À moins d’une semaine des élections communales, Marc Schoentgen, directeur du Zentrum fir politesch Bildung (ZpB), dresse un bilan du travail effectué par son centre pour renforcer l’éducation à la citoyenneté au Luxembourg.
Les jeunes forment le public cible du Zentrum fir politesch Bildung (ZpB). Le travail d’information et de sensibilisation effectué par l’équipe emmenée par le directeur, Marc Schoentgen, s’adresse toutefois à un public plus large.
Bon nombre de communes se sont ainsi adressées au ZpB en amont des élections de dimanche. «L’information doit être courte, compréhensible et simple. Il est nécessaire de s’adapter aux réalités de notre temps», souligne notre invité.
Créé en octobre 2016, le ZpB sort en quelque sorte de sa première mandature politique. Peut-on affirmer que l’éducation à la citoyenneté, qui est votre objectif majeur, a pu être renforcée au fil des sept dernières années?
Marc Schoentgen : En toute modestie, je dirais que l’existence même du ZpB fait que l’éducation à la citoyenneté s’est renforcée. Savoir combien de gens on a finalement réussi à atteindre est difficilement mesurable.
Mais notre centre bénéficie d’un grand soutien et d’une grande acceptation aussi bien auprès de nos publics cibles que des acteurs avec lesquels on collabore. Nous avons réussi à donner plus de visibilité à l’éducation à la citoyenneté.
Quels sont les principaux acquis du ZpB?
On a réussi à mieux faire comprendre aux gens en quoi consiste véritablement l’éducation à la citoyenneté. Il ne s’agit pas d’une communication gouvernementale, d’un moyen d’influencer les gens ou de leur imposer une opinion. Le terme « politique« a encore souvent une connotation négative. Nous luttons toujours contre des préjugés.
On pourrait penser que le ZpB impose une éducation politique, à l’image de ce qui se fait dans des régimes autoritaires comme la Corée du Nord ou la Russie, mais ce n’est pas du tout le cas. Il s’agit bien d’une éducation à la citoyenneté, dont fait partie l’initiation au fonctionnement de la politique.
Est-ce qu’il existe des enseignements que vous avez pu tirer des expériences faites depuis fin 2016?
La conclusion est qu’il existe une importante demande qui est très variée. L’éducation à la citoyenneté est constituée par un très vaste champ de thématiques, avec notamment tout ce qui a trait à la société, avec le monde politique ou le vivre-ensemble dans un pays comme le Luxembourg.
Il s’agit d’expliquer le fonctionnement des institutions, ce qu’est l’État de droit, en quoi consistent les droits de l’homme et des citoyens… Nous traitons aussi des thématiques qui dominent l’actualité, que ce soit la guerre en Ukraine, les questions climatiques ou encore le phénomène des fake news propagées par Donald Trump. Il nous faut rester réactifs pour créer des offres afin de sensibiliser sur ces thématiques.
Votre public cible prioritaire est la jeune génération. Le ZpB peut-il toutefois, grâce à son action, aussi toucher un public plus large?
La question des publics cibles est identique à celle du défi lié à la multiplicité de thématiques qui sont à couvrir. Nous travaillons de manière prioritaire pour les jeunes avec des offres spécifiques qui s’adressent à eux. Nous avons également une offre qui s’adresse aux gens encadrant ces jeunes, y compris des jeunes adultes.
On a besoin de ces intermédiaires, en partie formés par nos soins, pour transmettre nos offres pédagogiques. Il est important d’entamer l’éducation à la citoyenneté dès le plus jeune âge. Au Luxembourg, l’avis a très longtemps prévalu que les mineurs, privés du droit de vote, n’ont aucun besoin ou intérêt à se familiariser avec le monde politique.
Or, il faut lancer la sensibilisation le plus tôt possible et, aussi, faire participer les jeunes à la vie politique, suivant la devise du ZpB : « Apprendre et vivre la démocratie.«
Vous pouvez dès lors confirmer que les jeunes s’intéressent toujours au monde politique, et plus généralement au fonctionnement de la société?
