L’attaquant dudelangeois Samir Hadji, franco-marocain, est au comble de la joie, aujourd’hui, avant la deuxième demi-finale.
Le fils du Ballon d’or africain et ancien international marocain Mustapha Hadji, ultraprolifique avec le F91 depuis le début de saison, va regarder la demi-finale seul et sous tension, partagé comme tous les binationaux mais avec le sentiment que l’heure de l’Afrique est peut-être venue.
Quel est votre sentiment, juste avant cet historique France – Maroc en demi-finale de Coupe du monde?
Samir Hadji : C’est un truc irréel. Ce match, j’en ai rêvé mais sans jamais y penser tout haut. Ce match, je l’ai rêvé et voilà que le jour est arrivé. Cela semblait déjà inespéré pour le Maroc d’imaginer se qualifier dans ce groupe avec la Croatie et la Belgique. C’est quand j’ai vu que c’était costaud, qu’il y avait l’état d’esprit, que ça jouait avec le cœur… Cette équipe nous a procuré à tous des émotions incroyables. Malheureusement, je n’ai pas réussi à voir un seul match avec la famille. Pas le temps. J’ai le boulot, les entraînements… je regarde ça tout seul du coup.
Mais quand vous entrez dans un Mondial, vous, vous regardez la France et le Maroc de la même façon?
La vérité, c’est que je suis un vrai Franco-Marocain. Ma mère est française, mon père marocain. France – Maroc, c’est un peu comme choisir entre son père et sa mère, ce n’est pas possible. Mais moi, j’ai déjà vu la France remporter deux fois la Coupe du monde alors là, j’aimerais bien voir le Maroc passer. Même s’il a déjà écrit l’histoire, j’ai plus envie de le soutenir lui, sur ce match.
Comment est l’ambiance à la maison?
Mes enfants sont jeunes, ils ne comprennent pas. Ils n’en sont heureusement pas encore à l’âge où on peut se dire « mais j’aime les deux équipes pareil alors je n’ai pas envie qu’il y en ait une qui perde« . Je regrette vraiment de ne pas avoir pu me permettre de faire l’aller-retour jusqu’à Creutzwald, d’où je suis originaire. Mais bon, je verrai ce match avec ma femme, qui elle est franco-vietnamienne. Donc elle me suivra…
Votre père aussi doit être aux anges, même si il préférerait sûrement être au Qatar, dans le staff, en train de vivre ce moment de l’intérieur…
Lui il ne voit pas ça de façon égoïste mais moi, à sa place… je serais en partie content mais en partie un peu dégoûté parce que lui, à trois mois près (NDLR : il est parti en même temps que l’ancien staff), il y était, dans cette aventure. Bon après, des Coupes du monde, il en a fait deux comme joueur et une dans le staff, voilà, il a fait son temps. Il était au Qatar en début de compétition. Il est revenu à Marrakech depuis peu, mais je ne sais pas s’il ne va pas repartir pour la finale… Ou le match pour la troisième place. C’est bien aussi.
À Creutzwald, c’est l’euphorie totale…
Que raconte-t-il, ce match, pour vous?
Cela reste un match de foot. Mais il y aura plus d’émotions à cause du nombre de Marocains présents en France. Quand vous avez un France – Maroc au Stade de France, il y a toujours plus de Marocains que de Français. Je croise des compatriotes à Audun devant l’école de ma fille et on discute football. Mais quand la France gagne, on entend quand même plus de klaxons que quand c’est le Maroc (il rit). À Creutzwald par contre, c’est l’euphorie totale…
Vous pourrez vous empêcher d’y aller en cas de finale?
Ah, mais je ne serai plus là. J’ai réservé mes vacances depuis plus de six mois et si je veux voir la finale, ce sera depuis un bar, au bord d’une piscine à Punta Cana (NDLR : République dominicaine), avec un cocktail à la main.
Avez-vous vu beaucoup de gens pleurer, ces dernières semaines, grâce à cette équipe du Maroc?
Ah j’ai eu au téléphone des gens très émus, mais pas qui ont encore pleuré. Les gens sont heureux de ce qui se passe. En fait, cette histoire touche le monde entier. En tout cas, toute l’Afrique. Les gens trouvent ce Petit Poucet touchant. Elle est là, la beauté du foot!