En moins de huit ans, la population indienne a triplé au Luxembourg. Cette croissance spectaculaire pousse l’Association indienne du Luxembourg (IAL) à revendiquer des infrastructures adaptées.
Avec environ 6 500 personnes d’origine indienne, la communauté représente aujourd’hui près de 1 % de la population luxembourgeoise. Un chiffre qui contraste fortement avec celui de 2017, où l’on comptait moins de 2 000 Indiens au Grand-Duché, ou encore avec l’année de création de l’IAL, en 1991, qui ne comptait alors qu’une centaine de personnes.
«Quand je suis arrivé comme étudiant, nous étions une petite communauté. Aujourd’hui, nous sommes trois fois plus nombreux», explique ainsi Sahil Goel, le président de l’association des Indiens du Luxembourg depuis 2023.
Cette expansion s’explique surtout par l’attractivité économique du pays, notamment dans les secteurs de la finance, de la technologie et, plus récemment, du spatial. Des entreprises comme Amazon ou encore ArcelorMittal constituent les principaux employeurs de talents indiens, souvent recrutés depuis d’autres bureaux européens ou américains.
Face à cette croissance démographique importante, un besoin s’est fait particulièrement ressentir : la création d’un temple hindou. «C’est devenu beaucoup plus visible dans la communauté. Les gens doivent se rendre à Francfort, à Trèves ou en Belgique pour pratiquer leur spiritualité», déplore le président de l’IAL, qui souligne qu’un tel lieu pourrait également servir à d’autres communautés partageant les mêmes pratiques religieuses. Avec les Népalais, les Sri-Lankais ou encore les Mauriciens, ce sont près de 10 000 personnes qui seraient concernées au Luxembourg, soit près de 2 % de la population du pays.
Mais ce projet va bien au-delà du simple lieu de culte. L’IAL envisage en effet un «Bharat Bhavan» (une «maison de l’Inde»), qui serait l’équivalent d’un centre culturel multifonctionnel.
L’établissement accueillerait également des cours de langues (hindi, français, luxembourgeois), de danse, de musique et d’autres activités d’intégration. «Nous ne parlons pas seulement pour nous, mais aussi pour les amis de l’Inde qui souhaitent apprendre notre langue ou notre musique», précise Sahil.
Des discussions sont actuellement en cours avec la Ville de Luxembourg, la commune d’Esch-sur-Alzette (qui concentrent respectivement 3 000 et 500-700 Indiens), le ministère de la Culture et l’ambassade d’Inde.
«Les autorités sont ouvertes à la discussion, mais il y a des conditions. Le financement des activités religieuses a été arrêté en 2015, même pour le christianisme. Nous devons donc trouver une formule différente», explique le président.
Un sujet sensible, qui est aussi rattaché à la pratique des derniers rites selon les traditions hindoues. Faute d’endroit adapté, la communauté indienne du Luxembourg doit trouver d’autres solutions.
«En un an et demi, il y a eu quatre ou cinq décès, dont celui d’une jeune personne à la suite d’un accident. Les familles ont du mal à trouver des lieux appropriés pour célébrer les rituels funéraires conformément à leurs croyances», confie Sahil.
«Un véritable melting-pot culturel»
Ces difficultés n’empêchent pas l’IAL de maintenir une activité culturelle soutenue. L’association organise près de 18 événements par an, dont les deux temps forts que sont l’India Day (qui attire 2 000 à 3 000 personnes, place Guillaume-II) et le gala de Diwali, la «fête des lumières» équivalente à Noël pour les Indiens.
Cette année, le Diwali se tiendra pour la première fois au Cercle Cité, avec 260 convives attendus, des groupes de danse professionnels venus de Belgique et un groupe musical local composé d’Indiens et de non-Indiens. «La musique connecte les gens sans barrière de langue», souligne Sahil, qui insiste sur l’ouverture de l’association aux «amis de l’Inde».
Pour lui, qui est originaire de Karnal, dans l’État d’Haryana, le Luxembourg offre un cadre idéal malgré les défis. «J’avais le choix avec la Belgique et le Canada, mais j’ai choisi le Luxembourg pour sa taille humaine, similaire à celle de ma ville natale, et sa diversité. Avec 170 nationalités, c’est un véritable melting-pot culturel.»
Il observe que les relations avec les Luxembourgeois, bien que parfois perçus comme «réservés», s’approfondissent avec le temps. «Ils s’ouvrent progressivement et une fois qu’ils le font, ce sont des relations durables», note-t-il, citant plusieurs amitiés nouées depuis son arrivée en 2017.
L’IAL espère concrétiser ses projets d’ici 2026, notamment l’établissement d’un centre culturel. «Nous avons besoin d’un lieu où pratiquer plusieurs activités, pas seulement religieuses. Un espace pour apprendre, partager, transmettre notre culture tout en facilitant l’intégration», résume Sahil Goel.
En attendant, l’association continue de tisser des liens entre les communautés, participant aux festivals locaux et invitant les Luxembourgeois à découvrir la richesse de la culture indienne. Une communauté en pleine expansion, dans un Luxembourg toujours plus multiculturel.