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Luxembourg Song Contest : sept candidats et un seul ticket pour l’Eurovision


Les sept finalistes du Luxembourg Song Contest s’affronteront ce samedi 25 janvier sur la scène de la Rockhal.

Ils étaient 53 au départ, ils ne sont plus que sept : le Luxembourg Song Contest retrouve ses droits pour une finale qui ne verra qu’un seul candidat décrocher son billet pour Bâle et la 69e édition de l’Eurovision. Tour d’horizon de ceux qui s’affronteront demain soir à la Rockhal.

Sacré héritage!

C’est l’un des grands moments de l’Eurovision : on est en 1965 et France Gall, pas encore 18 ans, gagne l’Eurovision pour le Luxembourg avec Poupée de cire, poupée de son. Elle le mérite car en Italie, elle a vécu un enfer : l’attitude du compositeur Serge Gainsbourg, l’orchestre qui la hue, son compagnon, Claude François, qui rompt avec elle parce qu’«elle chante faux», sans oublier la gifle qu’elle reçoit en coulisses par une candidate.

Les yeux ronds, Laura Thorn ne connaissait pas toutes ces anecdotes, ce qui la motive d’autant plus : «Du coup, je suis une sorte de vengeresse!», lâche-t-elle. Car le morceau qu’elle défend, rien que par son titre, ne cache pas ses intentions : La Poupée monte le son veut rendre hommage à la chanteuse française, soixante ans après les «yéyé».

Un pied dans le passé, un autre dans le présent : voilà l’équilibre auquel la jeune artiste de 25 ans se plie, elle qui, danseuse, a pris l’habitude des contorsions. «Quand on songe à une poupée, on imagine une marionnette, quelque chose sans vie, contrôlée de l’extérieur. Chez moi, elle prend le pouvoir : elle a une voix et la fait entendre!»

Une «figure moderne» qui semble plaire, puisque Laura Thorn est actuellement favorite pour la finale du LSC. Mais elle ne s’en vante pas. Dans un rire, elle reconnaît «atteindre ses limites» dans un show «complexe» qui demande une sacrée «condition physique». «On ne s’en rend pas compte, mais il y a du boulot sur trois petites minutes!»

Originaire de Namur, elle se marre quand on lui rappelle les échecs répétés de la Belgique à l’Eurovision, comme en 2024 où Mustii n’a pas passé le stade des demi-finales. «Je suis une transfuge!», lâche-t-elle, croyant que le Luxembourg est le pays qui a le plus souvent gagné le concours. En cas de succès, elle va devoir réviser ses gammes.

Nouveaux horizons

Je danse, la petite perle pop que Luzac présentera demain soir au LSC, est, pour le principal intéressé, «déjà une manière de sortir de (s)a zone de confort». Reste à savoir ce qu’est au juste la zone de confort de cet artiste caméléon : ses singles démontrent sa passion pour le rap et le R’nB tendance pop, et il souligne être «fan» de l’Eurovision depuis 2009 et la victoire du Polonais Alexander Rybak – ayant commencé la musique par l’apprentissage du violon, il y a vu un signe.

Celui qui a choisi il y a trois ans de s’investir à fond dans sa musique avait déjà tenté l’aventure LSC en 2024 pour «échouer aux portes de la finale». «Depuis, j’ai pris des cours de chant, préparé d’autres musiques, collaboré avec d’autres personnes…» Autant d’initiatives qui lui ont «ouvert l’esprit», dit-il, assurant aujourd’hui être «prêt» et «confiant».

Le garçon de 27 ans a pu s’entourer de deux coauteurs sélectionnés «au hasard», mais non moins de choix : Edsun, référence nationale de la pop urbaine, et Linda Dale, la Norvégienne derrière The Code de Nemo, vainqueur à Malmö du dernier concours Eurovision.

Au trio s’ajoute le producteur irano-néerlandais Alireza Baghdadchi, qui complète ainsi un «mélange incroyable de différents horizons, géographiques et musicaux». Leur «alchimie folle, immédiate» a été un cadeau pour Luzac, qui tenait en outre à chanter en français.

«C’est la langue qui me ressemble le plus. Dans une compétition où beaucoup sont naturellement tentés par l’anglais, mon choix est légitime, c’est une force», abonde le Belgo-Luxembourgeois aux origines tunisiennes. Sa chanson, qui narre l’histoire d’une «relation toxique entre une femme et un homme», serait donc celle qui «a le plus gros potentiel pour mettre en place un vrai show». Qu’on attend avec impatience.

À fleur de peau

Elle est la plus jeune des finalistes. Alexia Rodrigues, 23 ans, a la tranquillité de l’outsider, celle pour qui être là est déjà «une victoire». Elle part de loin, n’a rien à perdre et le sait. Il y a peu, elle se destinait seulement à sa formation d’institutrice à Bastogne. Avant cela, jeune fille, elle embrasse le violon, la flûte traversière et la peinture, puis tombe amoureuse du chant.

