Auteur d’une œuvre à part, amateur de natures mortes et dompteur d’objets iconoclastes, le photographe Michel Medinger est mort à l’âge de 83 ans.
Au dernier grand hommage qui lui a été rendu de son vivant, l’été dernier aux Rencontres d’Arles, où il avait ses habitudes, Michel Medinger a brillé par son absence. Affaibli par la maladie qui vient de l’emporter à 83 ans, il n’avait pu quitter l’hospice de Hamm, où il était installé. Mais cette dernière exposition, titrée «L’ordre des choses», aura fait date. Soit une cinquantaine de ses «tableaux» photographiques, dont certains inédits, représentant plus de quatre décennies du travail de l’artiste, démarré en autodidacte à la fin des années 1970.
L’œuvre de Michel Medinger mêle beauté et étrangeté, vie et mort, dans des compositions qui savent être douces comme piquantes. Passionné par l’art et ses symboles, des peintures de l’âge d’or néerlandais à Francis Bacon, ce jongleur de produits chimiques aux noms barbares donnait à ses couleurs ou à son noir et blanc une esthétique rare, doublée d’un sens théâtral de la mise en scène, où rien n’était laissé au hasard.
Né en 1941 à Luxembourg, c’est à 23 ans que ce fils d’un «peintre du dimanche» s’est acheté son premier appareil photo. Ses premiers clichés? Les tiroirs remplis d’outils de travail dans l’atelier de son père. Mais il a surtout acquis son Yashica 44 pour une occasion toute particulière : les JO de Tokyo-1964, où cet ancien coureur de demi-fond s’était qualifié avec l’équipe nationale d’athlétisme.
«Je ne pouvais pas y aller et surtout revenir sans avoir fait de photographies», estimait Michel Medinger au Quotidien en 2016. Désormais, la photo lui prendra «tout (s)on temps libre». Expérimentateur sans limites, il s’est dédié dans un premier temps à la photographie sportive avant de s’intéresser aux natures mortes, qu’il rend baroques et surréalistes – ce qui lui vaudra le soutien inconditionnel de la galerie Clairefontaine de Luxembourg dès 1981.
S’il y a des airs de cabinet de curiosités dans l’œuvre de ce «maître des objets» aux élans de collectionneur-brocanteur, c’est qu’il trouvait l’inspiration dans le chaos de son atelier, rempli de babioles variées et hétéroclites (crânes d’animaux, coquillages, porcelaines…).
En 2018, à l’occasion d’une rétrospective au CNA, l’artiste confiait : «Parfois, j’ai l’impression que toute cette panoplie de figurines, d’animaux, de poupées, de squelettes, d’outils, est en compétition pour attirer mon regard et pouvoir figurer dans mes photographies. Comme s’ils me demandaient : “À quand mon tour?”»
Les œuvres de Michel Medinger ont été exposées en Europe, aux États-Unis, en Chine ou encore au Japon. En mars, à l’occasion du Mois européen de la photographie, l’exposition organisée pour les Rencontres d’Arles sera présentée à la Villa Vauban, avant d’investir au printemps l’espace d’exposition Pomhouse du CNA, à Dudelange.