Son discours de 90 minutes, la veille, ne devrait pas déboucher sur une journée entière de débat. Le Premier ministre s’est plaint du temps de parole des députés, et de leurs critiques aussi.
Quand le Premier ministre prend enfin la parole après les prises de positions de l’ensemble des partis représentés à la Chambre, il ne cache pas son épuisement. Il reconnaît des difficultés de concentration pour suivre les débats alors qu’il y assiste depuis 9 h. Il est un peu plus de 17 h quand il prend la parole et c’est d’abord pour se lamenter du temps de parole accordé aux députés dans ce genre d’exercice. Autant dire que l’opposition n’apprécie pas le commentaire.
Le discours sur l’état de la Nation n’est pas anodin et c’est Francine Closener (LSAP) qui lui rappelle que la Chambre fixe elle-même son règlement et que le Premier ministre n’a pas à s’immiscer dans ce domaine. Après cette courte mise au point, Luc Frieden paraît las de répondre aux nombreuses questions qui fleurissent autour de l’âge de départ à la retraite. La réforme des pensions et le financement du système ont effectivement occupé une large part du débat.
Rien n’est clair pour les députés de l’opposition concernant les pistes avancées par le Premier ministre. Mardi, il avait annoncé que l’âge légal de la retraite restait fixé à 65 ans, mais que la durée des cotisations sera allongée progressivement de trois mois par an sur plusieurs années. Les députés veulent connaître les détails de cette mesure, alors que le gouvernement entend revoir l’âge moyen du départ effectif en pension qui se situe à 60 ans.
Brandissant des études de l’OCDE, le Premier ministre rappelle encore que le Luxembourg occupe le haut du tableau en la matière alors que les travailleurs des Pays-Bas, par exemple, partent plutôt entre 65 et 67 ans en pension. Il insiste sur l’allongement de l’espérance de vie qui, en 50 ans, s’est élevée de 14 ans pour les hommes et de 11 ans pour les femmes.
Cela étant dit, le Premier ministre ne semble pas connaître lui-même les détails du calcul qui va être entrepris pour déterminer le nombre de trimestres qu’il faudra ajuter pour bénéficier de la retraite. Il se montre plutôt agacé par la place que prend le débat alors que les députés en ont discuté en mars dernier sous toutes les coutures en séance plénière. Il n’est sûr que d’une seule chose, le système tel qu’il se présente aujourd’hui ne sera plus viable.
Pour les précisions, il faudra attendre la présentation par la ministre Martine Deprez qui viendra en commission avant l’été avec, cette fois, des informations plus concrètes sur la réforme. Ce qui n’empêche pas les députés de l’opposition d’accuser le gouvernement d’un manque de considération pour les jeunes générations, en général.
Le Premier ministre s’en défend et argue, au contraire, qu’ils sont au centre de nombreuses préoccupations. Le crédit d’impôt sur les actes notariés (« Bëllegen Akt ») est une mesure qui bénéficie en premier lieu aux jeunes, selon lui. Le sujet de la santé mentale des élèves est une autre preuve de l’intérêt que porte le gouvernement aux jeunes générations. Les années d’études compteront toujours dans le calcul de l’âge de la retraite, le dialogue avec les jeunes agriculteurs pour faciliter la transmission des exploitations, le temps partiel familial sont autant de mesures destinées aux jeunes.
Luc Frieden clôt la liste pour passer aux engagements en faveur de l’environnement et du climat, autre critique de l’opposition qui se lamente du peu de considération que le gouvernement accorde à ces domaines. «La nature est essentielle pour notre société et on n’a pas besoin d’en parler tout le temps, c’est une évidence», déclare-t-il sans pour autant s’étendre sur les mesures prises, ce qu’il avait fait la veille.
La démocratie, c’est aussi la rue
Si Luc Frieden pense s’en sortir en une demi-heure de temps après avoir essuyé bon nombre de reproches sur son discours, c’est sans compter sur l’acharnement des députés. Marc Baum (déi Lénk), qui lui rappelle que la démocratie s’exprime aussi dans la rue, insiste sur l’état qu’il juge catastrophique du dialogue social. Le Premier ministre avait défendu, la veille, ce modèle luxembourgeois, mais sans convaincre l’opposition et encore moins les syndicats.
Il ne reviendra pas sur les projets d’allongement des heures d’ouvertures des commerces, sur les dimanches travaillés, ni sur l’exclusivité des syndicats dans les négociations des conventions collectives. Le code du travail est assez complet et moderne, selon lui, ce qui permet aux entreprises de se passer de conventions collectives de travail et ce qui explique qu’il y en a si peu. Le débat sur cette question n’est pas terminé alors que les syndicats prévoient une grande manifestation le 28 mai prochain.
État de la Nation : la défense renforcée, du concret sur les pensions
«Instabilité inédite», «coupes intolérables» : les réactions au discours de Frieden
«Instabilité inédite», «coupes intolérables» : les réactions au discours de Frieden
État de la Nation : la défense renforcée, du concret sur les pensions
État de la Nation : le CGFD s’insurge, Trump applaudit Frieden