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Les parents doivent « redonner à l’enfant le goût de l’effort »


Les enseignants constatent qu'il y a de moins en moins cette volonté d'apprendre et ce phénomène intervient dès l'école primaire. (illustration AFP)

Une enquête du syndicat SEW-OGBL révèle un certain malaise dans le corps enseignant. Après les instituteurs, les professeurs disent eux aussi leur mal-être. Les réformes ont mis l’école en état de crise.

À la veille de cette nouvelle rentrée scolaire, les professeurs du secondaire sont en manque de reconnaissance pour la grande majorité d’entre eux et ne se sentent pas respectés, ni par les politiques ni par les médias. En revanche, 97% d’entre eux aiment enseigner même si 43% ne se lanceraient plus aujourd’hui dans une carrière de professeur. Le syndicat SEW-OGBL avait livré sensiblement les mêmes résultats au début de l’été concernant les enseignants du primaire sauf que pour ces derniers, le mal-être était encore plus palpable.

L’enquête réalisée auprès des enseignants du secondaire n’est pas forcément représentative car seuls 370 d’entre eux y ont pris part spontanément sur les 4 400 personnels que compte la branche. Mais elle donne un aperçu de la situation et tous ne sont pas membres du syndicat, comme s’empresse de le préciser le président du SEW-OGBL, Patrick Arendt.

Débordés et dépourvus de solutions

Les réformes successives entamées sous l’ère Mady Delvaux et poursuivies par Claude Meisch auront finalement abouti à créer une situation de crise au sein de la profession, selon le syndicat qui ajoute que même les parents doutent aujourd’hui de l’efficacité du système scolaire.

Les parents, justement, qui, selon le syndicat, doivent être davantage responsabilisés même si cette question est extrêmement délicate. «Les parents n’ont plus le temps de s’occuper de leurs enfants parce qu’ils sont obligés de travailler à deux pour faire face au coût de la vie», explique Jules Barthel. Et il lâche cette petite phrase : «Il faut redonner à l’enfant le goût de l’effort.»

L’enfant aurait donc perdu de vue cette notion : «On s’est rendu compte, et je parle des enseignants en général, qu’il y a une tendance à refuser d’apprendre le français par exemple. Même les parents attendent de l’enseignant qu’il arrange ce problème sans pour autant demander à l’élève de fournir plus d’efforts», nous explique Patrick Arendt.

Les enseignants constatent à leur grand désarroi qu’il y a de moins en moins cette volonté d’apprendre et ce phénomène intervient dès l’école primaire. «On voit des parents arriver en disant qu’ils ne savent plus quoi faire car leur enfant refuse de faire ses devoirs et ils nous demandent de trouver des solutions», raconte Patrick Arendt.

Malheureux mélange des genres

Ce constat vaut surtout dans les milieux les plus défavorisés. Quand papa est avocat et maman professeure, l’enfant est davantage sensibilisé au besoin de faire des efforts pour réussir à l’école. «Dans les couches moins favorisées, les parents se retrouvent vite démunis face à l’enfant qui n’a aucune envie de se donner du mal», relève-t-il. C’est une question de mentalité.

Il ne s’agit pas du goût d’apprendre, c’est surtout du fait de travailler dont il est question. «Certains parents nous demandent de donner plus de devoirs à domicile car ils voient que leur enfant ne travaille pas trop et d’autres parents, au contraire, nous demandent de ne pas mettre trop de pression sur l’enfant alors que les élèves ne sont pas sous pression du tout.»

Le politique a tendance à dire aux parents d’aller voir l’enseignant, car c’est lui le responsable, mais face à un enfant qui refuse de faire des efforts, l’enseignant est démuni lui aussi. On en revient à la délicate question de la responsabilité des parents qui, pour beaucoup, déposent leur enfant à 7h à la maison relais pour venir le récupérer à 19h. «Les maisons relais dépendent maintenant du ministère de l’Éducation nationale, c’est déjà une première fusion. Mais il arrive souvent que l’on partage des infrastructures scolaires avec des maisons relais, cela signifie pour l’enfant une impression de passer sa journée entière à l’école», critique Patrick Arendt.

Du coup, la frontière entre le ludique et le travail est ténue. La maison relais n’est pas là pour assumer une aide aux devoirs. Ce que demande aujourd’hui le SEW, c’est de travailler avec d’autres sections de l’OGBL sur cette problématique des maisons relais. «Il faut que nous fassions quelque chose ensemble», admet Patrick Arendt.

Geneviève Montaigu