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Luxembourg : un imprimeur monégasque suspecté de faux et usage de faux


Dominique prétend que José Ramon, aujourd’hui décédé, lui a envoyé le chèque falsifié. José Ramon, au casier judiciaire éloquent avait nié face aux policiers. (photo archives LQ/Fabrizio Pizzolante)

Un chèque falsifié, un prévenu au passé trouble décédé et un imprimeur à la recherche d’investisseurs, le coupable de cette escroquerie semble tout désigné.

Dominique est un imprimeur monégasque. En partenariat avec un ancien champion de ski, il veut créer un domaine skiable. Les deux hommes ont les idées et les terrains, mais pas suffisamment de fonds. C’est là qu’intervient José Ramon. L’homme évoque ses amitiés avec de riches hommes d’affaires mexicains, fait miroiter les milliards et propose d’investir dans le projet de Dominique. Tout va pour le mieux jusqu’à ce qu’un chèque American Express de 480 000 euros fasse son apparition dans une agence de la BIL.

Le prévenu l’y dépose pour l’encaisser au bénéfice d’une de ses sociétés le 27 février 2014. Il répartit l’argent sur les comptes de différentes entreprises lui appartenant également. Or ce chèque était au départ un chèque de 14 cents d’euro adressé en janvier 2014 par American Express par courrier à un de ses clients qui venait de clôturer son compte. Le chèque a donc été suffisamment bien falsifié pour tromper la vigilance des employés de la Banque internationale de Luxembourg (BIL). American Express porte plainte. Une enquête est lancée.

Dominique prétend avoir reçu le chèque de José Ramon qui est décédé pendant l’instruction. Ce dernier avait nié avoir envoyé le chèque falsifié au prévenu représenté par Me Lorang face à la 19e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Le mystère plane quant à l’identité du faussaire et la manière dont il a mis la main sur le chèque.

«Le fait que le prévenu soit imprimeur ne fait pas de lui un faussaire ou un coupable», le défend Me Lorang, énumérant les nombreuses inscriptions pour faux et usage de faux ou encore blanchiment en bande organisée figurant au casier judiciaire de José Ramon contre qui toute action publique est éteinte depuis son décès. «Le doute doit lui profiter aussi», plaide l’avocate. Dans son réquisitoire, la représentante du parquet avait fait part de ses doutes quant à la participation de José Ramon aux faits, malgré son passé judiciaire. «Il y a trop d’inconnues dans cette histoire pour assurer avec certitude qu’il a participé à l’escroquerie.»

Les banques accusées de négligence

Dominique aurait en revanche eu les moyens et les connaissances techniques suffisantes pour falsifier le chèque, selon elle. Dans le cas contraire, en tant qu’imprimeur, il aurait dû voir la falsification. Il aurait également fait pression à sa banque pour que l’argent lui soit rapidement transféré. Et des conversations entre les deux hommes tendent à prouver que José Ramon aurait à tout prix voulu récupérer les 480 000 euros à peine la banque les avait-elle versés sur le compte de Dominique, rétorque Me Lorang. Selon elle, «Dominique a été naïf» et la victime d’une escroquerie. «Je suis peinée qu’au vu du casier judiciaire de José Ramon, on présente Dominique comme le méchant», regrette l’avocate.

La magistrate a estimé que les infractions de faux et usage de faux, ainsi que d’escroquerie et de blanchiment étaient données à l’encontre de Dominique. Elle a requis une peine de 15 mois de prison à son encontre et une amende. Elle ne s’est pas opposée à un sursis. Le dossier ayant «traîné» depuis 2017, elle a fait valoir le délai raisonnable.

«Quinzemois, c’est encore trop», a jugé Me Lorang qui a plaidé en faveur de l’acquittement total de son client. Elle reproche à la magistrate «une absence de faisceau d’indices concordants». «Vous n’êtes pas en mesure de prouver qu’il est coupable», note-t-elle. «Rien ne prouve qu’il savait que le chèque était un faux. Même la banque ne s’en est pas rendu compte.»

Quant à la demande de partie civile formulée par American Express pour récupérer les 480 000 euros moins les 14 cents, l’avocate la rejette énergiquement en accusant l’établissement bancaire d’avoir fait preuve de « négligence » en envoyant son chèque par la poste comme on le suppose lors de l’enquête. Elle encourage American Express à contacter la BIL qui aurait, selon elle, également agi avec négligence en versant la somme d’argent à Dominique.

Le prononcé est fixé au 14 octobre prochain.