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Malvoyants : un centre à Bertrange pour gagner en autonomie


Le CDV dispose de plusieurs machines facilitant l’inclusion, notamment des ordinateurs spécialisés et des imprimantes 3D.

En cette journée mondiale du braille, zoom sur un centre spécialisé dans les troubles de la vue, situé à Bertrange, et qui fournit une aide précieuse aux malvoyants de tous âges afin de les aider à gagner en autonomie.

La déficience visuelle, qui va de la malvoyance à la cécité, peut avoir d’importantes répercussions sur le quotidien des personnes qui en sont atteintes : taux d’emploi plus faible (et donc risque de précarité), dépression, anxiété, isolement social, risque accru de chutes… Chez les plus jeunes, elle peut même entraîner des retards de développement moteur, psychologique, social, cognitif et du langage, et les enfants scolarisés peuvent avoir des niveaux de réussite inférieurs.

«Au Luxembourg, on estime qu’environ 10 000 personnes sont malvoyantes et 1 000 personnes sont aveugles, la plupart étant des personnes âgées. Ça fait beaucoup de gens concernés», annonce Frank Groben, directeur du Centre pour le développement des compétences relatives à la vue.

Le CDV, établi à Bertrange, est un lieu entièrement dédié aux personnes atteintes de déficience visuelle et qui ont besoin d’une aide. Ici, l’objectif est de leur permettre d’acquérir un maximum d’autonomie et, pour les enfants et adolescents, d’accomplir leur scolarité. «On accueille 380 élèves, âgés de 0 à plus de 80 ans», indique Frank Groben.

Le CDV, qui a ouvert ses portes en 1974, s’est vu confier une quarantaine de missions par l’État : diagnostic, dépistage, recherche, conseil (notamment aux professionnels de l’enfance et de l’éducation), formation pour adultes, fabrication de documents et d’objets spécialisés (comme les bulletins électoraux en braille)… Mais sa mission principale consiste à accompagner les enfants scolarisés jusqu’au secondaire. Accompagnement qui passe par une assistance ambulatoire en cours et au domicile, mais aussi par des cours collectifs au sein du CDV (comme le braille).

«Il faut du monde pour aider un seul élève», précise Frank Groben : «Par exemple, en cours de géographie, il faut parfois adapter chaque jour une carte pour chaque élève afin de répondre à des besoins qui lui sont propres. Un dessinateur, un orthoptiste pour les couleurs, un informaticien, un transcripteur, etc., peuvent être sollicités. C’est un véritable défi journalier!». Heureusement, à plusieurs niveaux, «la science et les technologies ont fait des progrès considérables. On dispose de solutions techniques et de beaucoup de machines pour permettre un travail d’inclusion», souligne le directeur.

L’élève ne sera pas abandonné à la fin de sa scolarité. «Nous avons une expertise pour l’enseignement secondaire, mais aussi pour la transition vers la profession. Il s’agit de préparer l’élève à intégrer le marché du travail, et pas dans des ateliers protégés», insiste le directeur du CDV.

Épidémie de myopie

L’enseignement non formel (sportif, culturel, musical) est également valorisé au CDV. Sydney Loes est pédagogue sportif. Il accompagne les enfants atteints de déficience visuelle dans leurs cours de sport à l’école ou au sein des clubs, et collabore avec les institutions sportives nationales dans le but d’élaborer des concepts et d’organiser des cours accessibles.

«C’est très intéressant de combiner la pédagogie spécialisée et le domaine des sciences sportives», témoigne le jeune homme. «Il faut garantir un cours accessible pour les enfants, ce qui signifie par exemple utiliser du matériel contrasté, faire attention à leur positionnement, en veillant notamment à ce qu’ils soient exposés à la lumière, face à des fenêtres… Évidemment, tout n’est pas possible : quand une classe joue au foot, je travaille individuellement avec l’élève, qui peut aussi s’entraîner avec un ballon émettant des sons.»

D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), au niveau mondial, les principales causes de déficience visuelle sont la dégénérescence maculaire liée à l’âge, la cataracte, la rétinopathie diabétique, le glaucome et les erreurs de réfraction (la forme de l’œil ou la cornée) non corrigées. Des études ont montré que des facteurs environnementaux ont un impact non négligeable sur les troubles visuels.

Ainsi, une véritable épidémie de myopie sévit dans les zones urbaines les plus développées d’Asie. En Corée du Sud, plus de 95 % des adolescents sont myopes, certains souffrant même d’une myopie très sévère pouvant conduire à la cécité.

En cause? La vision de près est de plus en plus sollicitée, au détriment de la vision de loin, principalement du fait du temps passé sur les tablettes et smartphones, et du mode de vie moderne qui conduit la plupart des gens à être trop souvent dans des endroits clos, de moins en moins exposés à la lumière du jour, pourtant essentielle au bon développement de l’œil. Les filles sont plus souvent touchées que les garçons, une des pistes étant qu’elles sont moins poussées à jouer à l’extérieur.

Selon plusieurs études, d’ici 2050, la moitié de la population mondiale sera atteinte de myopie. Sans surprise, «le Luxembourg n’échappe pas à cette évolution», même si «on reste dans des chiffres modérés, de l’ordre de 30 %», témoigne Frank Groben. Son conseil? «Regarder au loin et sortir autant que possible.»

Diagnostic

Au CDV, une équipe pluridisciplinaire, composée notamment de psychologues, d’un neuropsychologue, d’un orthoptiste basse vision et d’un rééducateur en psychomotricité, est chargée d’établir un diagnostic spécialisé, à la demande des personnes concernées (ou des parents lorsqu’il s’agit d’un enfant) ou à la demande du Comité national d’inclusion (CNI).

«Les troubles relatifs à la vue peuvent être dus à des troubles centraux (issus du lobe du cerveau) ou périphériques (de l’œil)», explique Frank Groben. Ce diagnostic complet permet de mesurer ce que l’élève est en mesure ou non d’accomplir et d’orienter sa prise en charge. Le CDV réalise aussi chaque année un dépistage auprès des enfants scolarisés en cycle fondamental 2.1.