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Luxembourg : une manifestation pour faire payer Amazon


Une trentaine de manifestants étaient en centre-ville. Mais entre le Black Friday et le temps gris, peu de gens se sont arrêtés pour les écouter.  (Photos: alain rischard)

Plusieurs organisations se sont réunies à Luxembourg pour protester contre les suppressions d’emplois et la politique d’Amazon tout en appelant les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités.

La date n’a pas été choisie au hasard. Alors que le Black Friday bat son plein, une trentaine de militants se sont installés au croisement de la Grand-Rue et de la rue des Capucins à Luxembourg pour manifester. L’objet de leurs critiques est une entreprise qui profite pleinement de cette journée de remises plus ou moins avantageuses : le géant Amazon.

La firme de Jeff Bezos est dans le collimateur de nombreux acteurs luxembourgeois en particulier depuis qu’elle a annoncé 14 000 licenciements, dont 470 pour le seul Grand-Duché (soit 10 % des effectifs). À l’appel de la coalition Make Amazon Pay, qui organise des actions dans le monde entier chaque année pour le Black Friday, l’ASTM, le CELL, le Collectif Palestine Luxembourg, le collectif Tax Justice Lëtzebuerg, déi Lénk, etika, le département des jeunes de l’OGBL, Greenpeace Luxembourg et Rise for climate se sont donc réunis ce vendredi entre 12h30 et 14h.

Une amende record

Si la mobilisation conteste avant tout les suppressions d’emplois dans le pays, et demande au géant de garantir la sécurité des emplois locaux, la liste des griefs contre Amazon est longue. Les manifestants ont notamment rappelé que la société a aussi écopé d’une amende de 746 millions d’euros par la CNPD (Commission nationale pour la protection des données) pour violation des données personnelles. Cette sanction est à ce jour la plus lourde jamais infligée par une CNIL européenne à l’un des GAFAM et les militants souhaitent qu’Amazon la paye en intégralité.

L’optimisation fiscale, qui permet à Amazon d’économiser des sommes considérables, ne passe non plus. «L’équité fiscale, c’est hyper important et pas seulement pour Amazon, rappelle Benjamin, membre des Jonk OGBL. On ne peut pas permettre à une entreprise de ne pas être imposée.»  Pour lui, Amazon est devenue tellement importante dans la vie des gens qu’elle se doit de contribuer à la société.

Greenwashing et soutien à Israël

Le greenwashing d’Amazon est aussi pointé du doigt. L’entreprise de Seattle communique régulièrement sur ses supposées prouesses en matière d’environnement, notamment dans l’utilisation des énergies renouvelables. La réalité est bien moins verte puisque l’entreprise achète massivement des certificats d’énergies renouvelables pour compenser l’électricité qu’elle consomme. Ses déclarations de consommation d’eau, d’énergie et d’émissions carbone sont également largement sous-évaluées.

Une position qui irrite particulièrement Léonard Andersen, coordinateur responsable de la transition énergétique au sein de Cell ASBL. «Amazon se doit d’être plus transparente et de poser des objectifs ambitieux.»

Mais pour lui, ce ne sera possible qu’avec des outils de reporting efficaces pour mesurer les progrès réalisés. «Nous avons donc des revendications envers le législateur. Car Amazon joue aussi avec les règles qu’on lui donne.» Le reporting actuel n’est pas suffisant et a besoin de vrais experts externes pour pouvoir mieux contrôler les GAFAM.

Membre de déi Lénk et de BDS Luxembourg, un mouvement qui appelle au boycott d’Israël et des entreprises qui la soutiennent, Marc Burggraff a quant à lui fait un discours sur les liens entre le gouvernement de Benyamin Netanyahou et Amazon. Il dénonce notamment le projet Nimbus lancé par Google et Amazon. Né en 2021, celui-ci fournit des solutions de cloud et de stockage de données théoriquement à des fins civils. «Mais une enquête du Guardian a prouvé qu’elles étaient aussi utilisées par l’armée dans le cadre de la guerre à Gaza.» Avec d’autres militants, il demande donc l’arrêt de ce projet.

Le même jour, le ministre du Travail, George Mischo, a rencontré les responsables d’Amazon pour trouver une solution face aux licenciements et les inciter à privilégier un plan de maintien dans l’emploi. Mais les militants n’attendant pas grand-chose du gouvernement, notamment depuis la rencontre entre Luc Frieden et le CEO d’Amazon, Andy Jassy. Si le Premier ministre affirme maintenir le dialogue, les organisations militantes y voient surtout une «soumission naïve» de l’exécutif face au géant américain.

La manifestation a pu donner lieu à des scènes cocasses, où militant et livreurs se retrouvaient côte à côte.

Un message géant projeté sur le siège d’Amazon

La veille de la manifestation, des militants de Greenpeace ont projeté un message géant sur la façade du siège européen d’Amazon, ainsi que dans le Grund à Luxembourg. Les passants ont ainsi pu lire en anglais : «Jeff Bezos is hiding a secret… Amazon isn’t just a store. It’s a prime tax avoider that helps Israel’s military with data and cloud services. No tech for genocide. Time to resist.»

Un message qui rappelle les stratégies d’optimisation fiscale pratiquée par la firme américaine, ainsi que l’usage présumé de ses services par le gouvernement israélien dans le conflit contre Gaza. «En plus d’être une championne de l’optimisation fiscale, la multinationale de Jeff Bezos est un exemple flagrant de l’impact destructeur des GAFAM sur les populations et la planète», a rappelé Xavier Turquin, directeur exécutif de Greenpeace Luxembourg.

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