des personnes viennent-elles pendant la période hivernale ?
La période de fréquentation, c’est surtout à partir du printemps. Mais oui, nous avons certains de nos membres qui viennent se rouler dans la neige pendant l’hiver (il rit). Cela reste rare vu que nous n’avons plus beaucoup de neige au Luxembourg !
Vous vous revendiquez comme une association familiale. N’est-ce pas problématique de venir avec ses enfants dans ce lieu ?
C’est un reproche qui nous a déjà été fait. Les enfants ne voient rien de mal dans la nudité, car ils sont tout à fait naturels. Et si c’est le cas, c’est parce qu’on leur a dit que c’était mal. Je pense de cette éducation vers le naturel a un vrai avantage. Cela leur apprend le respect vis-à-vis des autres, notamment des personnes âgées qui ont un corps bien différent du leur.
Parfois, les gens mettent le naturisme au même niveau que la dépravation
Pratiquer le naturisme représente-t-il encore un tabou au Luxembourg ?
Je ne sais pas si c’est encore un tabou, mais ce qui est certain, c’est qu’il y a encore une grande méconnaissance. Parfois, les gens mettent le naturisme au même niveau que la dépravation. Et certains voient de la sexualité dans le naturisme, ce qui n’est absolument pas le cas. Cette méconnaissance, je pense, n’est pas propre au Grand-Duché, mais est également présente dans de nombreux autres pays (…). Aujourd’hui, ces critiques restent assez rares. Le naturisme a beaucoup évolué au Luxembourg, comme ailleurs. On peut prendre l’exemple de la France qui accueille chaque année quatre millions de personnes dans ses campings naturistes.
Vous évoquez la sexualité. Parfois, l’amalgame est fait entre les clubs naturistes et libertins.
Nous avons un règlement interne qui stipule que nous sommes bien un club naturiste. Il précise également que tous les attouchements à caractère sexuel sont strictement prohibés et entraînent l’exclusion immédiate de l’association. C’est la première chose que nous disons aux gens qui viennent visiter notre terrain. Mais ces problèmes restent extrêmement rares.
Vous organisez, fin mai, une journée portes ouvertes dans votre association. Quels sont vos arguments pour attirer de nouveaux adeptes ?
En premier lieu, je dirais que le naturisme permet l’acceptation de son corps et de son évolution dans le temps. C’est aussi et surtout une philosophie de vie. Enfin, il ne faut pas oublier l’aspect récréatif qui est très agréable. Sortir de l’eau sans maillot de bain, c’est quand même quelque chose (il rit). Oui, il peut y avoir certaines appréhensions à enlever ses vêtements. On le voit chez les femmes qui subissent la pression de la société et des corps parfaits dans les magazines. Mais quand on réussit à le faire pour la première fois, personne n’est dévisagé ni jugé et on est très vite à l’aise.
«Je n’imaginais plus rien d’autre»
Armand Ceolin, 70 ans, a découvert dans les années 1990 le mouvement naturiste. «Pendant des vacances en France, j’ai été invité à visiter une plage naturiste. Ce que j’ai accepté, mais avec beaucoup d’appréhension. Une fois là-bas, je n’imaginais plus rien d’autre. J’avais trouvé quelque chose d’incroyable.» Durant de nombreuses années, le secrétaire de l’association a pratiqué, sans le cacher à son entourage ou au travail, le naturisme. «Cela n’a jamais posé de problème. Et je ne me suis jamais senti jugé», confie-t-il.
Surtout que chacun sait qu’au Luxembourg, il fait plus de 30°C 10 mois sur 12.