Les agriculteurs poursuivent leurs actions en France mardi, un mouvement endeuillé par la mort d’une femme renversée par une voiture sur un barrage, au lendemain d’une réunion avec le gouvernement et alors que s’ouvre une réunion des ministres européens du secteur.
La victime, une agricultrice de 35 ans, a été renversée mardi entre 05h30 et 06h alors qu’elle se trouvait sur un barrage routier d’agriculteurs à Pamiers (sud-ouest) avec son conjoint de 40 ans et leur fille de 14 ans.
Le Premier ministre Gabriel Attal a exprimé sa « peine » et assuré que la « nation est bouleversée et solidaire », sur le réseau X.
Emmanuel Macron a demandé au gouvernement d’apporter « des solutions concrètes » aux difficultés de la profession et regretté un « drame qui nous bouleverse tous ».
Les trois occupants de la voiture qui a foncé sur le barrage, « un couple et une de leurs amies » selon le parquet, de nationalité arménienne selon une précision du préfet, ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une enquête ouverte notamment pour homicide involontaire aggravé.
« Les faits en cause ne paraissent pas revêtir un caractère intentionnel », a souligné le parquet, mettant en avant la très faible luminosité sur place « en pleine nuit », « sans éclairage public ».
« Dans le moment particulier que vit l’agriculture, ce genre de drame est difficile à vivre », a déclaré dans la matinée le président de la FNSEA, principal syndicat agricole français, Arnaud Rousseau.
« L’ampleur de ce qui est en train de se préparer ne sera pas modifiée par ce drame », a-t-il souligné ensuite, ajoutant: « les combats continuent ».
Minute de silence
Au lendemain d’une réunion apparemment infructueuse avec le gouvernement, de nouveaux blocages ont lieu.
Vers 4h, une trentaine de tracteurs ont bloqué la circulation sur l’A7 entre Lyon et Valence (sud-est), selon la préfecture de la Drôme.
Dans le Sud-Ouest, les barrages de l’A64 et aux accès à la centrale de Golfech restaient en place et des perturbations étaient signalées sur les axes A62 et A20.
Deux nouveaux blocages sont apparus sur l’A64 à Pau et l’A63 à hauteur de Bayonne, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, l’accès à l’Espagne depuis l’A64 restant cependant ouvert.
À Agen, des dizaines de tracteurs bloquent l’A62. Le trafic ferroviaire, un temps perturbé dans la zone par un dépôt de pneus sur les voies, a été rétabli. Des agriculteurs se sont massés devant la préfecture, où ils ont observé une minute de silence en hommage à l’agricultrice décédée.
En Dordogne, la circulation est perturbée à plusieurs endroits, selon la préfecture. Des convois de tracteurs convergent aussi vers Limoges et Poitiers, où des manifestations sont attendues.
De « petites actions » ont aussi eu lieu dans l’Est lundi soir, notamment au péage de Saint-Avold où des barrières d’autoroutes ont été démontées, ainsi qu’un blocage à la frontière allemande à Sarrebruck, selon Fabrice Couturier, responsable du principal syndicat agricole dans la région, qui annonce plus d’actions à partir de mercredi.
« Le drame de ce matin (…) nous ramène encore plus de dignité dans notre mouvement et remobilise certainement encore plus », a déclaré mardi un responsable du syndicat majoritaire, Luc Smessaert.
Lundi soir, le chef du gouvernement a accueilli les syndicats majoritaires, sans annonce à la sortie. Rousseau a dit attendre du Premier ministre des déclarations « qui fassent bouger les lignes sensiblement », évoquant une remise immédiate sur le gazole pour les tracteurs.
Gabriel Attal recevra mardi et mercredi la Coordination rurale et la Confédération paysanne, les 2e et 3e syndicats agricoles français.
Attal veut « aller vite », « dans la semaine », a affirmé dans la foulée le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.
Le premier syndicat agricole français a remporté depuis plusieurs années de nombreux arbitrages, comme sur les taxes sur l’eau ou les pesticides, mais les agriculteurs continuent de se plaindre de crouler sous les normes et de ne pas gagner assez bien leur vie.
Parmi les revendications entendues sur le terrain: des simplifications administratives, pas de nouvelle interdiction de pesticides, arrêter d’augmenter le prix du gazole pour les tracteurs, être indemnisé plus vite après des calamités ou encore la pleine application de la loi censée obliger les industriels et les grandes surfaces à mieux payer les agriculteurs.
Le gouvernement craint un embrasement. Des Pays-Bas à la Roumanie en passant par la Pologne ou l’Allemagne, les agriculteurs multiplient les actions contre les hausses des taxes et le « Pacte vert » européen.
Mardi, les ministres européens du secteur agricole se réunissent à Bruxelles.