Un Thionvillois, un Luxembourgeois et un complice ont utilisé des cartes d’identité de personnalités connues pour détourner des fonds.
William Accambray est un handballeur de haut niveau, international français. Claude Onesta, un entraîneur de handball à succès. Nicolas Batum et Evan Fournier, des basketteurs NBA. Olivier Martinez, un acteur. À part leur célébrité, rien ne reliait ces hommes… jusqu’à ce que trois escrocs, pincés ces dernières semaines par la Police aux frontières de Metz, ne mettent en place un système efficace pour obtenir des cartes d’identité à leur nom et ouvrir des comptes bancaires et des crédits à la consommation auprès d’organismes comme Cofidis ou Sofinco.
On peut évoquer aussi au rang des victimes le patron de Schneider Electric, un chef étoilé, l’un des prêtres chanteurs, des anciens footballeurs professionnels ou les frères Tillie, basketteur et volleyeur de leur état. Les usurpateurs ont lancé au moins 150 tentatives dans tout le pays. Pourquoi ces personnalités, plutôt que des anonymes? «Pour obtenir plus facilement les renseignements indispensables pour demander les papiers d’identité», explique la chambre de l’instruction de Metz.
Opération en trois actes
Les mis en cause ont détourné à leur profit la procédure de renouvellement de la carte nationale d’identité. « En profitant d’un manque de vigilance de certaines mairies », pestent des connaisseurs du dossier.
Acte 1 : les escrocs font la demande de l’extrait d’acte de naissance aux communes d’origine. Le document ne peut être obtenu que par la personne en question, un ascendant, un descendant ou un professionnel autorisé par la loi. Sur internet, les escrocs trouvent les dates de naissance, les noms des parents… Parfois, les services de l’état civil ont bloqué ces documents. « Les agents ont tiqué parce qu’ils connaissaient les noms ou directement les personnes. » Parfois pas… Les demandes d’extraits d’acte de naissance sont transmises avec une enveloppe timbrée à retourner à des adresses du centre-ville messin où apparaissent dix, vingt ou trente noms de vedettes.
Acte 2 : avec ces extraits de naissance, de fausses fiches d’imposition ou des justificatifs de domicile falsifiés, les auteurs demandent de nouvelles cartes nationales d’identité. L’un des complices utilise sa photo et ses empreintes.
Acte 3 : ces documents authentiques sous le bras, la bande ouvre des comptes en banque ou des crédits à la consommation pour en extraire tout l’argent possible, avant de disparaître. Les escrocs se faisaient aussi passer pour les propriétaires de mobile home ou d’appartements et récupéraient les acomptes versés par des locataires potentiels. Ils auraient eu le temps de détourner près de 150 000 euros avant que les unités de la Brigade mobile de recherche zonale et du Groupe d’intervention régional mettent un frein à leurs activités.
Dans l’ombre, les agents alertent les banques, font bloquer des comptes. Ils suivent le trio à la trace. Et les observent, hallucinés, dans l’un des restaurants de la famille Troisgros. Le repas sera payé en liquide, pas avec la carte bancaire au nom d’un des frères qui prolongent la dynastie culinaire. Une autre fois, c’est le basketteur Evan Fournier qui se retrouve enquiquiné à l’aéroport lorsqu’il veut repartir en direction de la Floride. Sa carte d’identité est restée bloquée à l’enregistrement. Le temps de vérifier qu’il s’agissait bien de lui. Pas de son faux double.
Kevin Grethen (Le Républicain lorrain)