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Luxembourg : de la sève de bouleau fraîche et locale…


La récolte de sève de boulot se déroule sur des arbres non loins du Findel (photo :Romain Van Dyck).

Rares sont ceux qui connaissent les vertus de la sève de bouleau. Patrice Cordebar vient de lancer la première exploitation de cet élixir de printemps au Luxembourg.

Au XIIe siècle, sainte Hildegarde de Bingen décrivait la sève de bouleau comme «remède pour soulager les ulcères». Au XIVe siècle, Conrad de Megenberg vantait les propriétés médicinales de cette eau sur la vessie et les reins. «Et on l’utilise dans les pays scandinaves chaque printemps pour se nettoyer des excès de l’hiver. Donc je n’invente rien!», sourit Patrice Cordebar.
Nous rencontrons ce sexagénaire dans le secteur du Waldhaff, à quelques encablures du Findel.  Comment ce Lorrain, originaire de Bar-le-Duc (Meuse), s’est retrouvé à percer des trous dans des bouleaux luxembourgeois? Cela débute par une rencontre, il y a une trentaine d’années : «J’avais récupéré des terres en Lorraine, et je comptais y planter des sapins. Mais un ami m’a conseillé d’analyser le terrain. Et on a découvert que cette terre était plus propice aux bouleaux. C’est là que j’ai appris que je pouvais récolter au printemps une sève qui est une sorte de potion magique.»

1 à 1,5 litre par arbre
Mais c’est un investissement à long terme : il faudra attendre les années 2010 pour que les jeunes bouleaux puissent donner leur première sève. Au début, il tâtonne, apprend sur le tas… Il est maintenant rodé. «En moyenne, un arbre donne de 1 à 1,5 l de sève par jour, mais certains peuvent donner bien plus.»
Profitant du boom de la demande pour les eaux naturelles (eau de coco, d’Aloe vera, etc.), Patrice Cordebar entame la commercialisation de son eau de bouleau sous la marque Belseva.

Une bouteille qui se consomme comme un jus... (photo : Romain Van Dyck)

Une bouteille qui se consomme comme un jus… (photo : Romain Van Dyck)

C’est alors qu’il remonte le fil de ses origines, jusqu’au Luxembourg : «En faisant des recherches, j’ai découvert que mon arrière-grand-père était luxembourgeois, et vigneron! J’y ai vu un symbole, et je me suis dit qu’il fallait que je fasse quelque chose au Luxembourg, en rapport avec mes origines.»
Sa première étape sera de faire les démarches pour obtenir la nationalité luxembourgeoise, en 2014. La seconde sera de chercher un endroit au Luxembourg pour exploiter les bouleaux. Si son idée est au début accueillie avec surprise («au ministère de l’Agriculture, on ne savait pas trop quoi faire pour m’aider»), il rencontre finalement les bonnes personnes, et son projet remonte jusqu’en haut lieu. «Le gouvernement a dit que c’était une bonne façon de diversifier la filière bois.»

La sève s’écoule goutte à goutte
Avec l’aide de l’administration de la Nature et des Forêts (ANF) qui «a fait un travail formidable de recherche», il trouve donc cette petite forêt. C’est ainsi qu’il a commencé, il y a une quinzaine de jours, la première récolte, qui devrait s’achever d’ici la fin du mois. «On arrête de récolter quand les feuilles apparaissent aux arbres.»
Dans la forêt, près de 120 seaux sont disposés au pied des arbres, d’où s’écoule la sève, goutte à goutte. C’est un produit brut : à part un filtrage léger pour enlever les corps étrangers (morceaux d’écorces, feuilles, etc.), c’est 100 % frais. Et pur : «Le bouleau filtre tout, donc c’est un produit sain.»
Contrairement à la sève qu’il produit en France, sa première récolte luxembourgeoise bénéficie pour l’instant d’un conditionnement très classique, en bouteille d’un litre. Mais il n’exclut pas de diversifier sa gamme si la sauce prend.
Restait à trouver des distributeurs. On imagine que la chose a été compliquée, étant donné la nature de ce produit, brut et peu connu. Mais la chaîne de magasin Naturata s’est montrée intéressée, explique son fils Arnaud, qui participe au projet. «On récolte, et ils vendent. C’est un projet artisanal avant tout. Mais ça prend de l’essor. J’ai l’impression qu’il y a une vraie demande pour le made in Luxembourg!»

Romain Van Dyck.