Une première qui vise à se transformer en rendez-vous régulier ? Le LuxFilmFest a dédié une soirée aux prochaines séries (co)produites au Luxembourg, entre récits engagés et projets ambitieux.
C’est assurément, à l’échelle nationale, l’un des évènements majeurs dans l’évènement : dimanche, le LuxFilmFest a fait la part belle aux séries avec un premier «showcase» de trois nouvelles (co)productions attendues courant 2025 sur les écrans de télévision luxembourgeois. Selon son directeur artistique, Alexis Juncosa, le festival cherchait «depuis longtemps» à franchir le pas en intégrant le format sériel à l’intérieur d’un programme connu aussi pour être la vitrine de choix du panorama audiovisuel luxembourgeois.
La série, «nouveau format de narration», avait déjà fait l’objet de deux rendez-vous par le passé, en 2018 avec les deux premiers épisodes de Bad Banks, puis à l’occasion d’une «Capitani Night» pour sa deuxième saison en 2022 – deux productions qui ont mis le Luxembourg sur la carte de la création télévisuelle.
Placé sous le signe d’un hommage à Steve Schmit, directeur des contenus de RTL emporté prématurément par la maladie fin 2024, et dont «l’enthousiasme, l’énergie et le sens de l’innovation» ont été un moteur de l’engagement de la télévision nationale pour ce format populaire représenté par des œuvres de qualité, ce premier «showcase» de séries «made in/with Luxembourg» a présenté la série historico-fantastique portugaise Finisterra, la collection de courts documentaires Hometowns et le thriller d’espionnage allemand Dangerous Truth.
Finisterra, c’est pas sorcier

(Photo : take it easy-wild fang films)
En 1943, dans un Portugal déclaré neutre dans la Seconde Guerre mondiale, des raids aériens allemands près d’un village côtier de la région de l’Algarve terrorisent la population. Celeste (Leonor Vasconcelos), une orpheline, est accusée d’être responsable du mal qui s’abat sur Aljezur, dont le passé récent a été marqué par la sorcellerie. Dans une région qui cache de sombres secrets, la jeune fille, qui se lie d’amitié avec un pilote américain recherché par les nazis, tente de percer le mystère sur la mort de ses parents.
«Ce projet est né d’une profonde amitié avec (le coscénariste et coréalisateur) Leone Niel», explique Guilherme Branquinho, également créateur de Finisterra. Avec cette série coproduite au Luxembourg par Wild Fang Films, les auteurs souhaitent «toucher des questions à un niveau social – quelles sont les limites de la vérité : si tout le monde croit en quelque chose, est-ce que ça le rend vrai? – et personnel – suis-je ce que tout le monde dit que je suis, ou y a-t-il quelque chose en moi qui me rend unique?».
Jouant sur deux tableaux, entre l’ampleur requise par la dimension historique du récit et le langage du cinéma fantastique, Finisterra joue la surenchère du mystère dans son premier épisode, mais pique suffisamment la curiosité pour donner envie de découvrir le reste. Cela tombe bien : les sept épisodes de 45 minutes, dont la diffusion a démarré hier soir au Portugal, seront diffusés à partir de samedi sur RTL.
Hometowns voit enfin le jour

(Photo : CNA)
En 2024, Lukas Grevis présentait au LuxFilmFest son premier long métrage, D’Land am Schiet, qui mélangeait les thématiques des réfugiés, du racisme et de la radicalisation dans le microcosme d’un village fictif, mais bien ancré dans la réalité luxembourgeoise. Le festival présente cette fois les «vrais» débuts du jeune cinéaste, à la création et à la réalisation du premier épisode de Hometowns, une collection de six documentaires courts avec lesquels, a-t-il indiqué, «on ne pose pas un regard sur des personnes qui sont venues au Luxembourg en tant que réfugiés : on pose un regard sur des gens, tout court». Soit Yasmine, Badr, Omar et d’autres «jeunes adultes qui ont dû fuir leur pays d’origine» et qui ont trouvé refuge au Grand-Duché, en cherchant à y vivre leurs rêves et leurs espoirs.
Produit par le Centre national de l’audiovisuel (CNA) et soutenu par le multi-LEARN Institute «à un moment où le Luxembourg était un exemple en matière d’accueil et de soutien des réfugiés», Hometowns a mis du temps à voir le jour; mais bien que tournés en 2018-2019, les épisodes «arrivent au moment opportun, au vu de ce qui se passe aujourd’hui dans le monde», a déclaré la productrice, Mylène Carrière.
Si la série reste marquée par une forme d’amateurisme que l’audiovisuel national est censé avoir laissé derrière lui – la faute à des artistes trop jeunes, encore au lycée pour certains, un format court pas vraiment adapté à l’ampleur du sujet et un budget de la débrouillardise (1 000 euros par épisode) –, elle a le mérite de présenter des trajectoires de vie poignantes et d’avoir fait naître la prochaine génération de cinéastes engagés sur qui le Luxembourg pourra compter (Catherine Dauphin, Akim El Ouardi…). Encore sans date de diffusion, la série devrait être visible sur RTL courant 2025.
Dangerous Truth, attente de taille

(Photo : deal productions)
L’actualité côté télé de Deal Productions, la société de Désirée Nosbusch et Alexandra Hoesdorff, a de quoi être éclipsée par son actualité côté ciné, avec la présentation de Poison, accompagné ce soir au LuxFilmFest par ses acteurs principaux, Tim Roth et Trine Dyrholm (le film sortira le 19 mars dans les salles du pays). Mais Dangerous Truth, série d’espionnage coproduite et tournée entre l’Allemagne, le Luxembourg et la Grèce, est présenté par Alexis Juncosa comme «un énorme évènement» – en tout cas, «une exclusivité» réservée au public du festival. Et pour cause : la série est actuellement l’une des plus en vue sur le marché international. Le résultat est, lui, à la hauteur de l’attente – compte tenu, une fois encore, qu’il fallait se satisfaire de la diffusion d’un seul épisode, à peine une mise en bouche.
Basée sur une histoire vraie, la série suit Alex, un jeune Allemand forcé de vivre depuis 20 ans à Athènes sous une fausse identité à la suite du meurtre d’une partie de sa famille dans une attaque terroriste, et qui va se lancer dans une dangereuse course à la vérité. Le programme de six épisodes, solidement mis en scène par l’Autrichienne Barbara Eder, n’a pour l’heure pas de diffusion prévue au Luxembourg, mais y a été tourné en bonne partie – dont «une impressionnante scène de fusillade sur la place de l’Europe», prévient Alexandra Hoesdorff – et compte nombre de noms bien connus au pays dans son casting (Luc Schiltz, Jules Werner, André Jung…) et son équipe (dont la bande originale de Kyan Bayani). Une grosse attente, oui, à plus d’un titre.