Elle quitte alors l’ombre de l’orchestre de Dudelange pour s’offrir le grand frisson devant 400 personnes. Elle se souvient de la chanson : Saving All My Love for You, de Whitney Houston.

Elle avoue adorer «faire le show». «L’Eurovision, ça tombe sous le sens, non?», se marre-t-elle. Malgré son assurance, elle sait qu’elle a mis les pieds dans une grande machinerie. Elle en a découvert les rouages l’an dernier avec le morceau Stay, bloqué au stade des qualifications.

Qu’importe! Elle a pris rendez-vous pour 2025 avec cette envie de passer par la grande porte. Elle y parvient grâce à ses «amis suédois», Mattias Skantze et Robin Larsson, auteurs-compositeurs qui lui concoctent un titre sur mesure : Human Eyes, inspiré d’une séparation qu’a connue la chanteuse.

Une chanson qui lui remue toujours les tripes, et tant mieux : «J’avais un mois devant moi pour la travailler, mais j’étais tellement motivée qu’en deux jours, c’était plié!» Depuis, au gré de multiples retouches, son morceau résonne avec justesse, malgré la pression propre à l’évènement.

Mais elle se le répète inlassablement : «Une scène, ça reste une scène!», et samedi, promis, Human Eyes portera en elle toute «l’émotion» propre à une rupture sentimentale. «Je vais donner des proportions folles à mon histoire!» En cas de succès, elle pourra même y ajouter de nouvelles lignes.

Seule en scène

Elle se balade avec précaution, perchée sur des hauts talons qui la torturent («J’attends dimanche pour mettre mes pieds dans la glace!»). Mais elle sait où elle va… Et pour cause, Rafa Ela a connu le LSC en 2024, décrochant une place en finale avec la chanson Drop et sa partenaire Angy, devenue depuis «comme une sœur».

Au point d’avoir des larmes pour elle quand cette année, elle apprend que celle-ci doit se contenter d’une place d’honneur. «J’étais triste car j’ai beaucoup appris à ses côtés. Je continue le chemin toute seule…».

Cependant, elle avait déjà fait un bout de route en solitaire avec des concerts donnés au Luxembourg et au Portugal, ainsi que deux singles sortis ces derniers mois (Storm Clouds et See Us Not). Elle les présentera d’ailleurs au jury qui, lui, craquera pour un autre (et ancien) morceau : No Thank You.

Un titre remuant aux airs latin-pop sur le pouvoir et l’indépendance des femmes, concocté en Suède par Christoffer Jonsson et Johan Jämtberg. Voilà plus d’un an que Rafa Ela le connaît, le travaille, le répète, encore et encore. Et le voit aussi grandir : «Pour l’Eurovision, une chanson doit avoir une marge de progression». Elle y a donc insufflé de nouveaux vocaux, tandis que le tandem aux manettes y a mis «plus de percussion, plus de puissance».

Au final, la promesse d’une explosion, un grand «boum» qui risque de secouer la Rockhal et le public devant sa télévision. Avant d’y être, la chanteuse, pas égoïste, a partagé son expérience passée avec les autres candidats, fidèle à ce qu’elle appelle «la famille». «On vit ces moments intenses ensemble : il faut se soutenir!»

Car pour elle, la soirée de samedi doit se résumer à une expression : «Having fun!». Du plaisir, des déhanchements et un show sans fausse note : la recette pourrait être payante.

Énergie renouvelée

Après sa performance enflammée au dernier Luxembourg Song Contest (Devil in the Detail), avec sa grosse dose de guitares rugissantes et de pyrotechnie, One Last Time n’a, malgré son nom, pas dit son dernier mot. De retour en finale avec Gambler’s Song, le quintette a dans l’idée de mettre une nouvelle fois le feu, quoique différemment.

«On ne peut pas nous comparer aujourd’hui à ce qu’on était il y a un an», assure d’ailleurs Barbara Salvi. Son comparse Andrea Galleti lui fait écho : «On est bien mieux préparés, y compris mentalement.»

Grâce, entre autres, à des ateliers d’écriture «au Luxembourg, mais aussi en Norvège, en Espagne et en Belgique», qui ont fait grandir le groupe – au point qu’il a aussi pris le temps de concevoir un premier album, Between Horizons, qui doit sortir dans quelques jours.

À la croisée du rock alternatif, du hard rock et de la pop, One Last Time, conscient qu’il est «encore un jeune groupe», sait aussi combien il a «pris du niveau» par la grâce de deux années de suite dans le giron de l’Eurovision.

