Gaston Glock, l’inventeur du fameux pistolet, est décédé à l’âge de 94 ans. Il avait été victime d’une tentative de meurtre à Luxembourg.
Le fabricant autrichien de pistolets Gaston Glock, à l’existence digne d’un polar, est mort à l’âge de 94 ans après avoir révolutionné l’armement avec ses petits calibres en plastique. «À la mémoire de Gaston Glock, 19.07.1929 – 27.12.23. La perfection continue», a écrit mercredi l’entreprise Glock GmbH sur son site internet, accompagnant l’hommage d’un portrait de l’homme d’affaires et d’un bandeau noir.
Discret comme son invention était célèbre, le père du semi-automatique «Glock» étudie l’ingénierie mécanique à Vienne, avant de fonder avec sa première femme, Helga, une manufacture de couteaux en 1963. À ses heures perdues, il confectionne alors déjà des prototypes de pistolets… toujours de la main gauche, afin de conjurer le sort.
En 1982, il remporte un appel d’offres de l’armée autrichienne en concevant une arme à feu composée en grande partie de matériaux non métalliques. Elle est moins chère, plus légère, plus facile à démonter, tire plus de balles que ses concurrentes et l’entreprise Glock GmbH, dont le siège est à Deutsch-Wagram (nord-est), se lance sur le marché mondial.
«On peut vraiment comparer Gaston Glock à Steve Jobs lorsqu’il a sorti le premier produit Apple de son garage», déclarait en 2018 Fritz Ofner, réalisateur d’une des très rares enquêtes sur le milliardaire («Weapon of Choice»). Aux États-Unis, environ 80 % des policiers – qui disent entre eux «In Glock we Trust» – en seraient aujourd’hui équipés.
Le FBI le chérit également. Un succès commercial porté par Hollywood et les stars de la pop culture. Bruce Willis vante les mérites du «flingue low cost» dans Die Hard 2, Tommy Lee Jones dans U.S. Marshals. On le dégaine dans les James Bond. Côté musique, «à la fin des années 1990, Glock est la marque la plus citée dans le top 50 américain», selon Fritz Ofner, pour qui «cette arme nouvelle a rencontré un nouveau genre», le rap.
Un ancien catcheur armé d’un marteau
Vendu à des millions d’exemplaires, ce minimaliste «bijou noir» assure la fortune de son concepteur autrichien et Glock GmbH, devenue une multinationale présente dans l’aviation, le bois, la santé et l’énergie, emploie près de 2 000 personnes en Autriche, en Slovaquie et aux États-Unis. Mais la réussite s’est aussi faite dans la douleur.
En 1999, sur un parking du Luxembourg, Jacques Pêcheur, un ancien catcheur français, fonce avec un marteau sur le magnat autrichien. Le commanditaire du meurtre, Charles Ewert, est l’ancien bras droit de Gaston Glock, devenu son ennemi après un différend. La victime en sortira vivante après avoir perdu un litre de sang et les deux hommes seront condamnés.
Puis c’est le divorce en 2011 d’avec Helga, à l’âge de 82 ans, et le début d’un bras de fer à plusieurs millions d’euros. La mère de ses deux fils et de sa fille est évincée au profit d’une collaboratrice, Kathrin Tschikof, de plus d’un demi-siècle sa cadette.
La dernière décennie est aussi marquée par la montée en puissance du débat sur les armes de poing, car le «gun made in Austria» n’est pas apprécié des seules forces de l’ordre et armées. Le néonazi norvégien Anders Behring Breivik s’en sert pour tuer 69 participants à un camp d’été de la Jeunesse travailliste sur l’île d’Utoya en 2011.
Un Glock accompagne Saddam Hussein lorsque les GI le délogent de son terrier en Irak. Et l’organisation État islamique l’exhibe dans des vidéos de propagande. Gaston Glock perd un procès en diffamation contre l’ONG Amnesty International, qui avait attiré l’attention sur la présence de ses pistolets dans les rangs des rebelles au Soudan.
Le couple Glock, installé au bord d’un lac dans le sud de l’Autriche, également mécène des hôpitaux et protecteur des animaux, investit alors le secteur équestre. Lieu de compétitions et de mondanités, le «Glock horse performance center» voit défiler les célébrités, de Mariah Carey à Rupert Everett en passant par John Travolta, Naomi Campbell et Robbie Williams.
Trois anciens ministres, membres du parti d’extrême droite FPÖ, ont également été les convives des Glock. L’industriel, autrefois proche du tribun Jörg Haider, a toutefois démenti des allégations de financement occulte dont se vantait un ancien dirigeant de la formation.