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Luxembourg : coup de froid sur l’économie


Le directeur général de la Chambre de commerce, Carlo Thelen, sonne l’alerte, ici aux côtés de ses collègues Christel Chatelain (à g.) et Bérengère Beffort. (photo Hervé Montaigu)

La Chambre de commerce sonne l’alerte en raison d’une dégradation continue des indicateurs économiques. L’activité, la rentabilité, les investissements et la compétitivité sont annoncés en baisse.

L’embellie a été de courte durée. Au deuxième semestre 2021, le climat des affaires était remonté à 62,1 %, le meilleur score depuis les six premiers mois de 2019 (63,3 %). Le rebond post-covid fut de taille, avec un climat qui avait chuté à 45,2 % au premier semestre 2020. Après le réchauffement, place au refroidissement. En plein «tsunami géopolitique», avec à la clé une inflation généralisée, une hausse des prix des matériaux et de l’énergie, tout comme des ruptures de chaînes d’approvisionnement, le climat des affaires s’établit à 50,7 % en ce premier semestre 2023. Il s’agit du plus mauvais taux depuis la crise sanitaire. Par conséquent, les entreprises basées au Luxembourg font face à «une baisse lente, mais continue, des indicateurs d’attractivité et de compétitivité de l’économie luxembourgeoise, traduisant une difficulté à attirer de nouveaux investisseurs et une main-d’œuvre qualifiée».

Ce constat repose sur l’enquête semestrielle menée par la Chambre de commerce. Plus de 600 acteurs issus de différents secteurs ont été sondés pour établir la 9e édition du baromètre de l’économie. Le tableau dressé n’est guère encourageant, voire «alarmant». Même si les chiffres peuvent être relativisés, les résultats sont clairs et nets pour Carlo Thelen, le directeur de la Chambre de commerce. «Les messages qui ressortent du baromètre corroborent avec les alertes que je reçois du terrain. Certaines grandes entreprises internationales, mais aussi des structures de taille moyenne et des entités familiales, réfléchissent à délocaliser leur siège, filiale ou site de production», clame-t-il. Le phénomène risque de s’accentuer «si l’environnement économique continue à se détériorer au Luxembourg ou si la position compétitive par rapport à d’autres pays devait s’affaiblir davantage». 

Moins d’impôts, moins d’indexations

Pour l’instant, la hausse des prévisions de croissance (+1,6 % dans la zone euro; 2,2 % pour le Luxembourg) ne suffirait donc pas à inverser la tendance. La confiance dans l’économie est passée de 89 % au second semestre 2021 à 74 % en ce début 2023. Le taux est cependant identique au score du second semestre 2022. En parallèle, l’activité est annoncée «moins florissante», sans toutefois connaître de chute importante. Pour 52 % des entreprises interrogées, l’activité est restée stable au cours des six derniers mois et elle devrait le rester pour 53 % d’entre elles. Un petit quart (23 %) prévoit une détérioration. La rentabilité, à la baisse, devrait se stabiliser au second semestre de cette année.

La Place financière reste le fer de lance de l’économie nationale, avec une hausse de l’activité de 8 % et une hausse des investissements de 19 %. De l’autre côté, l’Horeca, la construction (lire ci-contre) et l’industrie connaîtraient de plus importantes difficultés. Une tendance inquiétante, car avec une capacité d’investissement réduite, la double transition énergétique et numérique serait également mise en danger.

Pour la Chambre de commerce, le coût du travail et l’index figurent parmi les principaux freins. Néanmoins, les entreprises étrangères placent ces deux facteurs très loin de la catégorie «faiblesse» et «grande faiblesse» de l’économie nationale, également en difficulté pour attirer des investisseurs étrangers.

Parmi les remèdes proposés figurent une baisse de l’imposition des sociétés (de 25 % vers 21 %) ainsi qu’une limitation de l’index à une tranche par an et un plafonnement à 1,5 salaire mensuel médian.

Crise dans la construction :
«Les craintes se confirment»

Les syndicats OGBL et LCGB avaient tenu, la semaine dernière, à relativiser les propos des patrons qui évoquent le risque d’une crise majeure dans la construction. Selon le baromètre de l’économie, l’activité de ce secteur serait toutefois «passée dans le rouge». «Les craintes (…) énoncées lors des derniers mois semblent se confirmer, notamment en raison de la hausse des taux d’intérêts», avance la Chambre de commerce.

Si la construction compte parmi les secteurs dont la compétitivité, sur les cinq dernières années, a connu une des plus fortes évolutions (+20 %), le vent est en train de tourner. Depuis janvier, la baisse de l’activité dans la construction est évaluée à 20 %, contre un plus de 2 % au second semestre 2022. Avec 33 %, le secteur figure dans le peloton de tête des entreprises qui, dans les six mois à venir, anticipent une détérioration de leur rentabilité. Sur le même laps de temps, un quart des entreprises de construction compte réduire ses investissements.