Les députés ont adopté, mercredi, à l’unanimité, une loi pour renforcer encore davantage la qualité de l’eau potable. Au Luxembourg, 60 % de la population affirme déjà boire tous les jours de l’eau du robinet.
Le ton est donné d’emblée par Jessie Thill (déi gréng), la rapporteure du projet de loi : «L’eau est la plus importante ressource que nous ayons au Luxembourg.» Avec la transposition de la directive européenne sur le renforcement de la qualité de l’eau potable et l’accès équitable à cette ressource, l’objectif est «d’assurer aux gens que boire l’eau du robinet est sans danger».
Il y a 16 ans, 60 % des citoyens luxembourgeois affirmaient ne jamais boire de l’eau du robinet. Cette tendance s’est complètement inversée. «Désormais, 60 % des gens indiquent boire tous les jours de l’eau du robinet. Il s’agit d’une énorme amélioration, mais il reste encore de la marge», souligne Jessie Thill.
Si la nouvelle loi doit encore renforcer la confiance, une très bonne qualité de l’eau du robinet distribuée au Luxembourg est attestée depuis longtemps. Tous les ans, quelque 12 000 analyses et contrôles sont effectués, «soit une moyenne d’environ trois par jour», précise Jessie Thill. La ministre de l’Environnement, Joëlle Welfring, vient ajouter que «99 % de ces analyses sont conformes aux normes».
« L’eau potable est souvent de meilleure qualité que l’eau vendue en bouteille »
Le député Fernand Kartheiser viendra ajouter un argument supplémentaire : «Des études viennent à la conclusion que l’eau potable est souvent de meilleure qualité que l’eau vendue en bouteille. Beaucoup de personnes gardent toutefois le réflexe d’acheter leur eau au supermarché alors qu’une eau de qualité et moins chère sort de leur robinet.»
Le Grand-Duché est, en effet, très éloigné des situations dramatiques que connaissent les pays les plus vulnérables. Cécile Hemmen (LSAP) rappelle que 663 millions de personnes à travers le monde n’ont pas accès à l’eau potable. Le gaspillage de l’eau dans les pays mieux lotis est une réalité, tout comme la pollution des sources d’eau. «Tous les jours, il existe des exemples qui prouvent que nous, les êtres humains, n’avons pas assez de respect envers cette ressource», fait remarquer Gusty Graas (DP).
Au Luxembourg, il existe aussi un point noir, cité par Jessie Thill. «La pollution reste une réalité. Une centaine de sources capables d’alimenter 65 000 personnes sont hors d’usage ou nécessitent un traitement en amont de la consommation», indique la députée déi gréng. Elle insiste : «Une protection des eaux est moins chère que leur assainissement».
Des distributeurs obligatoires en 2029
La privatisation, avec, à la clé, la commercialisation de sources d’eau, est un autre phénomène, dénoncée notamment par Myriam Cecchetti (déi Lénk). Elle pointe aussi le Luxembourg, même si le cadre législatif existant interdit formellement que la fourniture d’eau potable puisse être privatisée, comme le précise la ministre Welfring. «Il n’est pas concevable que l’on sorte de l’eau potable du circuit pour faire des profits», martèle la députée de déi Lénk.
Marc Goergen (Parti pirate) dénonce le fait que, dans les bâtiments publics, «on utilise toujours d’importantes quantités d’eau potable pour faire fonctionner les toilettes». En outre, il plaide pour une autre tarification de l’eau afin de pénaliser davantage les consommateurs trop gourmands. La revendication d’Ali Kaes (CSV) de fixer sur le plan national un prix unique pour la fourniture de l’eau a, par contre, était rejetée, hier.
La loi adoptée à l’unanimité prévoit notamment que toutes les communes du pays doivent, au plus tard en 2029, avoir mis en place des distributeurs d’eau, que ce soit sur la place publique ou à l’intérieur des écoles et autres bâtiments communaux. Cette même obligation existe aussi pour l’État dans les administrations, hôpitaux et résidences pour personnes âgées. «Il m’importe que cet objectif soit réalisé beaucoup plus tôt», conclut la ministre de l’Environnement.
L’Horeca «encouragée» à servir des carafes d’eau gratuites
Le texte de loi adopté par les députés comprend un article qui prévoit d’«encourager la fourniture de cette eau, à titre gratuit ou moyennant des frais de service peu élevés, aux clients de restaurants, de cantines et de services de restauration». La carafe d’eau gratuite dans les restaurants va-t-elle donc enfin être servie au Luxembourg. Il est trop tôt pour l’affirmer. «Il s’agit d’un encouragement et non pas d’une obligation», déplore Myriam Cecchetti (déi Lénk). «Le fait que l’on ne réussit pas à transposer une mesure aussi efficace et peu chère en dit long», ajoute l’élue.
En novembre 2019, une pétition publique sur le sujet, qui a récolté plus de 5 000 signatures, a été débattue à la Chambre. Dans la foulée, le ministre des Classes moyennes, Lex Delles, avait annoncé vouloir lancer un projet de sensibilisation dans le secteur de la restauration afin que des carafes d’eau du robinet soient mises à la disposition des clients. La pandémie de coronavirus a retardé le lancement de la phase de test. Courant 2023, une cinquantaine d’établissements se mettront à l’eau du robinet gratuite ou à bas prix.