La Commission de contrôle et d’évaluation de l’application de la loi sur l’euthanasie a rendu son rapport 2021/2022. Elle constate une augmentation des actes d’euthanasie, mais toujours une mauvaise information.
En 2020 déjà, le nombre d’euthanasies pratiquées avait doublé par rapport aux années précédentes. L’enquête publiée par TNS Ilres en 2019 avait grandement participé à une prise de conscience «tant de l’existence même de la loi que de l’acceptation de la loi par la population», relève la Commission nationale de contrôle et d’évaluation de l’application de la loi sur l’euthanasie et l’assistance au suicide. Depuis son entrée en vigueur en 2009, la Commission a compté 170 déclarations d’euthanasie.
Si, en 2021, le nombre d’euthanasies pratiquées correspond à celui de l’année précédente, c’est surtout en 2022 que la pratique a considérablement augmenté, avec 34 euthanasies, contre 25 en 2021. «Cette augmentation ne peut s’expliquer que par une communication accrue aux intéressés quant aux possibilités offertes actuellement au Luxembourg», en conclut la Commission dans son rapport qui fait référence à l’enquête menée par TNS Ilres.
Une majorité de cancers
Sur les 58 euthanasies enregistrées ces deux dernières années, huit ont été pratiquées dans un centre intégré ou dans une maison de soins, 23 au domicile du patient, 24 dans un établissement hospitalier et trois en un lieu privé. «Il est apparu des déclarations que les euthanasies se sont déroulées de manière sereine et digne. Même si le nombre de médecins disposés à pratiquer une euthanasie reste relativement limité, il a néanmoins augmenté par rapport aux années précédentes», relève la Commission.
Toutes les affections qui ont donné lieu à une euthanasie étaient, conformément aux exigences légales, incurables et graves, avec une majorité de cancers (37) et douze cas de maladie neurodégénérative.
La Commission entend lancer une réflexion sur l’euthanasie des personnes atteintes de troubles psychiques incurables, ce qui n’a encore jamais été pratiqué. «Ces personnes bénéficient des mêmes droits que les autres patients», soulignent les auteurs du rapport, conscients des nombreuses questions juridiques, éthiques et cliniques qui se posent face à un individu dont le libre arbitre peut être altéré par la maladie. La Commission, qui entamera, de sa propre initiative, une «discussion approfondie sur le sujet», invite les politiques à y réfléchir aussi et à prendre des décisions.
Formation des médecins
La Commission insiste encore, à l’instar des années précédentes, sur la formation des médecins et du personnel médical et paramédical qui devrait inclure la gestion de la fin de vie. «Il s’agit d’une question cruciale», ajoutent les rapporteurs. Ils imaginent une formation «spécifique et ciblée sur l’euthanasie» pour des médecins qui se tiendraient à la disposition de leurs confrères afin d’«offrir, le cas échéant, une consultation avec un médecin indépendant bien formé sur ces questions», en se basant sur les expériences belge et néerlandaise.
La Commission plaide pour l’instauration d’une consultation médico-éthique prestée par des médecins formés à cet effet. Ceci permettrait aux patients (ou à leurs proches) de se renseigner sur les différentes possibilités permettant de concrétiser une euthanasie ou une assistance au suicide. Restera encore à régler la question de la tarification des actes posés par les médecins pratiquant une euthanasie, où rien n’a bougé depuis l’entrée en vigueur de la loi.
Lors de son entrevue avec la ministre de la Santé, Paulette Lenert, en juillet dernier, la Commission nationale de contrôle et d’évaluation a rappelé l’importance de la sensibilisation à l’existence de la loi de 2009, notamment dans les hôpitaux. «Alors que certains médecins refusent pour des raisons privées de pratiquer une euthanasie, il y a également un nombre non négligeable de médecins qui disent ne pas être au courant de la loi de 2009, qu’ils ne savent pas comment l’appliquer dans la pratique et qu’ils ne veulent pas s’exposer à des poursuites pénales», indiquent les auteurs. D’où l’importance de la formation.
À noter également que 4 759 personnes ont pris des dispositions de fin de vie et que les femmes sont largement plus nombreuses (2 866) que les hommes.