Cette question revient sans cesse. L’intérêt auprès des jeunes est bien présent. Or, ce qui a changé, c’est qu’ils ne s’intéressent plus aux formes traditionnelles de l’engagement politique. Il ne s’agit pas d’une nouvelle connaissance en soi. Il n’existe plus la volonté de s’engager sur le long terme. On est passés à un engagement plus spontané.
L’actualité politique intéresse les jeunes. Plus les thèmes les concernent directement, plus ils s’y intéressent. Il s’agit de tout ce qui a trait à la formation, au monde du travail ou encore au logement. Il existe toujours un lien avec la politique. Notre objectif est de leur démontrer que l’avis et la voix de tout un chacun peuvent peser.
Par conséquent, il est aussi important d’aller voter aux communales et législatives, même si les jeunes peuvent avoir l’impression que leurs « petites« voix ne comptent pas trop.
Le mouvement pour la protection du climat, très fort avant la pandémie, vient-il illustrer cet intérêt ciblé et spécifique des jeunes pour la politique?
On constate que les jeunes, mais aussi les adultes, se sentent très concernés par cette problématique. Les questions d’avenir peuvent susciter des angoisses, ce qui est toutefois à éviter dans l’éducation à la citoyenneté. Le climat est très fortement thématisé en politique et médiatisé dans la presse, nous en subissons déjà les premières conséquences. Les jeunes ne peuvent donc pas rester insensibles à cette thématique. Leur avenir est en jeu, ce qui explique la forte mobilisation connue avant la pandémie.
La politique à l’ancienne n’est donc plus quelque chose qui attire la jeune génération?
Les idéologies, le positionnement des partis à gauche ou à droite, sont quelque chose de très abstrait pour les adolescents. Le rôle des partis a aussi évolué. Les camps idéologiques se sont fracturés. Dans les années 80 et 90, il était encore beaucoup plus clair de savoir quel parti était de gauche ou de droite. La situation se présente autrement aujourd’hui.
L’intérêt des jeunes se porte souvent sur des aspects très pratiques. Ils veulent en savoir plus sur le fonctionnement du vote, comment est comptabilisée leur voix, en quoi consiste le travail d’un élu ou quel est le déroulement d’une séance plénière à la Chambre. Ces questions quotidiennes sont importantes pour comprendre le fonctionnement des institutions, le tout dans un contexte démocratique. Il est important de souligner que nous avons des élections libres, que l’on dispose d’une Constitution et que l’État de droit est respecté.
Au vu de ces enseignements, sentez-vous que les partis ont adapté leur campagne, voire leur approche envers les jeunes électeurs?
Il faudrait poser la question directement aux partis. Mais ce que l’on sait, c’est que les jeunes s’informent aujourd’hui sur d’autres plateformes. L’échange d’idées ne se fait plus forcément entre amis, mais sur les réseaux sociaux, avec tous les avantages et désavantages que cela amène. Je pense que les partis ont compris qu’ils doivent renforcer leur présence sur ces plateformes, car les jeunes ne vont certainement plus prendre en main un dépliant ou lire un programme électoral.
La société a fortement changé, ce qui impacte à la fois les campagnes électorales et notre travail d’éducation à la citoyenneté. En tout cas, l’intérêt des partis à participer aux activités proposées par le ZpB est important. Une ouverture existe donc, même si les partis continuent à défendre leurs idées, leur ligne ou idéologie.
Collaborer avec notre centre ne change rien à leur rôle, mais ils sont enclins à participer aux activités de sensibilisation et d’information que nous proposons en toute impartialité.
En partant de tous ces constats, comment le ZpB s’est plus précisément préparé à cette année électorale particulière, à commencer par les communales de dimanche?
Les travaux préparatifs ont été lancés très tôt. Du matériel déjà existant a été retravaillé et actualisé. Nous avons tenté de diversifier notre offre, aussi pour mieux atteindre les adolescents qui fréquentent une Maison des jeunes.
