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Meurtre à Bonnevoie : la défense réclame l’internement de l’accusé


(Photo archives : LQ)

La place d’Alberto est à l’hôpital psychiatrique, selon Me Scheerer, qui a plaidé l’article 71 pour son client. Pas en prison, comme le suggèrent les parties civiles.

Quelle est la place des criminels présentant une maladie mentale? Le procès d’Alberto pour meurtre et tentative de meurtre a, à nouveau, soulevé la question. Deux solutions s’offrent aux juges de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg : la réclusion criminelle à perpétuité ou l’internement psychiatrique forcé. Dans un cas comme dans l’autre, le prévenu est retiré de la circulation pour un bout de temps et la société est protégée d’une éventuelle récidive meurtrière de sa part.

Un expert psychiatre a conclu à l’irresponsabilité de l’Espagnol de 47 ans. Tout comme le parquet et sa défense. Les avocats de ses deux victimes sont d’un avis contraire. Alberto est atteint d’une forme sévère de schizophrénie paranoïaque qui déclenche en lui des hallucinations auditives. Dieu lui a demandé d’empêcher l’apocalypse en éliminant des démons incarnés en humains. En l’occurrence, ses colocataires. À travers son geste, Alberto a libéré 50 millions d’âmes des enfers.

Les faits dépassent l’entendement. De même que le comportement du prévenu. Plus de deux ans après les faits, il n’en démord toujours pas et est convaincu de devoir poursuivre sa mission divine. Ce qui interroge sur sa perception de la réalité et sur son pronostic de guérison. Incarcéré en détention préventive et suivi médicalement, il reçoit un traitement qui «le stabilise» mais n’améliore pas son état.

Alberto a besoin d’un traitement adapté et sous surveillance pour éviter qu’il arrête la prise de ses médicaments. Au moment des faits, en décembre 2022, il n’avait pas pris une partie de son traitement depuis quelques jours, ce qui a pu entraîner la rechute de sa maladie et son passage à l’acte alors que, selon ses médecins, l’état de santé psychique du prévenu était «stabilisé» depuis quelques années.

Après un internement d’un an et demi en hôpital psychiatrique, puis un séjour en appartement thérapeutique, les médecins avaient jugé l’état mental d’Alberto suffisamment stable pour qu’il puisse vivre de manière indépendante dans la colocation de la rue Anatole-France à Bonnevoie, où a eu lieu la tuerie. «Il n’aurait jamais dû quitter son logement thérapeutique. Il s’y sentait protégé et encadré», a indiqué son avocat, Me Scheerer, qui rejoint l’avis des autres parties au procès.

L’avocat demande au tribunal de déclarer son client pénalement irresponsable et d’ordonner son placement dans un institut spécialisé. Ce qu’avait déjà préconisé le procureur mercredi. Il avait requis son acquittement. Les avocats des parties civiles estiment, quant à eux, que le prévenu doit être reconnu responsable et incarcéré. Pour eux, la maladie ne l’aurait pas privé de son libre arbitre et il aurait commis la faute d’arrêter son traitement.

Un crime d’une rare violence

«Le doute ne doit, dans ce cas, pas profiter à l’accusé», a martelé Me Rollinger encore une fois jeudi après-midi, ajoutant que depuis le début de l’enquête, de son audition par la police à celle devant le juge d’instruction, Alberto a toujours reconnu avoir arrêté de prendre son traitement. Et si le prévenu n’est pas déclaré responsable, les avocats des parties civiles demandent qui l’est.

Pour eux, pour protéger la société, la place de l’Espagnol est en prison, d’où il ne risque pas d’être libéré parce que son état serait jugé stable. En cas d’internement, un collège de médecins devra déterminer si un retour à une vie normale est possible. En cas d’emprisonnement, il risque une réclusion criminelle à vie, argumentent les parties civiles.

«Il est inutile d’essayer de comprendre sa logique avec la nôtre. Au moment de sa rechute, Alberto ne comprenait plus pourquoi il devait prendre son traitement», a tenté d’expliquer le procureur, qui a comparé le prévenu à un enfant. Il ne comprend pas à quoi sert son traitement, mais il sait «dans ses moments lucides» qu’il doit répondre à l’injonction et le prendre.

Alberto a tué la compagne d’un de ses colocataires et blessé un autre sur ordre de Dieu qui les lui avait désignés comme Lucifer et un de ses démons. Les policiers avaient découvert une véritable boucherie dans l’appartement qu’ils occupaient. Le crime commis était d’une rare violence.

De quel côté la balance du tribunal va-t-elle pencher ? Le prononcé est fixé au 27 mars.

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