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[Législatives] Le CSV a mené « une campagne invisible et médiocre »


"Début septembre, je suis revenu d'un court séjour à l'étranger et j'ai découvert les panneaux électoraux. Là, je me suis dit : Oh my God !", confesse Pierre Lorang. (photo Hervé Montaigu)

Il porte un regard critique sur la campagne du CSV, évoque ses regrets et émet ses souhaits pour l’avenir du parti. Pierre Lorang, électron libre chrétien-social, membre actif du Dräikinneksgrupp (Groupe des Rois mages), analyse l’échec du CSV qui, selon lui, saura renaître de ses cendres dans cinq ans.

Comment est né le Dräikinneksgrupp, laboratoire d’idées proche du CSV, et quelle était son ambition ?

Pierre Lorang : Tout est parti de quelques anciens du CSJ de la circonscription Nord qui se rencontraient entre amis, début janvier autour de l’Épiphanie. Depuis quelques années, il est devenu un véritable laboratoire d’idées qui, sous sa forme actuelle, est né le 3 janvier 2014 à l’initiative de Charel Schmit. L’ambition ? Mener une réflexion-vérité après le désastre de 2013 et le traumatisme qu’avait subi le CSV.

Le parti était dans le déni et nous n’avons pas supporté cela. Même si la façon de prendre le pouvoir n’était pas très élégante de la part de la « Dräierkoalitioun », avouons que c’est un mode de fonctionnement établi de la politique partisane post-électorale, laquelle, soyons honnêtes, n’a pas pour vocation de simuler du patinage artistique ! Le problème, c’était d’accepter d’être écarté du gouvernement parce que plus personne ne voulait composer une alliance avec le CSV. Tout le monde en avait marre de la suffisance d’un Juncker et d’un Frieden. Notre groupe est un groupe ouvert, sans statuts, sans notables, « l’aile anarchiste du CSV », comme je l’avais caricaturé un jour.

Serge Wilmes, Paul Galles ou encore Élisabeth Margue ont participé, à différents degrés, aux rencontres que vous avez organisées. Dimanche dernier, ils ont tous obtenu des scores plus qu’honorables. Est-ce du pur hasard ?

Non, je crois sincèrement qu’une bonne partie de leur succès est dû au fait qu’ils n’affichent plus cette posture présomptueuse incarnée par le « Breedewee », par référence à la fameuse photo prise en 1983 dans la rue Large et qui montre la « génération Juncker » en marche vers la prise du pouvoir. Elle est synonyme d’un mode de gouvernance inspiré du centralisme démocratique comme dans les vieux partis staliniens. Tu fais semblant que c’est le bon Dieu qui t’as mis à ta place de dignitaire. Le Dräikinneksgrupp était donc persuadé que le CSV devait se renouveler. Il n’était pas nécessairement question de changer les têtes mais surtout les contenus et les comportements.

Justement, Claude Wiseler, pendant la campagne que nous venons de vivre, a fait sienne cette autre posture, assez digne et humble, accompagnée d’une approche pédagogique. Malheureusement, cela ne lui a pas réussi…

Oui, Claude Wiseler a adopté la tenue que nous avions préconisée, celle que nous attendons du Parti chrétien-social, mais c’est aussi son naturel. D’ailleurs c’est lui qui avait déclaré que c’était une chance, une opportunité pour le CSV de se ressourcer dans l’opposition. À notre avis, c’était surtout l’occasion de mettre en valeur toutes les richesses d’un parti de 10 000 membres. Hélas, un tel processus prend beaucoup plus de temps. Je dirais que le CSV n’a fait que la moitié du chemin jusqu’ici.

Où le parti a-t-il péché pour perdre encore des voix ?

Je vois trois raisons majeures que je vais essayer de formuler, sachant que je suis moi-même dans le brainstorming. Ce qui est arrivé dimanche (NDLR : 14 octobre) est quelque chose de très complexe. Je tente d’en décortiquer les causes. J’étais très optimiste jusqu’au printemps. Après la convention d’Ettelbruck entérinant les listes de candidats, j’étais déjà moins optimiste parce que certains affichaient toujours cette attitude du passé.

Finalement je me disais qu’il restait toujours des vieux meubles, mais qu’après tout, c’était Claude Wiseler la tête et le cœur de la campagne. Donc ils ne feraient pas trop de mal, on n’allait pas les décapiter. Je pensais que la campagne allait être menée de manière à ce que cette vieille fatuité ne ressorte pas. Et ce fut même le cas. Puis, début septembre, je suis revenu d’un court séjour à l’étranger et j’ai découvert les panneaux électoraux. Là, je me suis dit : « Oh my God ! ». Une telle campagne, invisible, médiocre, c’est la première raison de l’échec aux élections.

Entretien avec Geneviève Montaigu

A lire en intégralité dans Le Quotidien papier du lundi 22 octobre