Les chiffres semestriels du budget livrés par Pierre Gramegna aux députés ne sont pas faux et permettent de dégager un excédent de 702millions d’euros. Mais il manque 10% de dépenses non prélevées.
L’ADR avait une «fake news» (sic) à dénoncer comme elle le précise dans son invitation à une conférence de presse qui s’est tenue hier matin dans ses locaux parlementaires. En cause, des chiffres empreints de mauvaise foi, une erreur de ponctuation et, selon Gast Gibéryen, une volonté de vouloir tromper son monde avant les élections.
Le gouvernement, et plus particulièrement le ministre des Finances, Pierre Gramegna (DP), aurait ainsi tenté de se couvrir de lauriers en annonçant que les chiffres du budget n’ont jamais été aussi bons. «Ce n’est pas la vérité», lâche sans concession le député, chef de la sensibilité ADR. Les finances de l’État ne sont pas présentées de manière honnête et, à y regarder de plus près, le reproche formulé par l’ADR tient en partie la route.
Le parti réformateur, qui s’est allié avec les identitaires de Wee 2050 pour former une liste aux prochaines législatives, parle donc de «fake news» en citant un communiqué du ministère des Finances daté du 22 juin dernier et titré «Nette amélioration de la situation financière de l’État au cours de l’année 2017».
On y lit textuellement que «le compte général 2017, établi selon les règles de la loi de 1999 sur la comptabilité de l’État, s’est clôturé avec un excédent de 1 352,9 millions d’euros, alors que le budget voté avait prévu un déficit de 850,9 millions d’euros». L’ADR ne va pas plus loin et crie à la manipulation. C’est là que l’erreur de ponctuation et le lien qui est fait entre la trésorerie de l’État et le budget prête à confusion. En réalité, il faudrait lire : «Le compte général 2017, établi selon les règles de la loi de 1999 sur la comptabilité de l’État, s’est clôturé avec un excédent de 1 352,9 millions d’euros. Le budget voté avait prévu un déficit de 850,9 millions d’euros». Ces deux phrases sont justes. «La trésorerie qui enregistre un excédent comprend les emprunts de 2017!», précise Gast Gibéryen, «et cela n’a rien à voir avec le budget», termine-t-il.
Un écart de 10 points de pour cent
Mais c’est surtout l’analyse des chiffres des six premiers mois du budget 2018 qui lui donne de l’urticaire. Encore une fois, Pierre Gramegna est accusé de vouloir monter sur la plus haute marche du podium, celle du champion de l’excellence budgétaire en présentant des chiffres record, mais Gast Gibéryen met le doigt là où ça fait mal.
«Si Pierre Gramegna parle de bons résultats, les meilleurs jamais obtenus depuis longtemps, c’est parce que toutes les dépenses n’ont pas été prélevées, contrairement à ce qui devrait être le cas après six mois d’exercice», explique le député. Le ministre des Finances s’était félicité devant les députés de la commission des Finances et du Budget (Cofibu), de l’excédent de 702,5 millions d’euros enregistrés fin juin sur les chiffres du budget, mais il avait oublié de préciser que seuls 40,9 % des dépenses ordinaires avaient été prélevées à ce jour.
Ce constat est absolument surprenant pour Gast Gibéryen, qui étale les tableaux. Les chiffres lui donnent raison. La moyenne s’établit à 49 % depuis 2014 en ce qui concerne les dépenses de fonctionnement à mi-parcours du budget. Or, en freinant les prélèvements, le gouvernement peut afficher un bilan plus qu’honorable «juste avant les élections», analyse le député ADR.
Du coup, les 702 millions d’euros d’excédent en bas de la colonne sonnent faux. Les chiffres ne sont pas truqués, mais on ne peut pas les comparer aux exercices précédents. Si l’on applique la moyenne de 49 % aux dépenses de fonctionnement, le chiffre en bas de la colonne devrait annoncer un déficit de 378,8 millions d’euros.
Dix points de pour cent de différence, «cela représente 1,3 milliard d’euros dans le budget», insiste Gast Gibéryen. Il parle de manipulation des chiffres. Les chiffres sont exacts, cependant, reste à savoir pourquoi ces 10 % de dépenses n’ont pas été prélevés. Au micro de nos confrères de RTL, le ministère des Finances a répondu qu’il s’agissait d’un hasard et que «cela n’avait rien à voir avec les élections». Ces différences sont dues à «des variations saisonnières», sans doute «plus marquées» cette année.
Le ministre Pierre Gramegna reste confiant. Les chiffres définitifs seront bons, il le sait. Pour Gast Gibéryen, ils ne sont ni meilleurs ni pires que ceux laissés par l’ancienne coalition avec un niveau d’endettement inchangé.
Geneviève Montaigu