«Le Luxembourg Song Contest nous a changé à tous les niveaux, dans l’écriture, la composition, la présence scénique, le soin que l’on met dans nos performances, analyse Barbara. C’est une chance. Mieux, un privilège!» Avec Gambler’s Song, concocté avec la même équipe que leur précédente entrée au LSC, le groupe garde intacte l’énergie bourrine et libératrice du rock, en mettant cette fois en avant le pouvoir de l’électronique, toujours combinée, forcément, à la puissance amplifiée des cordes métalliques.

One Last Time, version 2.0, promet d’en donner un bel aperçu demain soir, et donne déjà rendez-vous le 8 février, toujours sur cette scène de la Rockhal qu’ils connaissent bien, pour la «release party» de leur album. Ultime promesse : «Plus qu’un simple concert, ce sera un vrai show.»

Croissance accélérée

Il ne faut pas se fier aux apparences : Rhythmic Soulwave ne sont pas cinq mais bien six, car le jour de la photographie officielle, le trompettiste, Leopold, a dû filer à la va-vite pour un concert. «La vie d’un musicien, c’est une course!», sourit Angela, violoniste et dernière arrivée dans le groupe, qui a le sens de la formule.

De son charmant accent espagnol, elle déroule l’historique : une «camaraderie» née sur les bancs du Conservatoire de Luxembourg et une passion partagée pour la soul comme le funk, que la formation exprime dans des reprises d’Amy Winehouse ou de Black Pumas. Car il y a une vie en dehors des cours et la pratique théorique, pas la plus «plaisante».

Depuis un an, le collectif cherche ainsi à composer ses propres chansons, et commence à sortir de sa réserve, comme cet été lors de la fête de la Musique. Et en participant au LSC, son message est clair : il n’y a pas de frontières à l’art.

Car Rhythmic Soulwave ne correspond pas vraiment aux standards de l’Eurovision, plus pop et plus tape-à-l’œil. Sa connexion avec l’évènement, il le doit à sa chanteuse Carmen, qui n’est autre que la grande sœur de Naomi Ayé, présente en finale du LSC en 2024 avec Paumée sur terre.

Ensemble, elles écrivent Stronger, chanson qui porte un message qui compte pour le groupe : «Grandir, devenir plus fort!». D’où sa présence demain à la Rockhal, qu’il voit comme une étape supplémentaire à sa croissance : «C’est comme une audition, une expérience de plus qui solidifie notre amitié», dit-elle.

Forcement, leur morceau a pris de la carrure à travers une plus ample orchestration. Pour le reste, si elle défend des valeurs comme «l’acceptation, la diversité et la liberté», on sera loin de la prestation de l’Espagne à Malmö, avec cette séance d’effeuillage sur canapé. «J’en rougis rien que d’y penser!

Fidèles à eux-mêmes

Ils se définissent comme les «grands frères» de ce Luxembourg Song Contest. «Les grands-pères, même!», rigole Kiko Menichetti, chanteur du trio folk-country Zero Point Five. Et pour cause : formé en 2009, le groupe a sorti deux albums, un EP, nombre de singles… et reste l’une des formations luxembourgeoises les plus présentes sur scène, y compris à l’international. Quoi qu’il en soit, l’aventure Luxembourg Song Contest n’a, pour eux, rien d’une formalité.

«L’identité du groupe est importante, réfléchit le guitariste, Gilles Saracini. L’idée, c’était de rester fidèles à nous-mêmes, d’avoir un morceau qu’on pourrait aussi bien jouer au bar à la Saint-Patrick.» Résultat : une folk triomphante mâtinée de pop, dans laquelle chacun amène son instrument – banjo (Kiko), guitare (Gilles) et violon (Chris Reitz), dans la plus simple tradition country.

Zero Point Five a écrit, composé et enregistré Ride en huit heures. «On y est allé avec rien d’autre que l’envie d’écrire une chanson et d’imaginer ce que ça donnerait à la fin de la journée. Huit heures plus tard, on avait notre truc», résume Gilles.

«C’était un travail très différent de ce qu’on a l’habitude de faire», reprend Kiko, par la simple présence d’un quatrième «membre» éphémère, le producteur norvégien Jonas Holteberg Jensen (qui avait offert ses services aux rockeurs de One Last Time pour leur Devil in the Detail, finaliste du précédent LSC). «Il a l’oreille, il est précis, il sait nous orienter», et eux, qui se disent plutôt «spontanés», ont «en plus été super efficaces».

Plus impatients que stressés à la veille du grand soir, le trio se réjouit déjà de la «redécouverte de Zero Point Five», pour eux-mêmes comme pour le public, avec de nouveaux fans qui pourront les voir écumer les festivals cet été. En faisant, avant cela, un détour par Bâle?