Le camp syndical n’est plus prêt à se «faire ridiculiser» par un exécutif qui refuserait de mener de véritables négociations sociales. La conséquence : OGBL et LCGB se retirent du dialogue tripartite.
Le Premier ministre, Luc Frieden, va réceptionner aujourd’hui une lettre dans laquelle l’Union des syndicats OGBL-LCGB, scelle la rupture avec son gouvernement. L’échec des récents pourparlers en format tripartite n’a pas permis de relancer le dialogue social. «Nous constatons que le gouvernement Frieden a réussi en deux ans à peine à détruire le modèle social qui a très bien fonctionné depuis 50 ans», fustige Nora Nora Back, la présidente de l’OGBL.
«Au lieu de rechercher un compromis (…) et ficeler un accord tripartite, vous avez prématurément clôturé les discussions, pourtant constructives et marquées par des rapprochements notables dans les différents dossiers. (…) À nos yeux, cela représente un changement de paradigme au niveau du dialogue social et des décisions consensuelles vers un modèle qui limite le rôle des partenaires sociaux à celui de simples consultants», développe l’Union syndicale dans sa missive.
La conséquence? OGBL et LCGB se retirent du dialogue tripartite. «Notre confiance est rompue. On ne voit pas comment il serait encore possible de revenir à des négociations tripartites avant la fin de la législature en cours. Le modèle est enterré», lâche Nora Back. Elle ne tarde pas à en remettre une couche : «On ne compte plus se laisser infantiliser et ridiculiser en participant à des réunions qui permettent au gouvernement de vanter un dialogue social constructif. Dans les faits, on nous consulte et puis le gouvernement décide tout seul».
Sous ces conditions, les deux syndicats vont boycotter les futures réunions du Comité permanent du travail et de l’emploi (CPTE). Au bout de la première ronde sociale, le 9 juillet dernier, les syndicats avaient consenti d’approfondir les discussions sur l’organisation du temps de travail dans ce format. «Cet engagement était lié à la condition de la conclusion d’un accord global», défend Nora Back. «Le CPTE n’a plus de raison d’être», appuie Patrick Dury, le président du LCGB.
«Ils nous poussent dans la rue»
Le camp syndical compte aussi adapter sa façon de fonctionner. «La pression exercée par notre Union et par les 25 000 manifestants qui étaient dans la rue le 28 juin a permis à ce que les détériorations sociales soient finalement moins graves qu’annoncées. Cela n’est pas le résultat de négociations», estime Nora Back. «Ils nous poussent dans la rue. Et nous y serons probablement plus souvent dans les trois années à venir, si cela s’avère nécessaire», met en garde la coprésidente de l’Union syndicale.
Pour autant, l’intention n’est pas de «pratiquer une politique de la chaise vide». Dans la lettre envoyée au Premier ministre, OGBL et LCGB se disent prêts à mener des échanges bilatéraux avec les ministres de tutelle. «On va leur exposer nos réflexions, propositions et revendications. Ensuite, ce sera au gouvernement de tirer ses propres conclusions et de prendre ses responsabilités politiques», expose Patrick Dury. Plus question de négocier, mais, le cas échéant, de mobiliser les troupes. L’Union des syndicats cherche toutefois de nouveaux alliés : les fractions parlementaires et la société civile.
«Le pays risque d’entrer dans une période d’instabilité sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale», conclut le président du LCGB. On est loin de la paix sociale que le gouvernement croyait avoir rétabli au soir du 3 septembre.
Déi Gréng veulent des explications de Frieden et Mischo
Les députées Sam Tanson et Djuna Bernard n’ont pas tardé à réagir à l’annonce de l’Union des syndicats OGBL-LCGB de ne plus participer aux réunions du CPTE.
Dans une lettre adressée au président de la Chambre, les deux élues de déi gréng demandent la convocation «dans les meilleurs délais» d’une réunion de la commission du Travail. Le ministre de tutelle, Georges Mischo, mais aussi le Premier ministre, Luc Frieden, sont invités à venir échanger avec les députés.
«Nous souhaitons obtenir (…) des explications sur les mesures envisagées par le gouvernement afin de remédier à la situation actuelle et œuvrer à une meilleure entente entre les différentes parties», précisent Sam Tanson et Djuna Bernard.