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[LuxFilmFest] Un court métrage en 48 heures chrono


La plupart des scènes ont été tournées en une seule journée. (Photo Jérémie Nadé)

Réaliser un film en 48 heures, c’est le principe du Lost Weekend organisé durant le LuxFilmFest. Un sacré challenge pour l’une des équipes, Reakter, qui se frottait pour la première fois à ce genre de contrainte.

«La même prise, la même chose mais en plus agressif.» Attablé sur un balcon, le petit groupe se remet en place. Ce samedi matin, vers 10 h, Ismael et son équipe viennent de tourner la première prise de leur futur film. Ils doivent se dépêcher, tout doit être terminé d’ici dimanche soir. Flashback : vendredi, le groupe avait rendez-vous au Cercle Cité à 19 h pour le lancement du Lost Weekend. Organisé durant le LuxFilmFest, celui-ci consiste en une compétition de courts métrages qui doivent être réalisés en deux jours (voir encadré). Ismael, Pascal, Doha, Blue, Anaïs, Célia, Sainey et Derci forment l’équipe Reakter. Au moment de tirer un genre au sort, ils tombent sur le film criminel et Pascal explose de joie. «Le crime, c’est quelque chose qui est dans tous nos films», explique l’acteur.

S’ils sont jeunes, aux alentours de la vingtaine pour la plupart même si certains sont plus âgés, tous ont déjà quelques productions à leur actif. En revanche, seul Ismael a déjà participé au Lost Weekend. «Je ne connaissais pas trop les gens avec qui j’ai travaillé l’année dernière, cette fois, je suis mieux préparé.» Une partie du groupe s’est formée au fil des rencontres, à l’école ou sur différents projets, et beaucoup aimeraient percer dans le milieu du cinéma. Le Lost Weekend est l’occasion parfaite pour eux de se mesurer à d’autres cinéastes.

La soirée terminée, la petite équipe se lance avec enthousiasme dans les rues de la capitale et cherche un endroit où se poser. C’est finalement dans un parc, à la lumière des téléphones portables, que les premières discussions commencent. Ismael a déjà écrit le brouillon de plusieurs rôles potentiels et les expose à son équipe. Chacun apporte ses idées sur la caractérisation des personnages et sur les premiers éléments du scénario : une histoire de faux dealer et de tueur.

Les premières divergences apparaissent et une canette de Redbull finit par servir de bâton de parole pour simplifier les débats. Une fois les bases posées, reste à choisir un lieu de tournage. Une maison serait idéale mais devant les difficultés pour en trouver une, l’équipe se rabat sur l’appartement de Doha, à Schuttrange, où ils se donnent rendez-vous le lendemain.

Une compétition ouverte à tous

Chaque année, en plus de devoir réaliser entièrement un film de sept minutes, chaque équipe doit se soumettre à certaines contraintes. Tout d’abord, elles tirent toutes au sort un genre précis qui peut aller de la comédie au documentaire en passant par le conte de fées, la science-fiction ou la comédie musicale. Ensuite, tout le monde devra respecter un thème imposé et incorporer un accessoire ainsi qu’une réplique. Pour cette sixième édition, c’est le thème «Way too comfortable» (Un peu trop confortable) qui a été choisi tandis que chaque film devait comporter un amas de cheveux et le dialogue : «Gardons ça entre nous».

Dix-huit équipes, pouvant aller jusqu’à une vingtaine de personnes, étaient en lice cette année. «Beaucoup reviennent d’une édition à l’autre», explique Joanne Steib-Wiesenfeld, responsable des projets événementiels sur le LuxFilmFest. Si des professionnels sont présents, beaucoup de jeunes, comme l’équipe de Reakter, se frottent aussi à la compétition avec l’envie de montrer qu’ils peuvent rivaliser avec des équipes plus chevronnées.

Une livraison en dernière minute

La journée de samedi est entièrement consacrée au tournage. L’équipe s’agrandit avec l’arrivée de Mo à la caméra. Âgé de 48 ans, un étrange air de ressemblance avec l’artiste français JR, il a une solide expérience dans le cinéma, ayant notamment travaillé à New York. Ami d’Ismael, il a accepté son invitation pour faire profiter de son expérience et de son matériel. «Le cinéma au Luxembourg a besoin de plus d’initiatives de ce genre. Je voulais apporter ma contribution.» Entretemps, le scénario a encore évolué. «L’histoire a complètement changé!», souffle Doha.

Entre soucis d’accessoires et divergences créatives, les premières difficultés apparaissent si bien qu’en début d’après-midi, peu de scènes ont été tournées. Un découragement passager se fait sentir au sein de l’équipe, mais le reste la journée va les remettre en selle. Il le faut, car arrive l’un des scènes les plus complexes : une tuerie dans l’appartement. Son pistolet factice pointé vers la caméra, Pascal prend des airs de tueur.

Au début, on part dans tous les sens et après ça s’organise

Au bout de quelques ajustements, tout est dans la boîte. Reste à filmer la succession de meurtres pour compléter la scène. Chacun prend ses marques et si l’équipe n’est peut-être pas la plus organisée du concours, elle se rattrape avec son enthousiasme et son envie de prouver aux autres qu’elle mérite tout autant sa place. Bien que le film continue d’évoluer au fil des prises, on sent que Reakter atteint sa vitesse de croisière et que tout le monde commence à prendre du plaisir. «C’est toujours comme ça!, affirme Anaïs. Au début, on part dans tous les sens et après ça s’organise.» Un poil démotivée quelques heures plus tôt, Doha retrouve le sourire. «Vous avez géré ça! On va finir cette journée en beauté!»

Le reste du tournage continue en extérieur et se prolonge jusqu’au dimanche après-midi. En parallèle, Mo et Ismael s’occupent du montage final du film. Mais alors que tout semblait prêt, un dernier rebondissement va mettre les nerfs du groupe à rude épreuve. Un contretemps technique manque de leur faire rater la deadline pour rendre le film.

Heureusement, Planta o plomo, qui raconte l’histoire d’un gang de dealers en guerre contre de supposés concurrents, est finalement livré dans les temps. «On va l’avoir ce prix», lance Blue, soulagé comme le reste de l’équipe. Ne reste plus qu’à convaincre le jury pour terminer sur une happy end lors de la projection ce soir.