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Les fragiles majorités face aux transfuges


Les partis politiques redoutent toujours un transfuge en cours de mandat, qui fragilise les majorités. Selon la personnalité des intéressés, l’opération se passe dans la douceur ou la douleur.

Le cas de Christophe Origer, conseiller communal qui vient de passer du CSV à déi gréng, rappelle qu’en politique, le mandat est nominatif, et peut faire basculer une majorité.

En politique, il y a des abandons, des démissions, des évictions, des séparations et des transfuges. Les annales en la matière fourmillent d’exemples, à tous les niveaux. Il y a les démissions élégantes, justifiées, en général, par la longue carrière politique de l’élu qui cède sa place à la jeune génération.

Un passage de relais qui s’opère en douceur, dans la nature des choses, assez fréquent à la Chambre des députés, comme celui de Viviane Reding, pour ne citer que le dernier en date. Il y a les abandons, parfois en pleine gloire, de politiques qui décident de tourner le dos à leur carrière pour retrouver une vie civile plus satisfaisante à leurs yeux. L’ancien ministre chrétien-social Jean-Louis Schiltz en est un exemple.

L’histoire connaît aussi des démissions fracassantes. Dans un passé récent, l’affaire de l’eurodéputée, Monica Semedo a tenu les médias en haleine pendant quelques semaines avant de s’achever sur la démission de l’intéressée, qui avait préféré cette voie à l’éviction dont elle était menacée par son parti, le DP.

Sanctionnée pour harcèlement par ses pairs au Parlement européen, après la plainte de trois de ses collaborateurs, l’ex-présentatrice de RTL Télé devenait un boulet pour le parti libéral, après avoir brillamment remporté un deuxième siège pour le DP aux élections européennes de 2019. Le parti jugeait cependant «toute justification de l’intimidation inacceptable», et espérait que la députée européenne rende son mandat dans la foulée.

C’est là où le bât blesse pour les partis politiques. Le mandat est nominatif. Juridiquement, il appartient à l’élue et non pas au parti. Monica Semedo siège comme indépendante au Parlement européen dans le groupe Renew Europe. Le bel exploit du parti libéral qui avait ravi un siège aux chrétiens-sociaux aura été de courte durée. L’incident n’a eu aucun impact sur l’équilibre des forces dans l’hémicycle.

D’autres exemples démontrent le contraire. Au niveau communal cette fois, ce sont les transfuges qui mettent parfois en péril les fragiles majorités, à des degrés divers. Il y a les passages ultra-soft, tel celui de Luc Majerus, ex-conseiller communal d’Esch-sur-Alzette qui a quitté le parti déi gréng, en début d’année, pour rejoindre Frank Engel et son nouveau Fokus.

Il est un des rares à avoir également remis son mandat au parti, en plus de sa démission, permettant ainsi à Catherine Pastoret de lui succéder. À l’opposé, d’autres affaires ont eu pour effet de renverser des majorités, même naissantes, comme ce fut le cas à Mondorf-les-Bains à la suite des élections communales de 2005.

Cette année-là, le CSV et le LSAP détenaient trois sièges chacun face au DP qui en avait remporté cinq avec Maggy Nagel à sa tête. La coalition CSV/LSAP n’a jamais pu se mettre en place pour mettre fin au règne des libéraux sur la station thermale. Le socialiste d’alors, Steve Schleck, ne pouvant se résoudre à donner son aval à une telle entente, décida de démissionner du parti pour siéger en tant qu’indépendant.

L’opération réalisée, il s’est allié avec le DP et a pris sa place d’échevin. Un beau geste que le DP n’a pas oublié en 2017. Alors qu’il détenait la majorité absolue aux élections communales, il a sacrifié l’un des siens pour laisser à Steve Schleck, devenu membre du parti déi gréng entre-temps, une place d’échevin.

Volonté des électeurs

L’actualité conduit au cas de Christophe Origer, conseiller communal chrétien-social d’Echternach qui vient de quitter les rangs de son parti pour débarquer chez les verts avec son mandat. Surprise générale dans la cité qui voit la coalition CSV/LSAP perdre sa majorité. Le choc se produit à sept mois des prochaines élections et le bourgmestre Yves Wengler, ne veut rien changer d’ici-là, «pour respecter la volonté des électeurs», argumente-t-il.

Les verts, avec leur nouveau membre, ne comptent pas jouer les fortes têtes et s’opposer à l’équipe dirigeante toujours en place. Mais durant les mois à venir, ils souhaitent bien faire passer certaines de leurs revendications. Reste à voir s’ils voteront en faveur du prochain budget.