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Montres de luxe dérobées à Eich : les braqueurs écopent de 15 et 18 ans ferme


Par ruse, le duo s'était introduit au domicile d'un homme d'affaires à Luxembourg, le 12 décembre 2012. Il avait joué au prétendu prince intéressé dans l'achat de montres de luxe... (Photo : archives lq/françois aussems)

Fin 2012, une prétendue transaction de bijoux de luxe pour un prince arabe s’était terminée en un braquage avec prise d’otage dans une fiduciaire à Eich. Ce mercredi après-midi, la chambre criminelle a rendu son jugement.

C’était une affaire digne d’un film policier : en se présentant comme le «chef de sécurité» d’un jeune prince arabe, Redda B., en cavale en France, avait réussi à contacter fin 2012 un homme d’affaires au Luxembourg. Mais la prétendue transaction de bijoux de luxe s’est terminée par un braquage avec séquestration et prise d’otage. Car le 12 décembre 2012, l’homme d’affaires qui croyait recevoir à son domicile, montée Saint-Crépin, un riche prince s’est retrouvé face à deux braqueurs armés… Le duo avait réussi à lui extorquer 140 000 euros.

Les deux ravisseurs ne s’étaient pas arrêtés là. Ils l’avaient obligé à réunir pour le lendemain des bijoutiers renommés dans une fiduciaire située rue de Mühlenbach pour une vraie-fausse vente. Les victimes avaient fini ligotées et bâillonnées dans la cave tandis que les braqueurs avaient pris la fuite avec un otage, une bonne quinzaine de montres de luxe et des bijoux. Leur valeur avait été estimée à 1,2 million sur le marché noir.

La belle vie dans le sud de l’Espagne…

Heureux comme un prince, Redda B. menait la belle vie dans le sud de l’Espagne. Mais cela n’avait pas duré. Au Grand-Duché, les images de vidéosurveillance des distributeurs de billets avaient rapidement fait avancer l’enquête. Avec les cartes bancaires de l’homme d’affaires qu’ils avaient séquestré à son domicile, les deux braqueurs avaient en effet effectué plusieurs retraits d’argent à Bereldange, Eich et rue de Monterey. Mais pratiquement à visage découvert.

En coopération avec les autorités françaises, des noms avaient vite pu être placés sur ces deux visages. Les deux hommes qui s’étaient invités au Luxembourg en prétendant être un jeune prince arabe et son chef de sécurité n’étaient autres qu’Ali A. (48 ans) et Redda B. (49 ans). Deux hommes déjà recherchés en France pour une séquestration et extorsion de fonds mi-octobre 2012 dans l’hôtel Concorde-Montparnasse à Paris.

Depuis début 2013, les quadragénaires dorment donc en prison. Ils ne risquent pas de sortir de sitôt. Pour les faits commis au Luxembourg, la 13e chambre criminelle a condamné, mercredi après-midi, Redda B. – celui qui affirme avoir monté tout le coup – à 18 ans de prison ferme. Ali A., son acolyte lors du braquage, écope de 15 ans ferme.

Les deux autres prévenus dans cette affaire n’avaient pas mis les pieds au Luxembourg. Bijoutier à Marbella, Daniel V. (33 ans) avait écoulé le butin sur le marché noir. Mohamed F. (38 ans), pour sa part, aurait été plus qu’un simple chauffeur. «Il était le sous-lieutenant censé surveiller les affaires de Redda B.», avait récapitulé le parquet. Autant dire qu’il avait aussi largement profité de l’argent de Redda B.

Entre 5 et 7 ans de prison pour les deux receleurs

Poursuivi pour le recel des bijoux en Espagne, ils écopent respectivement de 7 ans (dont 4 avec sursis) et 5 ans (dont 3 avec sursis). Le parquet avait requis 12 ans contre le duo sans antécédents spécifiques. Contrairement aux deux braqueurs, ils ne sont plus en prison. Ils ont été libérés sous caution fin 2014.

Les juges ont cependant retenu la circonstance aggravante que les quatre hommes ont agi au sein d’une association de malfaiteurs. «On ne fait pas un tel coup si on n’a pas de circuit derrière pour écouler les bijoux», avait estimé le substitut principal dans son réquisitoire.

Dans cette affaire, six victimes s’étaient constituées parties civiles. Au total, elles se voient allouer près de 570 000 euros de dommages et intérêts. Plus de la moitié des sommes concernent le dommage matériel. Pour une des victimes séquestrées dans la cave de la fiduciaire, une expertise a été ordonnée pour évaluer le préjudice moral et l’atteinte à l’intégrité physique. En attendant, une provision de 50 000 euros lui a été allouée.

Spécialement déféré de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis en région parisienne pour le procès, Redda B. n’était pas présent pour le prononcé mercredi après-midi. Il était représenté par son avocat. Me Sébastien Lanoue s’entendra avec son client pour voir s’il est pertinent de former appel contre cette décision. Il «salue» néanmoins «que le tribunal n’a pas suivi le réquisitoire dans sa demande très exigeante». Pour rappel, 24 ans avaient été requis contre Redda B.

Le dépassement du délai raisonnable retenu par la chambre criminelle y est certainement pour quelque chose. Près de sept ans se sont écoulés entre l’arrestation des quatre hommes le procès. Les débats s’étaient étirés sur neuf journées fin 2019.

Fabienne Armborst

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