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Mendicité : Gloden toujours plus isolé


Même s’il se retrouve dos au mur, Léon Gloden – ici aux côtés de la ministre de l’Agriculture, Martine Hansen – garde le sourire. 

Malmené par le parquet et l’opposition, le ministre du CSV a aussi vu sa collègue de la Justice prendre du recul sur l’implication de la PJ dans le dispositif «anti-mendicité». Récit d’une journée mouvementée.

Il avait toujours un large sourire en arrivant, hier, vers 16 h, à la Chambre. Le ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden (CSV), rappelé d’urgence après le dépôt surprise d’une motion de l’opposition (hors ADR), se vantait auprès du député Marc Baum (déi Lénk) – et en présence de l’auteur de ces lignes… – de l’«erreur malencontreuse» admise par la procureure générale d’État, Martine Solovieff.

La haute magistrate avait nié avoir été informée, jeudi dernier, par SMS, que l’ordre a été donné par le ministre de retirer des agents de la PJ mobilisés à tort du dispositif renforcé dans la capitale.

Dans un mail envoyé à la Chambre, dont Le Quotidien a obtenu une copie, elle précise avoir bien réceptionné un SMS de la part du directeur général de la police. Or, le message aurait été envoyé sur un «deuxième portable avec lequel je ne suis généralement pas en contact avec (Philippe Schrantz)».

En soi, ce SMS égaré ne change rien à la critique de la procureure générale, venue répéter devant les députés sa demande écrite à «décharger toutes les sections du Service de police judiciaire (du) plan d’action policier», mis en place pour réprimander, notamment, la mendicité dite «organisée» à Luxembourg-Ville.

Dans sa lettre de protestation, Martine Solovieff avait fustigé que ses enquêteurs hautement spécialisés de PJ devaient «effectuer des rondes pour traquer» des mendiants au lieu de réprimander le grand banditisme, la criminalité générale ou les infractions à caractère sexuel»;

«La procureure générale et le procureur d’État ont affirmé que ce même dispositif n’est pas du tout outillé pour accomplir les missions qui lui sont conférées. De plus, les procédures engagées, que ce soit contre la mendicité, le trafic de stupéfiants ou encore le proxénétisme, risquent d’être invalidées, car le dispositif policier mis en place n’est pas conforme à l’État de droit», s’indigne Meris Sehovic, député de déi gréng, évoquant une «situation grave».

«Le fait que les plus hauts magistrats du pays aient appris par voie de presse la mise en place de ce dispositif n’est pas une façon de travailler entre institutions. Au vu de l’envergure de la mobilisation, il ne suffit pas de dire qu’il existe un souci de communication entre police et justice», renchérit Dan Biancalana (LSAP), le député-maire de Dudelange.

«La concentration d’effectifs de police dans la capitale délocalise la criminalité dans d’autres communes. Pour preuve, les centaines d’agents mobilisés ne constatent quasiment rien à Luxembourg-Ville. Or, le ministre Gloden est responsable de garantir la sécurité dans l’ensemble du pays», martèle pour sa part Marc Goergen, élu du Parti pirate.

L’effectif de la PJ réduit «de moitié»

Tous ces graves reproches n’impressionnent pas outre mesure le ministre de tutelle de la police. Il admet tout au plus un manque de communication avec le parquet. Une interprétation que ne partage pas sa collègue de parti, la ministre de la Justice, Elisabeth Margue.

«Il est clair que si un dispositif ordonné par le ministre des Affaires intérieures nécessite l’intervention du parquet, il faut qu’il soit consulté en amont. En outre, il m’importe que le ministère public dispose des moyens nécessaires, y compris des agents de la police judiciaire, pour avancer dans ses travaux», tranche-t-elle. 

Après avoir pris oralement du recul, Elisabeth Margue a carrément quitté la salle plénière de la Chambre lorsque le ministre des Affaires intérieures était amené à faire face à une nouvelle salve de critiques.

es derniers soutiens semblent être la députée-maire de Luxembourg, Lydie Polfer (DP), et ses échevins-députés, sans oublier l’ADR de Fernand Kartheiser, venu prendre la défense du ministre malmené : «Il faut faire attention à ne pas donner l’impression que l’on se trouve dans une crise institutionnelle. Il est cependant clair que des erreurs matérielles ont été commises dans la mise en place du dispositif de police renforcé.» 

La motion invitant le gouvernement «à donner suite au courrier de la procureure générale d’État sollicitant le retrait avec effet immédiat de (tous) les agents de la police judiciaire (déployés) dans le « dispositif spécial«  (…) dans le cadre de la lutte contre la mendicité organisée» a finalement été rejetée par 39 voix (CSV, DP, ADR) contre 20 (LSAP, déi gréng, Parti pirate, déi Lénk).

Mais, au bout d’une journée éprouvante, le ministre des Affaires intérieures a au moins fait une concession : le dispositif de la PJ va être réduit de 110 à 30 agents («de moitié», selon Léon Gloden), «en attendant une nouvelle évaluation de la situation fin mars».

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