Les employeurs reprochent au front syndical de faire un déni de réalité économique. OGBL et LCGB mobiliseraient «pour que rien ne change». Le gouvernement est appelé à garder le cap.
«N’allez pas manifester samedi», a lancé Michel Reckinger, le président de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL)., mercredi matin, sur les ondes de RTL.
Il accuse l’OGBL d’avoir «figuré pendant 30 ans au cœur du pouvoir», en raison de la présence du LSAP au gouvernement. «Il ne l’est plus aujourd’hui, et cela déplaît» au premier syndicat du pays.
Le patron des patrons n’en est pas resté là, reprochant au front syndical de propager des «mensonges, demi-vérités et raccourcis» qui auraient pour seul but de «faire chuter le gouvernement».
Carlo Thelen, le directeur général de la Chambre de commerce, partage cet avis. Sur son blog personnel, il réfute les arguments de l’OGBL et du LCGB, qui clament que les pensions sont «en danger», que le pouvoir d’achat «souffre», que la vie privée et familiale est «finie» et que la sécurité sociale risque d’être «détricotée».
La manifestation nationale de ce samedi aurait pour seul objectif de «(s’opposer) à des réformes visant à moderniser et à faire progresser la société et le cadre socio-économique du pays». OGBL et LCGB, tout comme la CGFP, estiment que le «modèle social luxembourgeois est menacé».
«Ce n’est pas faux», affirme Carlo Thelen. En raison d’un net ralentissement de l’économie (croissance du PIB de 1 % en 2025, contre 2,5 % annoncés fin 2024) ainsi que d’une perte de compétitivité et de productivité, la pérennité des systèmes de pension et de santé serait bien menacée.
«Ainsi, la fragilisation de notre modèle social n’est pas la conséquence des projets récents proposés par le gouvernement, mais résulte de l’essoufflement de notre modèle économique et de l’absence de réformes structurelles ambitieuses (…)», avance-t-il.
Au lieu de surmonter cette épreuve ensemble, les syndicats «semblent rompre» avec la «tradition» du dialogue social et «tourner le dos à une réalité qu’ils ne veulent pas regarder en face».
Le camp syndical veut «tout diriger»
Carlo Thelen défend la réforme des pensions, la libéralisation des heures de travail et d’ouverture dans le commerce – il veut que le travail dominical soit ouvert à tous les secteurs – afin de «pérenniser» les emplois.
La Luxembourg Confederation (commerce), la Fédération des artisans et l’Horesca montent aussi au créneau. Les trois associations patronales estiment qu’il est «dangereux de faire croire que le modèle social pourra tenir sans réformes nécessaires».
Dans un communiqué, ils remettent en question la représentativité des syndicats, qui seraient «de moins en moins en phase avec les travailleurs». Maintenir le monopole de négociation des conventions collectives «bloque le dialogue social et freine la modernisation et la compétitivité de notre économie», avance le trio patronal.
Plus globalement, le camp syndical devrait renoncer «à tout vouloir diriger» et «imposer une vision à sens unique».
Le directeur de la Chambre de commerce appelle le gouvernement à ne pas plier face aux «bourrasques que veulent souffler» les organisations syndicales en ce 28 juin.
«C’est une mobilisation pour que rien ne change (…) Pour protéger des privilèges au détriment de l’intérêt collectif. Ce n’est pas ainsi que nous construisons l’avenir du Luxembourg», renchérissent les trois associations patronales précitées. Les élus sont invités à «ne pas céder aux pressions».
Pensions : un «statu quo irresponsable» et «pénalisant»
Selon les plus récentes estimations, le régime des pensions présenterait, dès 2026, un déficit de 100 millions d’euros. Le déséquilibre augmenterait à 300 millions d’euros en 2027.
Un épuisement de la réserve, qui se chiffre actuellement à quelque 30 milliards d’euros, est à prévoir durant la décennie 2040.
«La seule façon de sauver notre régime de pensions n’est certainement pas le statu quo irresponsable que prônent les organisations syndicales», souligne Carlo Thelen sur son blog personnel. «Travailler plus longtemps n’est plus une option, mais une nécessité (…)», ajoute-t-il.
Le collectif formé par la Luxembourg Confederation, la Fédération des artisans et l’Horesca reproche au front syndical de «pénaliser» les jeunes générations.
«Le refus complet de toute réforme (…) montre un manque de solidarité envers les jeunes. Les syndicats veulent garder leurs avantages, tout en fermant les yeux sur le déclin inévitable du système si rien n’est fait», accusent les trois associations patronales.