Auparavant, l’accent a surtout été mis sur les écoles. Il nous importe également de proposer des publications multilingues, en allemand, français, portugais, anglais, mais aussi en chinois ou serbo-croate, afin de toucher le plus grand nombre de personnes vivant au Luxembourg.
Cette approche a aussi permis de mieux informer les non-Luxembourgeois qu’ils disposent du droit de vote aux communales. L’information doit être courte, compréhensible et simple. Il est nécessaire de s’adapter aux réalités de notre temps.
Avez-vous aussi eu un rôle à jouer pour convaincre les citoyens étrangers de s’inscrire sur les listes électorales?
La tournée à travers le pays de notre « kermesse« électorale, la Super-Wal-Kiermes, un nouveau concept ludique du ZpB, était censée contribuer à l’information de ce public cible. Le fait de proposer une palette d’outils multilingue témoigne aussi de notre volonté d’intégrer les gens.
Le délai d’inscription passé, il importe désormais de continuer à informer les gens sur le déroulement du scrutin et de lever les barrières qui peuvent exister. Il est aussi important de souligner l’importance du vote, d’expliquer les modalités et éviter, ainsi, que l’absentéisme ne gonfle. Les communes œuvrent aussi beaucoup dans cette direction. Elles sont nombreuses à avoir eu recours à notre matériel d’information pour sensibiliser les électeurs.
Le ZpB prône également la participation citoyenne, un outil que tous les partis affirment vouloir renforcer. Un bon signe?
Dès le départ, nous avons dit que la participation est un pilier important de l’éducation à la citoyenneté. La participation est d’ailleurs le fil rouge de toute notre activité, qui ne se limite pas aux échéances électorales.
L’éducation à la citoyenneté doit aussi avoir lieu lors des années entre les scrutins. Dans les écoles, on soutient notamment les comités d’élèves. Nous soutenons cette même idée de la participation dans d’autres projets, même si le ZpB ne peut pas être présent dans l’ensemble des 100 communes du pays.
Il faudra toutefois voir ce que l’on pourra proposer après les élections communales. Il y aura certainement des demandes de communes pour renforcer la participation citoyenne à l’échelle locale. Tout ne pourra pas être décidé sur base d’une consultation globale des habitants. Néanmoins, la participation citoyenne ne peut pas se limiter aux seuls scrutins, ayant lieu tous les cinq (législatives) ou six ans (communales).
Comme en 2018, le ZpB va proposer en amont des élections législatives du 8 octobre, mais aussi des européennes de 2024, la plateforme Smartwielen.lu. Quel est l’objectif de cet outil interactif?
L’idée est de sensibiliser et informer les gens par le biais d’un autre outil que des publications classiques. Sur ce site internet sera proposé un questionnaire de 35 à 40 questions. Les réponses des utilisateurs vont être comparées avec les réponses données par les partis et candidats en lice. Le résultat final peut permettre d’orienter les électeurs.
Ils pourront en savoir plus si leurs positions correspondent à tel ou tel parti et candidat. Il m’importe de souligner qu’il s’agit d’un outil d’information. L’application ne force personne à voter en faveur du parti ou candidat qui se rapproche le plus des réponses données par l’utilisateur.
L’électeur peut se voir confirmé dans son choix de voter pour un parti X, mais il peut aussi s’apercevoir qu’il est plus proche d’un parti Y ou Z. Souvent, le résultat peut surprendre. Le questionnaire, qui peut être rempli facilement sur son téléphone portable, va être mis en ligne début septembre, environ un mois avant le scrutin.
cf commentaire 1. …et « élus » sans favoritisme, p.ex. fiancée de ministre dans voyage d’état, plagiat de mémoire du premier, vacances en voiture de service…!!! nee merci
sauf que il faudrait des gens et partis VOTABLES, sans corruption, intérêts privés, incompétence, enrichissement…