Le SAMU va-t-il accueillir des médecins urgentistes à bord de ses véhicules ? Rien n’est encore tranché, mais la demande est bien réelle. Les anesthésistes-réanimateurs s’y opposent.
Il y a bien une demande des médecins-urgentistes à l’origine d’un projet de nouveau référentiel pour le SAMU (Service d’aide médicale urgente), mais qui est encore au stade embryonnaire. Les syndicats OGBL et LCGB s’étaient émus la semaine dernière de ce projet de réorganisation du SAMU au sein du CGDIS, estimant qu’il «constituerait un changement majeur dans la composition et le fonctionnement des équipes d’urgence», écrivaient-ils.
«Modifier un tel équilibre sans dialogue préalable avec les acteurs de terrain risque de fragiliser des mécanismes organisationnels essentiels, construits au fil du temps pour garantir l’efficacité des interventions d’urgence», craignent-ils.
Depuis sa mise en place en 1989, le SAMU fonctionne avec un duo inséparable composé d’un médecin et d’un infirmier spécialisés en anesthésie et réanimation. L’arrivée des médecins urgentistes est vue d’un mauvais œil par leurs confrères et ce sera au Conseil d’administration de trancher.
Le directeur du CGDIS, Paul Schroeder, nous explique que la direction comme le Conseil d’administration ont été saisis par des demandes d’urgentistes luxembourgeois qui ont fait leurs expériences dans des SAMU à l’étranger et qui souhaiteraient être actifs dans ce service du CGDIS.
La direction a d’abord refusé ces candidatures, mais les urgentistes, qui n’ont pas la spécialisation requise, ont insisté auprès du CA. Il y a eu des réunions avec le président, Alain Becker, et la vice-présidente, Lydie Polfer, et également avec le représentant du SAMU au CA, le Dr Philippe Welter. «C’est à la suite de ces réunions que la direction a eu la mission de travailler sur un nouveau référentiel», précise Paul Schroeder.
Ce qui importait pour la direction au CGDIS, c’était de déterminer les compétences qu’un médecin qui monte dans un véhicule doit avoir pour exercer la fonction de médecin SAMU. «Ce n’est pas parce qu’un médecin est spécialisé en anesthésie-réanimation qu’il a toutes les compétences pour intervenir en préhospitalier, et la même chose est vraie pour un médecin urgentiste. Il y a tout le volet de médecine de catastrophe, en cas de « plan nombreuses victimes« , qui est un élément essentiel pour nous au CGDIS », poursuit le directeur.
La direction a donc travaillé sur les compétences requises pour exercer au SAMU. «Nous nous sommes mis d’accord sur ces compétences avec le représentant du SAMU au CA et le Dr Philippe Welter voulait que dans le référentiel soit stipulé que le médecin devait obligatoirement être spécialisé en anesthésie-réanimation.»
Il n’y avait aucune possibilité d’avoir un accord au préalable sur ce point précis, si bien que le projet a dû être débattu au CA afin que les avis des différentes sensibilités puissent être entendus. «Nous ne sommes qu’au début du processus», rectifie Paul Schroeder.
En ce qui concerne les infirmiers, il existait déjà une exception dans le premier référentiel SAMU pour ceux qui participaient au SAMU depuis au moins cinq ans sans forcément avoir la spécialisation en anesthésie-réanimation. Dans le premier référentiel, c’était rédigé comme une disposition transitoire, valable pendant cinq ans à partir de la création du CGDIS.
«Dans les faits, il y a toujours eu des infirmiers sans la qualification d’anesthésiste-réanimateur, mais nous n’avons jamais considéré qu’il s’agissait d’un problème majeur parce que nous n’avons jamais eu de plainte à ce sujet», poursuit Paul Schroeder.
Dans le nouveau projet, cette exception a été conservée, ces infirmiers ayant une expérience dans les secours préhospitaliers. «On ne comprend pas cet émoi aujourd’hui du côté des infirmiers-anesthésistes. Au niveau des médecins, on savait qu’ils refusaient une ouverture. Les uns ne vont pas être remplacés par les autres. Ceux qui font du SAMU aujourd’hui vont continuer à le faire», assure-t-il.
Comité de sélection
Chaque nouvelle demande d’un médecin qui veut participer au SAMU est analysée par un comité de sélection dans lequel les anesthésistes-réanimateurs sont représentés et peuvent vérifier les compétences des personnes qui se manifestent. «Notre but n’est pas d’ouvrir les portes et d’avoir des tas de médecins en plus, car nous n’avons pas ce besoin. Mais cela ouvre la possibilité de voir des médecins qui ont la compétence pour faire du SAMU même s’ils ne sont pas anesthésistes.»
Pour les infirmiers, le CGDIS a des contrats avec les hôpitaux et ce sont eux qui mettent des infirmiers à la disposition du SAMU, à partir du moment où les conditions du référentiel sont remplies. «S’il n’y a pas de volonté de la part des hôpitaux de changer quoi que ce soit dans cette pratique, c’est la même chose pour nous au CGDIS. On veut juste pérenniser une pratique qui existe depuis le premier jour du SAMU», explique Paul Schroeder.
Aucune décision n’a encore été prise. Le projet de référentiel a été présenté la semaine dernière une première fois au CA et la loi prévoit qu’une association de médecins qui pratiquent le SAMU doit être entendue, en l’occurrence le Cercle des médecins anesthésistes-réanimateurs. Il doit formuler son avis et le CA a décidé de demander les avis des autres parties prenantes.
Quand tous ces avis seront sur la table, le CA prendra une décision en toute connaissance de cause.