Le deuxième sommet luxembourgeois du tourisme, organisé par le LCTO, s’est tenu ce jeudi au Mudam à Luxembourg. Une journée consacrée au tourisme durable sur lequel s’est engagé le pays, ainsi que l’apport de l’IA à ce sujet.
Respecter, préserver et mettre durablement en valeur les ressources naturelles, culturelles mais aussi sociales du Grand-Duché. Ce sont autant d’objectifs recherchés par le Luxembourg City Tourist Office (LCTO) pour les années à venir. Un chantier d’envergure, qui passera sans nul doute par l’aide de l’intelligence artificielle. Devant 130 participants de secteurs et pays différents, discussions et débats ont animé l’enceinte. Elles ont permis de dessiner des premières pistes et éléments de réponse pour le futur.
Proposer des offres personnalisées
«Le futur du tourisme ne passe pas forcément par les offres et les services globaux, mais plutôt dans la création d’expériences personnalisées», énonce Xavier Front, professeur à l’université de Surrey. Le secteur, en constante mutation, semble aujourd’hui au tournant d’un changement de paradigme. Un avis partagé par Roman Egger et Joshua Ryan-Saha, tous deux chercheurs en innovation touristique. Les vacances se reflétant par le consumérisme d’un pays ou d’une ville auraient fait son temps. Ancrées depuis des décennies, balayer ces habitudes n’est toutefois pas une mince affaire. L’intelligence artificielle pourrait accélérer ce processus.
Où dormir? Comment découvrir le pays? Quels restaurants respectent les circuits courts? Ce sont autant de questions que se pose chaque voyageur souhaitant limiter son impact environnemental et fuir cette notion de «surtourisme», afin de privilégier un «tourisme de résonance». Or, les informations sont éparpillées, et le temps manque parfois. «L’IA permet cette personnalisation. Les chats bots et assistants virtuels offrent cette assistance, facilitent les réservations et fournissent de nombreux conseils en abrégeant un ensemble d’informations», explique Joshua Ryan-Saha. La technologie rendrait possible cette conciergerie d’hôtels augmentés, disponible en tout temps. Avec, pour intérêt central, la possibilité de vivre une expérience unique, totalement connectée aux attentes et aux besoins de chacun. «Quelqu’un souhaitant expérimenter le goût du risque et de l’inconnu, ou alors découvrir sa destination uniquement par le biais des cathédrales le pourra bientôt», poursuit-il. En un temps record, vol, hébergement, itinéraires et programme pourraient être proposés aux clients.
Doute et mutation
Face à ces promesses, des doutes subsistent néanmoins. Déshumanisme, abêtissement, protection des données, suppression de postes. Les craintes sont nombreuses, et légitimes. Tour à tour, les intervenants se sont exprimés à ce sujet. Ranga Yogeshwar, éminent journaliste scientifique, s’est montré rassurant. Invité à tenir une conférence, il remarque que «la nature humaine compare toujours le progrès en glorifiant le passé, mais l’intelligence humaine est en mouvement permanent, ce qui nous différencie des machines». Même son de cloche pour Roman Egger, qui se rappelle avoir entendu les mêmes craintes lors de l’arrivée de la calculatrice ou de Google Maps. «Pourtant, l’espèce humaine sait toujours compter et se déplacer. Cela nous rend juste plus efficaces.» Pour le reste, il est question de mutation, de la part du public mais aussi du personnel.
Une autre interrogation se dirige vers l’éventuelle suppression de postes que pourrait entraîner une utilisation excessive de l’IA. «Nous devons nous l’approprier, et la maîtriser», raisonne Joshua Ryan-Saha durant son passage. Il est aussi possible d’imaginer une IA comme une aide, permettant aux guides d’adapter leurs visites et aux agents de voyages de comprendre davantage les attentes des clients, pour ne penser qu’à eux. Cela, compter sans le nombre d’emplois qui seront nécessaires afin d’inventer et de rendre ces outils accessibles à tous. Jeanne Tonnar, chargée de la direction générale du tourisme auprès du ministère de l’Économie, le considère également : «Il sera essentiel de relever les défis de la confidentialité, des données, et de maintenir cette touche humaine, qui est indispensable au secteur.»