Bob Bertemes, seul représentant luxembourgeois aux mondiaux de Doha, s’alignera jeudi dans les qualifications du poids. Le 10e performeur mondial de la saison (22,22 m) sait que rien ne sera facile.
Ses premiers mondiaux
«2015, ma meilleure année. On était en 2015 et c’était, jusqu’à cette année, ma meilleure année. Pour la première fois, j’ai lancé 20 m (NDLR : en indoor), j’avais effectué une très belle saison en salle, mais je ne pensais pas me qualifier pour les Mondiaux de Pékin. Finalement, je termine 13e, aux portes de la finale en battant le record national. C’était vraiment top!»
Mannheim à quitte ou double
«J’étais prêt à dire stop ! Il fallait que quelque chose change. Quand je suis parti à Mannheim (NDLR : son centre d’entrainement), j’y suis allé en me disant que si ça se passe bien, je continue. Mais si je n’arrive pas à lancer 20 m, j’étais prêt à dire stop ! Au bout d’un mois en translation, mon entraîneur voulait travailler sur des erreurs que je commettais. Il m’a proposé d’essayer la rotation et m’a dit que, dès cette année, je pouvais lancer à 21 m. J’ai tenté ma chance. Et j’ai atteint les 21 m aux Europe de Berlin, en 2018.»
Son évolution physique
«J’ai pris 10 kg en deux ans. Quand je lançais en translation, je pesais aux alentours de 117-118 kg. Mais en rotation, l’idée est de bouger très rapidement une masse tout en gardant de l’explosivité. J’ai pris 10 kg en deux ans. Cette prise de poids a été effectuée de manière raisonnée avec deux personnes qui me font un plan alimentaire. L’idée était de monter progressivement.»
Une priorité : la vitesse
«Le secret, c’est d’être tout le temps rapide. Auparavant, je faisais beaucoup de musculation. Mais avec Khalid (Alqawati, son entraîneur actuel), c’est différent, il y a moins de musculation. L’objectif, c’est d’être à l’entraînement tout le temps proche de la vitesse en compétition. Si certains jours je n’arrive pas à lancer vite le poids à 7,2 kg, on prend un poids moins lourd mais l’important, c’est la vitesse. J’étais un peu sceptique, notamment sur le fait de moins faire de musculation mais finalement, je me suis amélioré partout en muscu. Et j’ai progressé au niveau de l’impulsion puisque mon record avec un ou deux pas d’élan et saut pieds joints est passé à 1,41 m.»
La rotation, un long apprentissage
«Je n’arrivais pas à lancer dans le secteur. Au départ, on s’entraîne déjà sans élan. Pour effectuer un jet complet, ça m’a pris un mois. Je me rappelle que le premier essai n’était vraiment pas concluant. Pour la première compétition, on était parti sur un petit meeting, à l’échauffement je faisais une demi-rotation et je n’arrivais pas à lancer dans le secteur. Au moment de lancer, mon premier jet est à plus de 19 m. Par contre, les cinq suivants, j’ai fait 0. Mais je sentais que si j’arrivais à attraper un essai, je pouvais aller loin. J’étais loin d’avoir le sentiment que j’ai maintenant.»
La rotation, ça ne pardonne plus
«Il y a toujours moyen d’aller loin. En translation, si tu rates un élément, c’est fini. En rotation, ça pardonne plus. Même si tu fais une ou deux erreurs, tu peux malgré tout arriver à bien lancer.»
Son record à 22,22 m
«Juste avant, je prenais un café. Ce jour-là, à Cessange, j’avais très envie de lancer. Avant ma compétition, je buvais un café avec Steve Tonizzo, qui est un peu le père des lanceurs. J’étais très relax, je suis parti m’échauffer, les gens ont mis de l’ambiance et ça m’a permis de lancer très loin.»
Sa 8e place à Paris
«À Paris, au meeting Diamond League, je termine huitième mais je lance tout de même 21,20 m. Et rien que ça, c’est positif. Ça montre que je suis capable de lancer loin avec les autres.»
Le minimum syndical ?
«Dans un mauvais jour, je peux faire 20 m. À Minsk, je n’étais pas dans un bon jour. Je revenais d’un stage en Turquie, on était rentrés à Mannheim un jour avant d’aller au Luxembourg pour le Shoot Out puis retour à Mannheim avant de partir directement au Belarus, pour le match Europe – USA. J’étais fatigué et rien ne marchait. Je fais 20,21 m donc je pense que dans un mauvais jour, je peux quand même lancer 20 m.»
Et maintenant Doha
«Au départ, je voulais partir le 20 octobre. Mais lors du stage de Belek, en Turquie, j’ai vu qu’après un ou deux jours un peu compliqués, je parvenais plutôt bien à m’adapter à la chaleur. Dès le troisième jour, j’étais capable de m’entraîner correctement. Du coup on a décidé d’y aller beaucoup plus tard, de bien s’entraîner à la maison, en plus l’aéroport est à seulement 40 minutes de Mannheim, c’est pour cela qu’on est partis seulement samedi. À Doha, le premier but, c’est d’aller en finale. Et honnêtement, je serais déjà très content si je parvenais à passer la qualif. Je me rappelle qu’à Berlin, j’étais totalement désarmé. J’avais lancé mon dernier jet de qualification, j’étais 12e et à la merci d’un mec qui me passerait devant. C’était un sentiment horrible. Je ne veux plus revivre cela!»
Romain Haas